Depuis quelques mois, les décisions relatives à la titularité des uvres multimédias se suivent et ne se ressemblent pas ! Preuve, sans doute, que les processus de création et d'exploitation de ce type d'uvre sont encore insuffisamment normalisés, ou qu'ils ne peuvent se réduire à des archétypes. En effet, alors qu'une première décision d'appel avait retenu la qualification d'uvre collective, en étendant ses effets sur le plan du droit moral des créateurs (1), un second ...
Tribunal de grande instance, Paris, 3e ch. 1re sect., 30 janvier 2002, Revillard c/ Saule, Cryo interactive entertainment
Frédéric SARDAIN
Docteur en droit, Avocat au Barreau de Paris Latournerie Wolfrom & Associés
(2) CA Versailles, 13e ch., 18 novembre 1999, M. Vincent c/ SA Cuc Software International,Communication Commerce électronique, février 2000, p. 13, note Ch. Caron ; Légipresse2000, n° 170-III, p. 51, note P. Tafforeau ; JCPéd. E, 2000, p. 1543, obs. F. Sardain.
(3) CA Paris, 4e ch. B, 28 avril 2000, Sté Havas Interactive c/ Mme F. Casaril, Légipresse2000,n° 173-III, note A. Latreille, p. 107.
(4) A. Latreille, Légipresse2000, n° 173-III, p. 110. 4. Sur la question, v. notamment Ph. Gaudrat, « À la poursuite de l'uvre multimédia », in Lescréations multimédias, Droit des technologies avancées, Hermès, volume 8, n° 2/2001, p. 19 s.
(6) Cass. crim., 21 juin 2000, Midway c/ Pierre T., JCPéd. E, 2001, p. 316.
(7) E. Treppoz, « La pertinence de la qualification logicielle d'un jeu vidéo par la Cour de cassation», Petites Affiches, 27 juin 2001, p. 15.
(8) F. Sardain, « La qualification logicielle des jeux vidéo : une impasse pour le multimédia »,JCP éd. E, 2001, p. 312 ; « Du droit du multimédia au droit de l'unimédium », in Les créationsmultimédias, Droit des technologies avancées, Hermès, volume 8, n° 2/2001, spéc. p. 108 s.,n° 23 à 28.
(9) M. Vivant, J.-M. Bruguière, N. Mallet-Poujol, « Chronique de droit de l'informatique », JCPéd. E, 2001, p. 843, n° 1; P. Sirinelli, « Chronique de propriété littéraire et artistique », D.2001,p. 2552; Ch. Caron, « Chronique de propriété intellectuelle », Communication Commerce électronique,2001, n° 8, comm. n° 85.
(10) En ce sens, Ch. Caron, note préc.
(11) Pour défaut de reddition de compte, non communication des contrats d'exploitation conclusavec des tiers, non communication de l'ensemble des états de vente, etc
(12) Pour absence du nom de la scénariste sur les jaquettes et les manuels du jeu.
(13) TGI Paris, 3e ch., 8 sept. 1998, Casaril c/ Arborescence, RIDA 1999, n° 181, p. 318 etp. 271, obs. A. Kéréver.
(14) Art. L. 113-2 CPI.
(15) Cass. civ., 1re ch., 18 octobre 1994, Bull. civ.I, n° 298 ; JCP E 1996, I, 580, p. 338, obs.D. Bougerol.
(16) C'est pourquoi nous ne partageons pas le point de vue de M. le Pr. Caron, lorsqu'il avancequ'il « semble judicieux de ne pas rechercher la qualification du CD-ROM en se référant au genredes uvres (genre audiovisuel, genre logiciel), mais au contraire en scrutant les catégories dedroit commun que nous offre le code de la propriété intellectuelle, c'est-à-dire l'uvre collectiveet l'uvre de collaboration »(note sous CA Versailles, 13e ch., 18 novembre 1999,M. Vincent c/ SA Cuc Software International, Communication Commerce électronique,février 2000, p. 14, n° 2 in fine). Sans qu'une qualification par genre constitue une panacée,elle présente tout de même l'avantage de poser deux questions essentielles : y a-t-il une uvreet, si oui, est-elle originale ? Or, le fait de se placer sur le terrain de l'uvre de collaborationou de l'uvre collective, s'il permet d'aménager les modalités de titularité, ne dispense paspour autant de se poser ces questions.16. Art. 7 NCPC.
