Autrefois sanctionnée sous l’appellation de publicité trompeuse, la loi du 3 janvier 2008 transposant la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales est venue enrichir et développer cette notion sous la nouvelle dénomination de pratiques commerciales trompeuses. L’objectif était d’assurer un cadre législatif harmonisé au sein de l'Union européenne, protéger les consommateurs et garantir une concurrence loyale entre les entreprises. Malgré tout, ce type de comportements, de la grande distribution aux producteurs de compléments alimentaires, continue de donner lieu à un contentieux abondant qui mérite de faire un point sur la question.
On peut affirmer, sans risque de contradiction sérieuse, que depuis l'apparition de la réclame, un certain nombre d'entreprises ont eu le souci non seulement de valoriser leurs produits, ce qui est le fondement manifeste de cette activité, mais de le faire d'une manière excessive, ce qui devait naturellement entraîner une réaction du législateur dans le but louable de protéger à la fois les consommateurs et les concurrents soucieux de respecter les règles. Les plus anciens lecteurs se ...
Eric ANDRIEU
Avocat au Barreau de Paris
Clémence BARRANDON
Élève avocate stagiaire
7 mars 2025 - Légipresse N°433
5304 mots
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(1) Par communiqué de presse du 19 déc. 2024, la DGCCRF a fait savoir qu'à la suite d'une transaction, deux avocats au Barreau de Paris ont été sanctionnés pour pratiques commerciales trompeuses après s'être engagés afin d'obtenir la signature de conventions d'honoraires « sans émettre de réserves sur leur garantie de succès à obtenir du tribunal correctionnel la condamnation des prévenus à un paiement de dommages et intérêts » et « à obtenir un dédommagement élevé (et manifestement disproportionné) de la Commission d'indemnisation des victimes (CIVI) alors même que la majorité des plaignants ne remplissaient pas les conditions permettant d'ouvrir droit à une indemnisation ».
(2) Dir. 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la dir. 84/450/CEE du Conseil et les dir. 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil, et le règl. (CE) n° 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales »).
(3) C. consom., art. L. 121-1 : « Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. / Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service. / Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe. / Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 à L. 121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 121-6 et L. 121-7. »
(4) C. consom., art. L. 121-4 : « Sont réputées trompeuses, au sens des articles L. 121-2 et L. 121-3, les pratiques commerciales qui ont pour objet : / 1° Pour un professionnel, de se prétendre signataire d'un code de conduite alors qu'il ne l'est pas ; / 2° D'afficher un certificat, un label de qualité ou un équivalent sans avoir obtenu l'autorisation nécessaire ; / 3° D'affirmer qu'un code de conduite a reçu l'approbation d'un organisme public ou privé alors que ce n'est pas le cas ; / 4° D’affirmer qu’un professionnel, y compris à travers ses pratiques commerciales, ou qu'un produit ou service a été agréé, approuvé ou autorisé par un organisme public ou privé alors que ce n'est pas le cas, ou de ne pas respecter les conditions de l'agrément, de l'approbation ou de l'autorisation reçue ; / 5° De proposer l'achat de produits ou la fourniture de services à un prix indiqué sans révéler les raisons plausibles que pourrait avoir le professionnel de penser qu'il ne pourra fournir lui-même ou faire fournir par un autre professionnel, les produits ou services en question ou des produits ou services équivalents au prix indiqué, pendant une période et dans des quantités qui soient raisonnables compte tenu du produit ou du service, de l'ampleur de la publicité faite pour le produit ou le service et du prix proposé ; / 6° De proposer l'achat de produits ou la fourniture de services à un prix indiqué, et ensuite : / a) De refuser de présenter aux consommateurs l'article ayant fait l'objet de la publicité ; / b) Ou de refuser de prendre des commandes concernant ces produits ou ces services ou de les livrer ou de les fournir dans un délai raisonnable ; / c) Ou d'en présenter un échantillon défectueux, dans le but de faire la promotion d'un produit ou d'un service différent ; / 7° De déclarer faussement qu'un produit ou un service ne sera disponible que pendant une période très limitée ou qu'il ne sera disponible que sous des conditions particulières pendant une période très limitée afin d'obtenir une décision immédiate et priver les consommateurs d'une possibilité ou d'un délai suffisant pour opérer un choix en connaissance de cause ; / 8° De s'engager à fournir un service après-vente aux consommateurs avec lesquels le professionnel a communiqué avant la transaction dans une langue qui n'est pas une langue officielle de l'État membre de l'Union européenne dans lequel il est établi et, ensuite, assurer ce service uniquement dans une autre langue sans clairement en informer le