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Affaire Playmedia : la CJUE répond aux questions préjudicielles du Conseil d’Etat sur le « must carry »
La CJUE était saisie de questions préjudicielles posées par le Conseil d’Etat, dans le cadre d’un litige opposant France Télévisions au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Le 27 mai 2015, ce dernier a mis le groupe audiovisuel public en demeure de se conformer, à l’avenir, aux dispositions de l’article 34-2 de la loi n° 86-1067, du 30 septembre 1986, relative à la liberté de la communication, en ne s’opposant pas à la reprise, par Playmédia, en flux continu et en direct, sur son site Internet, des programmes édités par France Télévisions. Playmédia propose le visionnage de programmes de télévision en flux continu et en direct sur un site Internet et se rémunère principalement par la diffusion de messages publicitaires qui précèdent et accompagnent ce visionnage. Se prévalant de la qualité de distributeur de services, au sens de l’article 2-1 de la loi relative à la liberté de la communication, Playmédia estime tirer des dispositions de l’article 34-2 de cette loi le droit de diffuser les programmes édités par France Télévisions. France Télévisions diffuse par ailleurs elle-même lesdits programmes en flux continu et en direct sur un site Internet qu’elle met à la disposition du public.
France Télévisions a demandé l’annulation de la mise en demeure du CSA, en soutenant que Playmédia ne peut bénéficier de l’obligation prévue à l’article 34-2 de ladite loi. France Télévisions a fait valoir, à cet égard, que les conditions prévues à l’article 31, paragraphe 1, de la directive « service universel » ne sont pas remplies, dès lors, en particulier, qu’il n’est pas possible d’affirmer que des utilisateurs du réseau Internet en nombre significatif l’utilisent comme leur principal moyen pour recevoir des émissions de télévision.Dans ces conditions, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour plusieurs questions préjudicielles.
Tout d’abord, le Conseil d’Etat a demandé, si l’article 31, paragraphe 1, de la directive « service universel » doit être interprété en ce sens qu’une entreprise qui propose le visionnage de programmes de télévision en flux continu et en direct sur Internet doit, en raison de ce seul fait, être regardée comme une entreprise qui fournit un réseau de communications électroniques utilisées pour la diffusion publique de chaînes de radio et de télévision.En effet, en vertu de ces dispositions, les États membres peuvent, sous certaines conditions, imposer des obligations de diffuser (must carry) aux entreprises relevant de leur ressort qui fournissent des réseaux de communications électroniques utilisés pour la diffusion publique de chaînes de radio et de télévision. Or, la CJUE juge que l’activité qui consiste à proposer le visionnage de programmes de télévision en flux continu et en direct sur un site Internet ne fournit pas un réseau de communications électroniques, mais offre, en revanche, un accès aux contenus de services audiovisuels fournis sur les réseaux de communications électroniques. Ainsi, pour la Cour, Playmédia, qui se limite à offrir, au moyen d’un site internet, un accès à des contenus fournis sur internet ne relève pas de l’article 31, paragraphe 1, de la directive « service universel ».
Le Conseil d’Etat demandait ensuite à la CJUE si les dispositions de la directive « service universel » doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’un État membre impose, dans une situation telle que celle en cause en l’espèce, une obligation de diffuser (must carry) à des entreprises qui, sans fournir des réseaux de communications électroniques, proposent le visionnage de programmes de télévision en flux continu et en direct sur Internet. Comme le relève la Cour, en l’espèce, des obligations de diffuser (must carry) ont été imposées, en vertu du droit national, à des entreprises qui ne relèvent pas de l’article 31, paragraphe 1, de la directive « service universel ». En effet, le champ d’application de l’obligation de diffuser (must carry) visée aux articles 2-1 et 34-2 de la loi relative à la liberté de la communication est différent de celui qui est prévu audit article 31, paragraphe 1. Il appartiendra donc à la juridiction de renvoi d’établir si des obligations de diffuser (must carry) ont effectivement été imposées à des entreprises telles que Playmédia. En tout état de cause, selon la Cour, les dispositions de la directive « service universel » ne s’opposent pas à ce qu’un État membre impose, dans une situation telle que celle en cause au principal, une obligation de diffuser (must carry) à des entreprises qui, sans fournir des réseaux de communications électroniques, proposent le visionnage de programmes de télévision en flux continu et en direct sur Internet.