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Twitter, toujours et encore Twitter !
Le réseau social Twitter est au cœur de la vie démocratique. Il s'y est installé parce qu'il est aujourd'hui le meilleur vecteur de la communication officielle des acteurs publics. Chaque ministère, chaque personnalité politique, toute institution publique qui se respecte a son compte Twitter officiel. Il est rapide, immédiatement accessible et permet de connaitre tout de suite les réactions publiques à cette communication, qu'on peut aussitôt enrichir et compléter, voire supprimer. C'est un outil admirable à cet égard, et c'est donc légitime qu'il occupe cette place centrale.
Il est non moins légitime qu'on s'inquiète alors du changement de propriétaire que Twitter vient de connaître. Elon Musk, puisqu'il s'agit de lui, a annoncé, le 28 octobre dernier, que la liberté d'expression serait désormais la vertu cardinale du réseau social, comme si elle ne l'était pas déjà, et ce faisant, que la politique de modération des contenus jusque-là observée allait être revue. Sa première décision symbolique fut de rétablir le compte de l'ex-président Donald Trump, suspendu après que ce dernier y eut encouragé l'assaut du capitole par ses partisans en janvier 2021. Il a, en outre, licencié, dès son arrivée, Vijaya Gadde, la directrice des affaires juridiques, principale dépositaire jusque-là de la bonne marche de la modération de la plateforme.
Cette arrivée en fanfare ne laisse pas d'inquiéter, lorsqu'on sait les appétits de désinformation que ce réseau, plus encore que les autres, génère. Qu'il s'agisse des menaces de piratage ou des tentatives d'ingérences étrangères notamment pendant les périodes électorales, l'enjeu qu'emporte la nécessaire surveillance et sécurité de la plateforme est en effet majeur. Il l'est aussi au regard de la lutte contre la « haine en ligne » et la diffusion des contenus licites que cette libéralisation ainsi annoncée risque d'entamer.
À ce titre, nos lois du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l'information(1), et celle du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République(2) vont trouver toute leur acuité. L'ARCOM ne s'est d'ailleurs pas fait attendre. Elle vient de rappeler à la plateforme ses obligations légales françaises en matière de contrôle des contenus en ligne. Elle a demandé au réseau social de lui « confirmer » qu'il est « en mesure de faire face aux obligations que la loi lui impose », et de lui faire part « des moyens humains et technologiques consacrés au respect de ces obligations », notamment pour « assurer efficacement la modération des contenus et pratiques illicites » tout en « garantissant la liberté d'expression ». Son président Roch-Olivier Maistre a même fait part de sa « vive inquiétude »(3).
En réalité la question va se résoudre au niveau européen. L'adoption récente du DSA(4) par le Parlement européen va permettre la mise en place de sanctions contre les plateformes qui ne se conformeront pas aux obligations inscrites dans le règlement, sanctions pouvant aller jusqu'à 6 % du chiffre d'affaires mondial annuel du réseau social(5). Ce sera sans doute le meilleur argument qu'Elon Musk entendra, sauf à ce qu'il abandonne l'ambition que Twitter reste au centre du jeu démocratique où il s'est désormais installé.