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Fouille de textes et de données, œuvres indisponibles, licences collectives étendues… l’ordonnance du 24 novembre 2021 finalise la transposition de la directive 2019/790
Après la loi du 24 juillet 20219 ayant consacré le droit voisin des éditeurs et agences de presse, et l’ordonnance du 12 mai 2021 ayant notamment transposé le nouveau régime de responsabilité des fournisseurs de partage de contenus ainsi que les mécanismes afférents à la juste rémunération des ayants droit, l’ordonnance du 24 novembre 2021 vient finaliser la transposition de la directive (UE) 2019/790 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique, dont l’échéance était fixée au 7 juin dernier.
Exceptions nouvelles ou réaménagées
Conformément aux articles 3 à 6 de la directive, le texte consacre et adapte des exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins afin de favoriser la fouille de textes et de données, l’utilisation d’extraits d’œuvres à des fins d’illustration dans le cadre de l’enseignement et la reproduction des œuvres dans un souci de conservation du patrimoine culturel.
L'article 1er de l'ordonnance transpose tout d’abord les exceptions consacrées aux articles 3 et 4 de la directive, relatives aux activités de fouille de textes et de données. Ainsi, une première exception est consacrée, au bénéfice des organismes de recherche et des institutions du patrimoine culturel qui diligentent des fouilles à des fins de recherche scientifique, à laquelle les titulaires de droits ne peuvent s'opposer (II de l'article L. 122-5-3 du CPI). L'élaboration d'une charte des bonnes pratiques est prévue afin de faciliter la mise en œuvre de cette exception. L'ordonnance consacre une seconde exception au bénéfice de toute fouille, quelle que soit sa finalité, sous réserve toutefois que le titulaire n'ait pas exprimé son opposition (III de l'article L. 122-5-3 du CPI).
L'article 1er de l'ordonnance modifie ensuite les termes de l'exception jusque-là prévue au e de l'article L. 122-5 du CPI, concernant l'usage d'extraits d'œuvres à des fins d'illustration dans le cadre de l'enseignement et de la formation professionnelle, désormais définie au 12° du même article et à l'article L. 122-5-4 du CPI. Conformément aux dispositions de l'article 5 de la directive, il est prévu que cette exception couvre les activités numériques, au moyen d'un environnement sécurisé accessibles uniquement aux élèves et aux enseignants, et transfrontières. La mise en œuvre de cette exception peut toutefois être écartée, en totalité ou pour certaines catégories d'œuvres seulement, dès lors qu'existent des licences autorisant les actes visés par l'exception. Ces licences doivent répondre aux besoins et spécificités des établissements d'enseignement et être d'accès aisé pour ces derniers.
L'ordonnance transpose, enfin, l'exception instaurée par l'article 6 de la directive à des fins de conservation du patrimoine culturel pour les logiciels et bases de données (art. L. 122-6-1, V et L. 342-3, 5° du CPI), sachant que les exceptions prévues au 8° de l'article L. 122-5 et au 7° de l'article 211-3 du CPI permettent d'ores et déjà aux institutions du patrimoine culturel de reproduire des œuvres et des objets protégés par le droit voisin à des fins de conservation et dans la mesure nécessaire à cette conservation.
Il reviendra à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) de garantir, à compter du 1er janvier prochain, le bénéfice effectif de ces exceptions, au regard notamment de la mise en œuvre de mesures techniques de protection.
Œuvres indisponibles et licences collectives étendues
L’ordonnance vise ensuite à élargir l’accès aux œuvres par le biais de licences collectives. À ce titre, elle instaure un nouveau système permettant aux institutions du patrimoine culturel, comme les bibliothèques, les musées et les archives, à numériser et à diffuser, y compris en ligne et par-delà les frontières dans l’Union européenne, des œuvres dont elles disposent mais qui sont indisponibles dans le commerce. L'article 5 de l'ordonnance définit la notion d'œuvre indisponible (article L. 138-1 du CPI).
Le texte consacre, enfin, une règle spécifique relative à l’octroi de licences collectives étendues. Par ce mécanisme, il s’agit de permettre à un organisme de gestion collective de négocier un accord non seulement au profit de ses membres mais aussi des auteurs non adhérents dès lors que cet organisme est représentatif des œuvres concernées (les auteurs non adhérents ayant par ailleurs la faculté de se retirer du dispositif). Le recours aux licences collectives étendues n'est possible que dans les cas où l'exercice individuel et la gestion collective classique ne permettent pas d'apporter des réponses satisfaisantes au regard de l'ampleur de l'utilisation des œuvres. C'est, entre autres, pour cette raison que l'ordonnance définit strictement les domaines pour lesquels le mécanisme de licence étendue est retenu.
L'article 1er de l'ordonnance prévoit ainsi la possibilité de recourir à de telles licences afin d'autoriser les établissements d'enseignement à exploiter des œuvres sous une forme numérique à des fins d'illustration, dans le cadre de l'enseignement. La conclusion de licences collectives étendues est également prévue aux articles 4 et 6 de l’ordonnance en ce qui concerne l'exploitation des œuvres des arts visuels par les plateformes de partage de contenus, d'une part, et dans le cadre des travaux scientifiques publiés de manière ouverte sur internet, d'autre part.
Enfin, l'article 3 de l'ordonnance tire parti de la possibilité offerte par la directive de mettre en œuvre des mécanismes d'octroi de licences collectives ayant un effet étendu pour modifier les dispositions issues de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l'exploitation numérique des livres indisponibles du xxe siècle afin d'assurer sa conformité avec les exigences tirées du droit de l'Union.