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Quand TikTok et Kick vont faire avancer les règles sur la responsabilité des plateformes
Il est désormais acquis que les plateformes doivent répondre de leurs algorithmes et de leurs effets sur les utilisateurs. La lutte contre l'enfermement numérique, les mécanismes d'addiction et les dérives ou l'absence de modération sont au cœur d'un droit en pleine construction. Les plateformes doivent à cet égard assumer leur part de responsabilité au regard des lois nationales des pays dans lesquels leurs services sont accessibles.
C'est tout l'enjeu de l'affaire du décès, cet été, de Jean Pormanove, pseudonyme de la personne qui diffusait quotidiennement pendant plusieurs mois, en direct sur une chaîne hébergée par la plateforme australienne Kick, les violences physiques et humiliations qu'on lui infligeait. Même si son décès a sans doute eu d'autres causes que ces violences, l'affaire a conduit le parquet de Paris à ouvrir une enquête préliminaire pour « fourniture en bande organisée d'une plateforme en ligne illicite », en application du nouvel article 323-3-2 du code pénal(1). La plateforme est accusée de ne pas avoir mis en place les mécanismes de modération nécessaires compte tenu de la gravité des contenus diffusés. On sera curieux de voir comment cette affaire va prospérer et quelle collaboration réserveront les autorités australiennes aux enquêteurs français.
C'est également le défi que pose les préconisations du rapport récemment rendu par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les effets psychologiques de TikTok(2). Après trois mois de travaux, 180 auditions et une vaste consultation citoyenne, le constat est accablant : le réseau social chinois expose massivement les mineurs à des contenus nocifs. Or, près de la moitié des enfants de onze à dix-sept ans sont inscrits sur TikTok et l'utilisent quotidiennement. Ses algorithmes exploitent leur vulnérabilité en favorisant la diffusion de contenus tels que la promotion du suicide, l'automutilation, les troubles alimentaires, la désinformation en matière de santé, le complotisme, l'incitation à la violence, la pornographie, le racisme, l'antisémitisme, et même la pédocriminalité !
Face à ce constat, le rapport parlementaire formule une série de recommandations radicales comme l'interdiction des réseaux sociaux pour les moins de quinze ans, le couvre-feu numérique pour les quinze à dix-huit ans, (inaccessibilité aux plateformes entre vingt-deux et huit heures comme cela est, paraît-il, appliqué en Chine !) et la création d'un « délit de négligence numérique » permettant d'engager la responsabilité des parents défaillants. Le législateur devrait se saisir assez vite de ces propositions. Elles devront se conjuguer avec les « lignes directrices sur la protection des mineurs » que la Commission européenne a publiées, de son côté, le 14 juillet 2025, en application du règlement sur les services numériques (DSA)(3). Le chantier est immense. Mais il paraît désormais acquis pour l'autorité publique qu'il y a urgence à sauver notre jeunesse de ces périls.



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