L'ARRÊT DE LA COUR D'APPEL de Paris du 4 juin 2004 fait partie de ces décisions riches d'enseignements, dont l'intérêt se prolonge bien au-delà de la question principale. Sur le fond, la décision était relative au caractère contrefaisant d'une uvre de collaboration.Lucien Lambert avait créé un scénario intitulé Émilie qui avait fait l'objet d'une adaptation théâtrale sous le titre Le soleil se lèvera à midi, et dont la traduction avait été effectuée par Norman Stokle, afin ...
Cour d'appel, Paris, 4e ch. sect. B, 4 juin 2004, L. Lambert c/C. Zidi, J. Cameron
Agnès ROBIN
Maître de conférences à la Faculté de Droit de Montpellier, Équipe de ...
(2) Pour un commentaire de la solution sur la contrefaçon, voir P. Sirinelli, note sous Paris, 4 juin2004 : PI, oct. 2004, n° 13, chr., p. 923.
(3) Au moins depuis un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 4 octobre1988 : Bull. civ., I, n° 268 ; D., 1988, IR, p. 255 ; D.,1989, p. 482, note Gautier ; ibid., som.com., p. 50, obs. Colombet ; RTDCOM, 1990, p. 32, obs. Françon ; RIDA, juillet 1989, n° 141,p. 251 : « le coauteur d'une uvre de collaboration qui prend l'initiative d'agir en justice pourla défense de ses droits patrimoniaux est tenu, à peine d'irrecevabilité de sa demande, demettre en cause les auteurs de cette uvre ».
(4) Civ. 1re, 4 octobre 1988 : préc. Cette solution a, depuis lors, été adoptée par les juridictionsdu fond, TGI Paris, 9 mai 1990 : RIDA, janvier 1991, n° 147, p. 355 ; Cah. Dr aut., 1991, p. 15 ;TGI Créteil, 14 janvier 1992 : RIDA, juillet 1992, n° 153, p. 197 ; TGI Paris, 23 septembre 1992 :RIDA, octobre 1993, n° 158, p. 257 ; TGI Nanterre, 17 juin 1992 : RIDA, octobre 1992, n° 154,p. 180 ; Paris, 14 février 2001 : CCE, 2001, p. 19, note Caron ; D., 2001, som. com., p. 2637,obs. Sirinelli ; Juris-Data, n° 134242 ; 18 décembre 2002 : Juris-Data, n° 203810 ; Lyon,20 mars 2003 : D., 2003, jur., p. 3037, note Edelman ; PI, octobre 2003, n° 9, p. 379, obs.A. Lucas ; Juris-Data, n° 228358 ; TGI Paris, 17 mai 2002 : Expertises, 2002, p. 398, noteGauvain ; TGI Paris, 31 mars 2003 : Expertises, 2003, n° 271, p. 224, note Matthias ; Juris-Data, n° 217912.Elle a également été confirmée par Civ. 1re, 10 mai 1995 : D., 1996, 2, p. 114, note Edelman ;RIDA, octobre 1995, n° 166, p. 285, obs. Kéréver ; Civ. 1re, 5 décembre 1995 : Bull. civ., I,n° 450 ; D., 1996, IR, p. 25 ; D. Aff., 1996, p. 154 ; Jcp, 1996, IV, 254, p. 32 ; Gaz. Pal.,16 au 16 août 1996, n° 229-233, Pan., p. 188 ; Juris-Data, n° 003517 ; Crim., 13 décembre1995 : D., 1997, 2, p. 196, note Edelman ; D., 1996, IR, p. 42 ; RIDA, juillet 1996, n° 169,p. 307 ; RTDCOM, 1996, p. 460, obs. Françon ; Civ. 1re, 15 octobre 1996 : Bull. civ., I, n° 356 ;11 janvier 2000 : Bull. civ., I, n° 6 ; Crim., 19 septembre 2000 : Gaz. Pal., 26 et 27 janvier2001, Chr., p. 14, obs. Doulcet ; D., 2001, act. jur., p. 236 ; Juris-Data, n° 006253. L'interventionne semble pas, en revanche, requise lorsque l'uvre litigieuse n'est qu'une uvre composite,voir Civ. 1re, 26 janvier 1994 : Bull. civ., I, n° 35 ; JCP, 1994, IV, 844, p. 110 ; RIDA, octobre 1994,n° 162, p. 433 ; D., 1994, IR, p. 55 ; Gaz. Pal., 3-5 juillet 1994, n° 184-186, Pan., p. 142 ;ibid., 27 au 27 janvier 1995, n° 27-28, IV, p. 14 ; RIPIA, 1994, p. 683 ; Juris-Data, n° 000209.
(5) Paris, 16 décembre 1932 : Gaz. Pal., 1933, 1, p. 369 ; TGI Paris, 19 mai 1987 : Cah. Dr aut.,1988, p. 3 ; TGI Paris, 6 janvier 1988 : Cah. Dr aut., 1989, p. 23 ; TGI Paris, 15 avril 1988 :PIBD,1988, n° 440, III, p. 381.