(18) Il demeure qu'il s'agit d'un point délicat, car si on exigeait systématiquement la démonstrationde l'originalité, le contentieux deviendrait très difficile Aussi, quand il n'y a pas d'ambiguïté sur le fait que la condition soit possible, elle est souventprésumée par les juges. Sur la question, v. A. Kessler Michel, Présomptions et droit d'auteur,Thèse Paris XI, 2001, spéc. p. 91, n° 115 s.
(19) Illustration supplémentaire de la contamination du droit commun de la propriété littéraireet artistique par les règles spéciales propres au logiciel. Sur la question, F. Sardain, « Du droitdu multimédia au droit de l'unimédium », in Les créations multimédias, Droit des technologiesavancées, Hermès, volume 8, n° 2/2001, p. 93 s.
(20) Art. L. 111-2 CPI : « L'uvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgationpublique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l'auteur ».
(22) Ainsi que nous invite à le formuler une « détestable langue de bois ô combien réductrice» (A.Lucas « Droit d'auteur : du droit de reproduction au droit d'accès aux uvres? », in Le droit d'auteur:un contrôle de l'accès aux uvres?,Cahiers du CRID, n° 18, Bruxelles, Bruylant, 2000, p. 4).
(23) A. et F. Le Diberder, L'univers des jeux vidéo, La Découverte, 1998, p. 111.
(24) CA Paris, 4e ch., 28 avr. 2000, Havas Interactive c/ Casaril, préc. note 2; CA Versailles, 13e ch.,18 nov. 1999, M. Vincent c/ SA Cuc Software International, préc. note 2; TGI Paris, 8 sept. 1998,Casaril c/ Arborescence, RIDA1999, n° 181, p. 318 et p. 271, obs. A. Kéréver; TGI Nanterre, 26 nov.1997, Cuc Software International, Expertises 1999, n° 225, p. 117, note A. Aslanian. En doctrine, ledébat concernant la qualification des uvres multimédias en uvre audiovisuelle reste partagé.Favorable à une telle qualification, M.-H. Tonnellier, « La protection du multimédia par le régime del'uvre audiovisuelle », Légicom1995, n° 8, p. 33; A. Latreille, « La création multimédia commeuvre audiovisuelle », JCP1998, éd. G, I, 156, p. 1419. Beaucoup plus critique, D. Bougerol, « Dela qualification juridique à la régulation économique du multimédia: le précédent audiovisuel », in Lescréations multimédias, Droit des technologies avancées, Hermès, volume 8, 2/2001, p. 127.
(25) Laquelle suppose notamment que l'entrepreneur, personne physique ou morale, joue unrôle moteur.
(26) V. supra, n° 7.
(27) On observera au surplus que si l'on s'était trouvé dans l'hypothèse d'une qualificationlogicielle, la rémunération aurait pu être forfaitaire. D'où l'intérêt de ne pas négliger une qualificationen terme de genre d'uvre (v. supra, note 15) 27. Desbois, Le droit d'auteur en France, Dalloz, 3e éd., 1978, n° 562.
(29) Cass. 1re civ., 9 octobre 1984, Bull. civ.I, n° 252 ; Cass. 1re civ., 26 janvier 1994, Bull. civ.I, n° 34; Cass. 1re civ., 9 janvier 1996, RIDA1996, n° 169, p. 331; Cass. 1re civ., 16 juillet 1998,Bull. civ.I, n° 231 ; JCPE 2000, p. 77, obs. M.-E. Laporte-Legeais.
(30) Desbois, op. cit.; A. Françon, RID com. 1993, p. 95.
(31) A. et H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, Litec, 2e éd., 2001, n° 592 ;P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, PUF, 2001, 4e éd., n° 266.