consommateur avant que celui-ci ne s'engage dans la transaction ; / 9° De déclarer ou de donner l'impression que la vente d'un produit ou la fourniture d'un service est licite alors qu'elle ne l'est pas ; / 10° De présenter les droits conférés au consommateur par la loi comme constituant une caractéristique propre à la proposition faite par le professionnel ; / 11° D'utiliser un contenu rédactionnel dans les médias pour faire la promotion d'un produit ou d'un service alors que le professionnel a financé celle-ci lui-même, sans l'indiquer clairement dans le contenu ou à l'aide d'images ou de sons clairement identifiables par le consommateur ; / 12° De formuler des affirmations matériellement inexactes en ce qui concerne la nature et l'ampleur des risques auxquels s'expose le consommateur sur le plan de sa sécurité personnelle ou de celle de sa famille s'il n'achète pas le produit ou le service ; / 13° De promouvoir un produit ou un service similaire à celui d'un autre fournisseur clairement identifié, de manière à inciter délibérément le consommateur à penser que le produit ou le service provient de ce fournisseur alors que tel n'est pas le cas ; / 14° De déclarer que le professionnel est sur le point de cesser ses activités ou de les établir ailleurs alors que tel n'est pas le cas ; / 15° D'affirmer d'un produit ou d'un service qu'il augmente les chances de gagner aux jeux d'argent et de hasard ; / 16° D'affirmer faussement qu'un produit ou une prestation de services est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations ; / 17° De communiquer des informations matériellement inexactes sur les conditions de marché ou sur les possibilités de trouver un produit ou un service, dans le but d'inciter le consommateur à acquérir celui-ci à des conditions moins favorables que les conditions normales de marché ; / 18° D'affirmer, dans le cadre d'une pratique commerciale, qu'un concours est organisé ou qu'un prix peut être gagné sans attribuer les prix décrits ou un équivalent raisonnable ; / 19° De décrire un produit ou un service comme étant “gratuit”, “à titre gracieux”, “sans frais” ou autres termes similaires si le consommateur doit payer quoi que ce soit d'autre que les coûts inévitables liés à la réponse à la pratique commerciale et au fait de prendre possession ou livraison de l'article ; / 20° D'inclure dans un support publicitaire une facture ou un document similaire demandant paiement qui donne au consommateur l'impression qu'il a déjà commandé le produit ou le service commercialisé alors que tel n'est pas le cas ; / 21° De faussement affirmer ou donner l’impression que le professionnel n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ou de se présenter faussement comme un consommateur ; / 22° De créer faussement l'impression que le service après-vente en rapport avec un produit ou un service est disponible dans un État membre de l'Union européenne autre que celui dans lequel le produit ou le service est vendu ; / 23° Dans une publicité, de donner l'impression, par des opérations de promotion coordonnées à l'échelle nationale, que le consommateur bénéficie d'une réduction de prix comparable à celle des soldes, tels que définis à l'article L. 310-3 du code de commerce, en dehors de leur période légale mentionnée au même article L. 310-3 ; / 24° De faire figurer un drapeau français, une carte de France ou tout symbole représentatif de la France sur les emballages alimentaires lorsque les ingrédients primaires définis par le règlement (UE) n° 169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) n° 1924/2006 et (CE) n° 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) n° 608/2004 de la Commission ne sont pas d'origine française. Par dérogation au 24° du présent article, sont exclus du dispositif les ingrédients primaires dont l'origine française est difficile, voire impossible à garantir, car issus de filières non productrices en France ou dont la production est manifestement insuffisante sur le territoire ; / 25° De fournir des résultats de recherche en réponse à une requête réalisée en ligne par un consommateur sans l'informer clairement de tout paiement effectué spécifiquement par un tiers pour obtenir un meilleur classement de l'un ou de plusieurs des produits apparaissant dans les résultats de recherche ou pour qu'un ou plusieurs produits y apparaissent ; / 26° De revendre des billets pour des manifestations à des consommateurs lorsque le professionnel les a acquis en utilisant un moyen automatisé lui permettant de contourner toute limite imposée au nombre de billets qu'une personne peut acheter ou toute interdiction applicable à l'achat de billets ; / 27° D'affirmer que des avis sur un produit sont diffusés par des consommateurs qui ont effectivement utilisé ou acheté le produit sans avoir pris les mesures nécessaires pour le vérifier ; / 28° De diffuser ou faire diffuser par une autre personne morale ou physique des faux avis ou de fausses recommandations de consommateurs ou modifier des avis de consommateurs ou des recommandations afin de promouvoir des produits. »
(5) Dir. 2005/29/CE, art. 2, k.
