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La protection des droits des éditeurs de presse et l'IA générative
L'Autorité de la concurrence vient de sanctionner à nouveau Google pour ne pas avoir respecté les obligations d'exécution de bonne foi qu'elle avait posées dans sa décision du 21 juin 2022, concernant le règlement des droits voisins aux éditeurs de presse. Le moteur de recherche devait notamment « conduire des négociations de bonne foi, sur la base de critères transparents » et « transmettre aux éditeurs les informations nécessaires à l'évaluation de leurs rémunérations ». Or, l'Autorité a notamment constaté que Google avait lancé le service d'intelligence artificielle « Bard » (devenu « Gemini ») en juillet 2023, qui utilise les contenus des éditeurs, sans les en informer et sans proposer une solution technique qui leur permette de s'y opposer, les privant de pouvoir négocier une rémunération à ce titre. Ce manquement, avec les autres constatés par l’Autorité, conduit celle-ci à infliger à Google une nouvelle amende de 250 millions d'euros. L'Autorité ne va pas jusqu'à dire que l’utilisation des contenus de presse dans le cadre d’un tel service d’intelligence artificielle rentre dans le spectre des droits voisins. Le fondement légal de protection des contenus éditoriaux dans lesquels l'IA générative puise ses réponses ressort a priori du droit d'auteur. Il est d'ailleurs l'objet d'une proposition de loi déposée en septembre dernier à l'Assemblée nationale visant à l'encadrer dans le droit d'auteur, en proposant d'ajouter un nouvel alinéa à l'article 131-3 du code de la propriété intellectuelle. C'est aussi ce que prévoit l’IA Act règlement européen adopté le 13 mars 2024 par le Parlement européen qui impose aux opérateurs de se conformer à la législation de l'Union européenne sur les droits d'auteur.
En écho, on signalera l'accord que Le Monde vient de passer avec Open AI, l'éditeur du service ChatGPT, lequel en a conclu de semblables avec d'autres titres de la presse occidentale (le New York Times, Springer et El Pais). De tels accords constituent, de fait, la reconnaissance du droit des éditeurs à s'opposer à la reproduction non-autorisée de leurs contenus, de même que de leur droit à la paternité et à rémunération. Open AI a donc anticipé ce que Google a refusé de faire spontanément, c'est-à-dire négocier avec les titulaires des droits. Il reste qu'il faudra, pour que ChatGPT ne soit pas univoque, en se contentant de ce qu'a pu écrire Le Monde sur telle ou telle question, que Open AI passe des accords semblables avec les autres titres de la presse française. Sans doute faudra-t-il réfléchir à un système de licence légale d’affichage des sources pour rendre le système plus fluide.
Il faut souhaiter enfin que la liberté éditoriale et la liberté économique des titres soient préservées par de tels accords. Il faudrait en outre qu'ils ne s'accompagnent pas de la disparition d'un trop grand nombre de journalistes dans les rédactions. À terme, c'est le renouvellement des équipes qui serait menacé.