(6) J. Vincent et S. Guinchard, Procédure civile, Dalloz, Paris, 2003, n° 1160, p. 867.
(7) Paris, 2 avril 2004, inédit : « Considérant cependant que les intimés qui arguent de cetteirrecevabilité n'avaient plus contesté en première instance la recevabilité des demandes deMlle Revillard et de M. Siraudeau après intervention dans la cause de ce dernier et de Mme Saulereconnaissant par là que le nombre des auteurs de l'uvre de collaboration Versailles (dontils contestaient la nature) se limitait aux personnes susnommées ». La Cour de cassationsemble cependant admettre la possibilité d'une mise en cause devant la cour d'appel, voir Civ.1re, 11 janvier 2000, préc.
(8) TGI Créteil, 14 janvier 1992, préc. En appel, Paris, 16 novembre 1992 : Juris-Data, n° 022985.Sur pourvoi, Civ. 1re, 10 mai 1995, préc.
(9) Voir notre thèse, La copropriété intellectuelle. Contribution à l'étude de l'indivision et de lapropriété intellectuelle, PUA-LGDJ, à paraître, n° 346 et s.
(10) La Cour de cassation a, en effet, affirmé qu'« il résulte de l'article L. 113-3 du Code de lapropriété intellectuelle que la recevabilité de la demande d'un coauteur agissant en justice pourla défense de ses droits patrimoniaux n'est subordonnée qu'à la mise en cause des coauteurs». Nous soulignons. Ceci signifiait, en l'espèce, que lorsque les coauteurs comparantn'ont pas manifesté leur opposition à la demande et que le défaut de comparution des autresn'était assorti d'aucun motif d'opposition, l'action peut être déclarée recevable du fait du simpleappel en la cause des coauteurs, Civ. 1re, 5 décembre 1995, préc. Et le fait pour un coauteurde renoncer à poursuivre l'action (en l'espèce, en résiliation d'un contrat d'édition) ne constituepas une opposition dès lors qu'il n'a pas demandé sa mise hors de cause, Civ. 1re, 11 janvier2000, préc.
(11) TGI Paris, 9 mai 1990, préc. : un coauteur ne peut se voir reprocher « de ne pas agir enconcours »avec l'autre dès lors qu'il l'a « appelé en la cause».
(12) Voir Civ. 3e, 9 novembre 1983 : Bull. civ., III, n° 221 ; 25 avril 2001 : JCP, 2001, IV, 2085 ;ibid., 2001, I, 358, n° 2, obs. H. Périnet-Marquet ; Juris-Data, n° 009290. Et plus récemment,Paris, 11 mars 2004 : Juris-Data, n° 235095.
(14) Civ., 20 juillet 1925 : DH, 1925, p. 649 ; Defrénois, 1926, art. 21247 ; D., 1950, p. 93,note G. R. ; Civ., 28 juin 1949 : D., 1950, 2, p. 93, note G. R. ; Civ. 1re, 15 janvier 1962 : Bull.civ., I, n° 26 ; 25 février 1963 : Bull. civ., I, n° 119 ; Civ. 2e, 11 mars 1965 : Bull. civ., II, n° 255 ;Civ. 1re, 31 mai 1965 : Bull. civ., I, n° 352 ; Civ. 1re, 24 janvier 1968 : Bull. civ., I, n° 34 ; Civ.3e, 14 mai 1969 : Bull. civ., III, n° 389 ; 28 novembre 1973 : D., 1974, 2, p. 725, noteD. Souleau ; Defrénois, art. 30677, 1974, n° 31, p. 860 ; RTDCIV., 1975, p. 329, obs.C. Giverdon ; Civ. 1re, 20 mai 1981 : Bull. civ., I, n° 177 ; 3 juillet 1984 : Bull. civ., I, n° 216 ;21 mai 1990 : Bull. civ., I, n° 121 ; Civ. 3e, 4 décembre 1991 : Bull. civ., III, n° 305 ; Crim.,27 février 1996 : Bull. crim., n° 96 ; JCP, 1996, IV, 1244 ; RTDCIV., 1996, p. 937, obs. F. Zénati.Dans cette dernière espèce, en acceptant de statuer sur le litige à la seule demande des deuxindivisaires concernés et donc en déclarant leur action recevable , la Cour a autoriséchaque coïndivisaire à revendiquer seul la restitution du bien indivis à l'indivision.
(15) Quelques décisions sont cependant fondées sur l'article 815-2 du Code civil et sur le principequi en résulte selon lequel tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à laconservation des biens indivis, voir, par exemple, Civ. 3e, 4 novembre 1976 : Bull. civ., III,n° 380 ; Civ. 3e, 17 avril 1991 : Bull. civ., III, n° 124 ; Defrénois, 1992, art. 35201, p. 233, noteM. Beaubrun. Pourtant, dans cette espèce, il s'agissait bien également d'une action en revendication.Pour une action de nature possessoire, voir, par exemple, Paris, 25 janvier 1983 :JCP,1983, Ed. N, II, p. 157 ; RTDCIV., 1984, p. 135, obs. J. Patarin.
