C'est à juste titre que le tribunal a retenu que, en l'absence d'adhésion obligatoire, l'article L. 321-1 du Code de la propriété intellectuelle ne peut s'interpréter comme donnant une habilitation légale à la Spedidam pour la défense des intérêts individuels de tous les artistes-interprètes mais uniquement pour la défense des intérêts individuels de ses membres qui lui ont fait apport de leurs droits et que la Spedidam ne peut être admise à se prétendre titulaire d'un monopole sur la défense des droits individuels des artistes interprètes. Dès lors, la Spedidam n'est recevable à agir que pour la défense des droits individuels de ses membres adhérents ainsi que des artistes musiciens lui ayant donné mandat d'agir en justice. Hors le cas d'une volonté expresse contraire du législateur dont il n'est pas question en l'espèce, les contrats conclus avant l'entrée en vigueur d'une loi nouvelle, même si leurs effets perdurent après l'entrée en vigueur de cette loi, demeurent régis par les dispositions sous l'empire desquels ils ont été passés. C'est également à tort que la Spedidam soutient que l'article L. 212-3 du Code de la propriété intellectuelle exigeant l'autorisation écrite des artistes-interprètes pour la fixation de leurs prestations, leur reproduction et leur communication au public, a vocation à régir les enregistrements produits avant l'entrée en vigueur de ce texte et dans le cadre contractuel d'accords collectifs dans lequel, en l'absence de réserve expresse, l'autorisation des artistes interprètes membres de la Spedidam à l'utilisation future de leur prestation pour la sonorisation de films cinématographiques résultait, sans nécessité d'un écrit spécial, de leur seule participation à l'enregistrement, indissociable de l'acceptation de la rémunération supplémentaire prévue, dans cette éventualité, par ces accords.
La cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 18 mai 2011 (1), a rendu une décision d'une grande clarté et d'une grande qualité juridique. Les questions abordées étaient complexes et avaient fait l'objet de débats vifs : il s'agissait de savoir si la Spedidam pouvait agir en justice au nom d'artistes interprètes qui ne sont pas membres de cette Sprd et qui ne lui ont pas donné un mandat explicite en ce sens, d'une part, et de déterminer l'application dans le temps du régime des droits ...
Cour d'appel, Paris, Pôle 5, ch. 1, 18 mai 2011, Spedidam c/ Canal Plus Distribution et a.
Nicolas BINCTIN
Professeur agrégé des Facultés de Droit, Université de Poitiers - CECOJI
(2) CA Paris, Pôle 5 Chambre 1, 18 mai 2011, RG 09/01971, un pourvoi a étéformé par la Spedidam.
(3) Tgi Paris, 21 janvier 2009, RG n° 05/03857.
(4) Voir la procédure civile allemande qui impose des demandes mesurées ; cf.J. Boudon, La passion de la modération d'Aristote à N. Sarkozy, Dalloz 2011.
(5) Voir J-M. Bruguière, « La recevabilité de l'action des SpRd à agir en contrefaçonpour des créateurs non-membres », JCP E 2009, 1471 ; N. Binctin, « Laqualité à agir des SpRd pour les non-membres Errements de la jurisprudence »,Légipresse n° 261, II-52.
(15) Pour l'action dans l'intérêt collectif de la profession, voir Cass. civ. I, 12 mai2011 n° 10-10086.
(16) Cf., L. Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictionsadministratives et judiciaires, thèse, éd. Lgdj 1997, coll. Bibl. de droit privé,t. 278, n° 114 et 435 ; F. Pollaud-Dulian, Le droit d'auteur, Economica 2005, n° 1173et 1202 ; M. Vivant et J-M. Bruguière, Droit d'auteur, Dalloz 2009, n° 1141. Voirl'évolution de la pensée de P.-Y. Gautier, entre la 6e (2007) et la 7e (2010) édition,chez Puf, de son Propriété littéraire et artistique, au n° 797.
(17) N. Binctin, Droit de la propriété intellectuelle, Lgdj 2010, n° 205.
(18) Notamment, Cass. Civ. 1, 24 sept. 2009, Bull. civ. 1, n° 184 ; Cce 2009, comm.98, note C. Caron ; D. 2010, p. 1466, note T. Azzi.
(19) Cass. civ 3, 3 juil. 1979, Bull. civ. 3, n° 149 ; Cass. civ. 1, 4 mai 1982, Bull. civ. 1,n° 156. Cf. J. Mestre et B. Fages, Rtd civ. 2002.507.
(20) Cass. civ. 1er fév. 2006, n° 04-20607, et la requête en interprétation, Cass. civ. 1,30 oct. 2007, n° 04-20607.
(21) Voir la jurisprudence sur le droit moral notamment, N. Binctin, Droit de lapropriété intellectuelle, Lgdj 2010, n° 170 et sq.