«QUE POSSÉDEZ-VOUS de plus cher ? - La liberté. » Telle est la réponse de Madame Inès de la Fressange à une question posée au cours d'un entretien publié dans L'Express (1). La cour d'appel de Paris a récemment comblé ses vux en lui accordant, par arrêt infirmatif du 15 décembre 2004 (2), la liberté d'utiliser les marques qu'elle avait naguère cédées à la société qui la licencia le 29 juin 1999.Afin de statuer dans l'affaire Inès de la Fressange, les magistrats parisiens ...
Cour d'appel, Paris, 4e ch. sect. A, 15 décembre 2004, SA Inès de la Fressange c/ Madame Inès de la Fressange et autres
Patrick TAFFOREAU
Professeur à lUniversité de Nancy II, Membre du CRDP de Nancy II
(2) Mihail (Roland) et Silber (Antoine), « Inès de la Fressange », entretien publié dans L'Expressdu 24 oct. 2002 et sur le site www.lexpress.fr.
(3) Paris, 4e ch. A, 15 déc. 2004, Sté Inès de la Fressange c/ Mme Seignard de la Fressange,D. 2005. AJ. 772, obs. Allaeys ; Com. com. électr. févr. 2005, comm. 29, p. 46, note Caron ;Juris-Datan° 258939.
(4) Pollaud-Dulian (Frédéric), « L'utilisation du nom patronymique comme nom commercial »,JCP1992. I. 3618.
(5) Paris, 8 mars 2000.
(6) TGI Paris, 3e ch., 17 sept. 2004, RG 02/15485, Mme Inès de la Fressange c/ SA Inès de laFressange, D. 2004. AJ. 2997, obs. Allaeys; Juris-Datan° 2004-253217 ; JCP2004. II. 10182 ;JCPE & A 2005, n° 181, p. 185, note Pollaud-Dulian.
(7) Le tribunal de grande instance de Brest (aff. SA Doux c/ SA Entrepôts frigorifiques brestoiset SA Tilly Sabco, PIBD2001, n° 711. III. 11) avait rejeté l'action fondée sur ce texte en raison del'insuffisance des preuves du caractère trompeur. Il s'agissait de sacs d'emballage pour la ventede poulets sous la marque Doux composée, outre cette dénomination, de rayures diagonalesbleues, rouges et blanches et du dessin d'un coq. Le défendeur à l'action en contrefaçon ripostaiten tentant de montrer que la marque était devenue trompeuse dès lors que les poulets n'étaientplus élevés en France, alors que le dessin de la marque était censé évoquer notre pays.
(8) Bouche (Nicolas), «La déchéance de la marque devenue déceptive», RJDA3 février, p. 183 ;Reboul (Yves) « La déchéance de la marque depuis la réforme législative du 4 janvier 1991(articleL. 714-5 du CPI)», Mélanges Foyer, PUF, 1997, p. 277.
(9) Sur la notion de déceptivité, v. CJCE, 20 mars 2003, aff. C-291/00, Rec. 2003. I. 2799 ;D. 2003. SC. 2685, obs. Durrande ; Gautier (Pierre-Yves), « Perte du droit sur la marque :renonciation, déchéance, nullité », Juris-Classeur Marques,Fasc. 740, 1994, n° 37.
(10) Dir. CE du Conseil, n° 89/104 du 21 déc. 1988 Rapprochant les législations sur les marques,JOCEL 40, 11 févr. 1989.
(11) Art. 12, § 2, dir. n° 89/104, 21 déc. 1988 : « Le titulaire d'une marque peut également êtredéchu de ses droits lorsque, après la date de son enregistrement, la marque : ( ) ; b) est propre,par suite de l'usage qui en est fait par le titulaire ou avec son consentement, pour les produitsou les services pour lesquels elle est enregistrée, à induire le public en erreur notammentsur la nature, la qualité ou la provenance géographique des produits ou des services.» La mêmedisposition figure à l'art. 50, § 1, c, du règlement communautaire n° 40/94 du 20 déc. 1993Sur la marque communautaire, ( JOCEL 11, 14 janv. 1994, mod. par règlement CE n° 422/2004du 19 févr. 2004, JOUEL 70, 9 mars 2004). La condition d'absence de déceptivité est rédigéedans des termes exactement identiques à ceux de la directive (v. article 7, point g, du règlement).Ces dispositions françaises et communautaires sont conformes aux accords ADPIC qui,eux-mêmes, se conforment à la Convention d'Union de Paris (CUP) de 1883 (v. art. 15 ADPIC).Parmi les causes légitimes de refus d'une marque déjà enregistrée dans un des pays de l'Unionfigure le caractère trompeur de la marque ( CUP, article 6 quinquies, B, 3°).
(12) Art. L. 714-5 CPI.
(13) Art. L. 714-6, a, CPI.
(14) V. Marteau Roujou De Boubee (Isabelle), Les marques déceptives, Litec, 1992, préf. AndréFrançon.