(6) Com. 29 nov. 2011, n° 09-13.223.
(7) CJUE, 1re ch., 19 sept. 2013, aff. C-435/11, CHS Tour Service Gmbh c/ Team4 Travel Gmbh, D. 2013. 2835, note K. Jakouloff ; ibid. 2812, obs. Centre de droit de la concurrence Yves Serra ; ibid. 2014. 1297, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ; JT 2013, n° 157, p. 15, obs. X. Delpech ; RTD eur. 2014. 730, obs. C. Aubert de Vincelles ; Rev. UE 2015. 468, étude J. Lete.
(8) « Une pratique commerciale est réputée trompeuse si elle contient des informations fausses, et qu'elle est donc mensongère ou que, d'une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, elle induit ou est susceptible d'induire en erreur le consommateur moyen, même si les informations présentées sont factuellement correctes, en ce qui concerne un ou plusieurs des aspects ci-après et que, dans un cas comme dans l'autre, elle l'amène ou est susceptible de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement : / a) l'existence ou la nature du produit […] ».
(9) Com. 16 mars 2022, n° 19-18.499, RTD com. 2022. 629, obs. D. Legeais.
(11) Com. 22 mars 2023, n° 21-22.925, Légipresse 2023. 206 et les obs. ; ibid. 348, étude F. Honorat ; D. 2023. 598.
(12) « Est interdite la publicité concernant, d'une part, les produits dont la publicité télévisée fait l'objet d'une interdiction législative et, d'autre part, les produits et secteurs économiques suivants :- boisson comprenant plus de 1,2 degré d'alcool ;- édition littéraire sauf sur les services de télévision exclusivement distribués par les réseaux n'utilisant pas des fréquences assignées par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ;- distribution pour les opérations commerciales de promotion se déroulant entièrement ou principalement sur le territoire national, sauf dans les départements d'outre-mer et les territoires de la Polynésie française, des îles Wallis et Futuna, dans la collectivité départementale de Mayotte et en Nouvelle-Calédonie.Au sens du présent décret, on entend par opération commerciale de promotion toute offre de produits ou de prestations de services faite aux consommateurs ou toute organisation d'événement qui présente un caractère occasionnel ou saisonnier, résultant notamment de la durée de l'offre, des prix et des conditions de vente annoncés, de l'importance du stock mis en vente, de la nature, de l'origine ou des qualités particulières des produits ou services ou des produits ou prestations accessoires offerts. »
(13) On sait que la justice n'est pas toujours très rapide.
(17) T. com. Paris, ord. réf., 24 janv. 2024, n° 2023069037 (décision non définitive).
(18) Versailles, 12e ch., 20 janv. 2022, n° 20/02333.
(19) Crim. 28 janv. 2020, n° 19-80.496, Légipresse 2020. 151 et les obs. ; ibid. 242, étude E. Andrieu ; ibid. 2021. 291, étude N. Mallet-Poujol ; D. 2020. 278 ; ibid. 2021. 594, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ; AJ pénal 2020. 250, obs. J. Lasserre Capdeville.