(16) « Chacun des coauteurs est qualifié pour intenter, seul, une action en contrefaçon », op.cit., n° 650, p. 769. Nous soulignons.
(17) Paris, 19 décembre 1878 : DP, 1880, 2, p. 62 : « chacun des collaborateurs a sur l'uvreun droit égal et indivisible et par suite qualité pour agir seul, en vue de faire respecter leursdroits pécuniaires et moraux ». Civ., 21 juillet 1908 : S., 1909, 1, p. 121, note G. Lyon-Caen ;Trib. civ. Seine, 16 mars 1934 : Gaz. Trib., 1934, 2, p. 118 ; JCP, 1934, II, 537 : « c hacun descollaborateurs à une uvre artistique, a sur cette uvre un droit égal et indivisible et, est parsuite qualifié pour agir seul en vue de faire respecter les droits pécuniaires et moraux dont ilse croit fondé à se prévaloir » ; Paris, 3 novembre 1956 : Gaz. Pal., 1956, 2, p. 324.
(18) Sur la notion de droit indivis, voir notre thèse préc.
(19) Voir notre thèse, préc., n° 353.
(20) Contra P.-Y. Gautier, op. cit., n° 394, p. 588.
(21) Civ. 1re, 25 février 1963 : Bull. civ., I, n° 119 ; Civ. 3e, 5 novembre 1975 : Bull. civ., III,n° 318 ; Gaz. Pal., 1976, I, somm., p. 24.
(22) « la tierce opposition peut être définie comme une voie de recours extraordinaire ouverteà tous les tiers quand ils sont lésés ou même simplement menacés d'un préjudice par l'effetd'un jugement auquel ils sont restés étrangers », J. Vincent et S. Guinchard, op. cit., n° 1484,p. 1048.
(23) Civ. 3e, 6 novembre 1970 : Bull. civ., III, n° 595.
(24) Ceci explique d'ailleurs que les juges n'exigent de la part de l'auteur qui agit en saisiecontrefaçonaucune mise en cause des coauteurs. N'autorisant aucun débat sur le fond, la saisie-contrefaçon ne risque pas, en effet, de remettre en cause la propriété littéraire ou artistiquedes coauteurs sur l'uvre commune. Voir Paris, 25 avril 1989 : Juris-Data, n° 021958,décidant que lorsque les droits de reproduction de l'uvre d'un peintre sont indivis entre unhéritier réservataire et un légataire universel, celui-ci peut faire procéder seul à une saisiecontrefaçon,mais ne peut assigner en validation de cette saisie ; TGI Paris, 5 mars 1993 (réf.) :RIDA, avril 1993, n° 156, p. 240. Sur ce point, voir A. et H.-J. Lucas, op. cit., n° 186, p. 167.
(25) Civ. 2e, 10 février 1988 : JCP,1988, IV, p. 143 ; RTDCIV., 1988, p. 577, obs. Perrot : lejuge avait créé lui-même la cause de fin de non-recevoir Néanmoins, il reste qu'une fin denon-recevoir peut être proposée en tout état de cause, sauf la ossibilité pour le juge de condamnerà des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, deles soulever plus tôt (art. 123 NCPC).
(26) On rappellera que l'indivision n'est pas indivisible, contrairement à ce qui se produit pourles codébiteurs solidaires qui sont considérés chacun comme étant le représentant nécessairede ses coobligés, impliquant que la chose jugée à l'égard de l'un est opposable aux autres quisont restés en dehors de l'instance, Soc., 7 octobre 1981 : Bull. civ., V, n° 764. Cette disparitésemble a priori fondée dans la mesure où les indivisaires demeurent des tiers entre eux,les droits de propriété qu'ils exercent étant seulement en concours et parallèles.
(27) « Le juge peut inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présencelui paraît nécessaire à la solution du litige ».
(28) R. Martin, Intervention, Juris. Cl. Procédure civile, Fasc. 127-1, 6, 1996, n° 115. Danscette dernière hypothèse, le juge se contentera donc d'opérer par renvoi ou encore de surseoirà statuer tant que tous les intéressés ne seront pas présents ou représentés dans lelitige. Voir ainsi Reims, 21 septembre 1994 : Juris-Data, n° 0046236 : « Si l'article 332, alinéa1, du nouveau Code procédure civile confère au juge le pouvoir d'inviter les parties à mettreen cause les personnes dont la présence apparaît nécessaire, cette possibilité n'est assortied'aucun pouvoir coercitif et ne peut être sanctionnée ».
(29) Com., 8 février 1982 : Bull. civ., IV, n° 49.
(30) Civ. 1re, 16 juin 1987 : Bull. civ., I, n° 196.