(15) Art. L. 714-6, b, CPI. Sur la déchéance pour déceptivité, v. Chavanne (Albert) et Burst(Jean-Jacques), Droit de la propriété industrielle, Dalloz, coll. "Précis droit privé", 5e éd., 1998,nos 978-979 et n° 1091 ; Françon (André), Cours de propriété littéraire, artistique et industrielle,Litec, coll. "Les cours de droit" 1999, p. 125 ; Galloux (Jean-Christophe), Droit de lapropriété industrielle, Dalloz, coll. "Cours", 2e éd., 2003, n° 1153 ; Gautier (Pierre-Yves), op.cit., Juris-Classeur Marque, Fasc. 740, n° 37 ; Mathely, (Paul), Le nouveau droit français desmarques, Édition du Journal des notaires et des avocats, 1994, p. 280 ; Pollaud-Dulian (Frédéric),Droit de la propriété industrielle, Montchrestien, coll. "Domat droit privé", 1999, nos 1287 à 1289et n° 1813 (marque communautaire) ; Schmidt-Szalewski (Joanna) et Pierre (Jean-Luc), Droitde la propriété industrielle, n° 500.
(16) Com., 3 mai 1983, Bull. civ.IV, n° 130.
(17) V. op. cit., n° 1154.
(18) Pour un tel rapprochement, v. Gautier (Pierre-Yves), Juris-Classeur Marques, op. et loc.cit., n° 37, p. 14.
(19) V. considérant n° 7, in fine.
(20) Mot à mot : « au demandeur incombe la preuve».
(21) Déjà en ce sens : TGI Brest, 26 janv. 2000, préc.
(22) V. considérant n° 5.
(23) V., par ex., Pollaud-Dulian, op. cit., n° 1289 ; - comp. Burst (Jean-Jacques), MélangesFoyer, pp. 212-213, qui optait pour la date de la décision passée en force de chose jugée.
(24) Accord sur les Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce,traité de Marrakech, 15 avr. 1994 ; v. texte in annexe à la loi n° 94-1137 du 27 déc. 1994Autorisant la ratification de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce (ensemblequatre annexes), JOdu 28 décembre 1994, p. 18536.
(25) V. Loiseau (Grégoire), Le nom objet d'un contrat, LGDJ, 1997, spéc. p. 126.
(26) Solution de la jurisprudence Bordas : Com., 12 mars 1985, JCP 1985. II. 20400, noteBonet ; RTD com. 1986. 245, obs. Chavanne et Azema.
(27) Il fait partie, à côté du droit à l'image, des "droits patrimoniaux de la personnalité", sortede droits dérivés, par opposition aux "droits primaires de la personnalité" : Loiseau (Grégoire),Le nom objet d'un contrat, op. cit., et note sous arrêt "Ducasse", Com., 6 mai 2003, D. 2003.J. 220, nos 7-9.
(28) La transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun desdroits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domained'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant aulieu et quant à la durée.
(29) Cf. i nfra, point c).
(30) Com., 6 mai 2003, A. Ducasse c/ A. Ducasse Diffusion, D. 2003. J. 2228, note Loiseau;ibid.AJ. 1565, obs. Daleau ; Droit et patrimoinen° 120, nov. 2003, p. 89, obs. Poracchia ; Rev.Soc. 2003. 548, note Parleani. Dans le même sans, pour des faits similaires : Aix-en-Provence,2e ch., 25 nov. 2004, Compan c/ Coulbault, D. 2005. J. 845, note Poracchia et Maetz.
(31) V., sur ce point, obs. Caron sur l'arrêt du 15 décembre 2004 ici commenté, Com. com.électr.févr. 2005, comm. 29, p. 48.
(32) "tiers de bonne foi employant son nom patronymique".
(33) Aff. "Ferrand" : Paris, 4e ch., 31 oct. 2000, Pierre Ferrand et SARL Paul Monier c/ SARLCognac Ferrand, PIBD 2001, n° 717. III. 175.
(34) Poracchia (Didier), et Maetz (Claude-Albéric), note préc. sous Aix-en-Provence, 2e ch., 25nov. 2004, Compan c/ Coulbault ; Loiseau (Grégoire), note préc. ss. Arrêt Ducasse : selon cedernier, c'est la personnalité notoire qui constitue le bien immatériel.
(35) Poracchia et Maetz, op. et loc. cit.
(36) Arrêt préc. Com., 12 mars 1985.
(37) Com., 13 juin 1995, Rev. Soc. 1996. 65, note Parleani et ibid. 51, comm. Bonneau.
(38) Selon MM. Poracchia et Maetz, « pour les juges aixois, il semblerait que l'insertion dansla dénomination sociale d'un patronyme ne jouissant d'aucune notoriété ne permette pas à sontitulaire de s'opposer à son dépôt par la société à titre de marque», v. leur note préc. sous Aixen-Provence, 2e ch., 25 nov. 2004, Coulbault.
(39) Sur le fondement du droit d'auteur, elle ne pouvait cependant pas invoquer son droit moralsi aucune de ses uvres n'était en cause. Car il s'agit de l'usurpation d'un nom, non pas d'usurpationd'uvre. V. notre manuel, préc., n° 133.
(40) On attend avec impatience la fiducie, qui permettrait un transfert à durée indéterminée.
(41) Sur la notion, v. Malaurie (Philippe), Aynès (Laurent), Stoffel-Munck (Philippe), Les obligations,Defrénois, 2004, n° 839.
(42) V. «Profession mannequin : un acteur incontournable dans le luxe », Revue Lamy Droitdes affaires,supplément, mai 2004, p. 63.
(43) L'art. 18, alinéa 2, du protocole d'accord du 17 janvier 1994 était ainsi rédigé : « À ceteffet, elle (Madame Inès de la Fressange) autorise expressément IF 2, sans limite, à faire usagede son image personnelle dans le cadre de son activité »