(auteur, réf. de texte ou de décision…)
Recherche
(auteur, réf. de texte ou de décision…)
Enews Legipresse
Le club Légipresse
Vidéos
Reproduction, jugée fautive, de la façade d’un château en couverture d’un magazine d’un agent immobilier haut de gamme
Un exploitant de vignoble à St Estèphe reproche à une société spécialisée dans le marché immobilier haut de gamme d’avoir utilisé, sans son accord, une photographie de la façade de son château, par ailleurs représentée sur les étiquettes des bouteilles qu’il produit, en couverture d’un magazine édité par la société immobilière et portant sur les tendances et perspectives de l’année. L’exploitant considère que cette reproduction lui cause un trouble anormal en ce qu’elle laisse à penser que le château est en vente et que, ce faisant, la société immobilière s’est rendue coupable d’agissements parasitaires, en utilisant, sans bourse délier, la forte notoriété du château à son profit.
S’agissant de cette reproduction, les parties invoquent la jurisprudence de la Cour de cassation et plus précisément du « trouble anormal » d’exploitation ou de jouissance qui doit seul, selon le tribunal, déterminer si cette reproduction est fautive ou non et a pu causer un préjudice au demandeur. Le tribunal relève que la défenderesse reconnaît une utilisation involontaire et « maladroite » de cette photographie, et justifie avoir retiré la photographie de la version électronique de son magazine et demandé à ses agences de retirer le magazine litigieux de la présentation à la clientèle. Il juge que ces éléments démontrent que la société défenderesse avait conscience du trouble créé au château. Parallèlement, les pièces versées au débat attestent que cette publication a surpris, voire offusqué, un certain nombre d’acteurs au sein de cette communauté professionnelle et a contribué à déstabiliser, au moins localement et temporairement, l’image dudit château dans la profession et ce, concomitamment à la mise en vente de la cuvée 2018 en primeur. Le tribunal juge qu’un trouble anormal est ainsi établi, qui est la conséquence de la reproduction fautive de la façade du château par l’agent immobilier, au sens de l’article 1240 du code civil.
S’agissant des actes de parasitisme économique, il est jugé que ceux-ci doivent être appréciés au regard de la seule notoriété de la façade du château objet de la publication litigieuse, donc indépendamment de la notoriété des vins de la propriété. Or pour le tribunal, le demandeur procède par affirmation, sans fournir des éléments de preuve tangibles et spécifiques démontrant que la notoriété de cette façade répond aux critères rappelés pour établir celle-ci, à savoir : par des éléments objectifs, par des investissements spécifiques et significatifs, et sur une cible large. Le grief de parasitisme économique n’est donc pas établi.
Le tribunal condamne l’entreprise défenderesse à verser à l’exploitant viticole 10 000 € de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi s’agissant de l’atteinte à son image de marque résultant de la publication litigieuse.