(32) D'autant qu'en matière de multimédia, le prix imposé que connaît l'édition littéraire ne s'appliquepas. Comp. P.-Y. Gautier, op. cit., n° 267, p. 465, proposant que l'assiette soit constituéepar le prix public conseillé par l'éditeur. Allant en ce sens, comp. encore l'ordonnancede référé rendue par le TGI de Paris le 24 juin 1997, qui retient le « prix public à l'attention desdétaillants ou à défaut le prix de détail recommandé» (cité par F. Asseraf-Olivier et E. Barbry,Le droit du multimédia, PUF, 3e éd., 2001, p. 45, note 5).
(33) Pour un développement de ces arguments, A. et H.-J. Lucas, op. cit., n° 592
(34) En ce sens en matière d'uvres multimédias, v. déjà TGI Paris, 8 sept. 1998, Casaril c/Arborescence, RIDA 1999, n° 181, p. 318 et p. 271, obs. A. Kéréver.
(35) V. déjà CA Paris, 1re ch., 3 mars 1971, Robert Dhéry c/ Sté Le Film d'Art et Sté PanoramaFilms : RIDA 1972, 72, p. 155.
(36) Art. 1 134 C. civ.
(37) Art. L. 131-5 CPI : « En cas de cession du droit d'exploitation, lorsque l'auteur aura subiun préjudice de plus des 7/12e, dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits del'uvre, il pourra provoquer la révision des conditions de prix du contrat. Cette demande nepourra être formée que dans le cas où l'uvre aura été cédée moyennant une rémunérationforfaitaire. La lésion sera appréciée en considération de l'ensemble de l'exploitation par le cessionnairedes uvres de l'auteur qui se prétend lésé.» 37. V. par exemple TGI Seine, 3e ch., 16 mai 1969, RIDA1970, n° 63, p. 213, note A. Schmidt.
(39) Desbois, op. cit., n° 561.
(40) Et quasi exclusivement en matière de jeux vidéo.
(41) C'est pourquoi elle est dite « non remboursable».
(42) Il existe également des avances que la pratique contractuelle américaine qualifie de refundable,c'est-à-dire que si le montant des ventes ne parvient pas à recouper le montant del'avance, l'auteur doit rembourser la différence.
(43) À s'en tenir à une grille de lecture de rémunération proportionnelle, il correspondait eneffet à un taux d'environ 0,1 %.
(44) Comme y incite fortement le terme de « somme globale» employé dans le contrat. Il s'agitdonc d'une somme globale, allouée indépendamment du prix effectivement payé par le public(vu qu'elle est non remboursable ).
(45) Puisqu'il convenait de comparer le forfait à la somme qui aurait pu être obtenue avec unerémunération proportionnelle à un taux normal. En ce sens, CA Versailles, 1re ch., 23 mai 1996,RIDA 1996, n° 170, p. 290.
(46) D'autant qu'ils n'ont pas accepté de rehausser à 5 % le taux de la rémunération proportionnelle
(47) P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, PUF, 4e éd, 2001, n° 268.
(48) CA Paris, 13 oct. 1995, D.1996, somm. 76, obs. Th. Hassler ; CA Paris 18 janv. 2000,D.2000, AJ, p. 203.
(49) Civ. 1re, 9 janv. 1996, Masson, D. aff. 1996, p. 185. En ce sens, P.-Y. Gautier, op. cit.,n° 273 : « La solution la plus conforme au droit d'auteur et des obligations, devrait passer parune injonction adressée par le juge aux parties, afin qu'elles renégocient le prix de bonne foi».Comp. toutefois cass. 1re civ., 16 juillet 1998, Bull. civ. I, n° 231 ; JCP E 2000, p. 77, obs.M.-E. Laporte-Legeais, approuvant l'arrêt ayant « fixé le montant de la rémunération sur le fondementdes données recueillies par expertise».
(50) En matière de cassettes vidéo, cass. 1re civ., 16 juillet 1998, préc. (approuvant la substitutiond'un taux de 0,3 % des recettes nettes par un taux de 3 % sur le prix public TTC). Enmatière d'uvres multimédias, comp. encore TGI Paris, 3e ch., 8 sept. 1998, Casaril c/Arborescence, RIDA 1999, n° 181, p. 318 (mesure d'expertise pour indemniser l'auteur).
(51) V. notamment en ce sens S. Jacquier, Le pouvoir du juge sur les contrats d'auteur, Thèse,Paris II, 2001, n° 702 s.