Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Cependant, dès lors que l'éditeur est tenu, selon l'article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle, d'assurer à l'œuvre une exploitation permanente et suivie ainsi qu'une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession et, selon l'article L. 132-13, de rendre compte au moins une fois par an, des manquements prolongés de l'éditeur à ses obligations au cours des cinq années précédant l'assignation peuvent justifier une résolution de contrat conclu avec l'auteur.
Selon la Haute juridiction, la cour d'appel aurait dû, en l'espèce, rechercher si les manquements imputés par un auteur à une société de production audiovisuelle ne s'étaient pas poursuivis pendant la période « non prescrite », c'est-à-dire au cours des cinq ans ayant précédé l'assignation.
Tandis que les droits de propriété industrielle sont soumis à des règles de prescription spéciales(1), le droit d'auteur, comme d'ailleurs les droits voisins, reste régi par celles du droit commun, édictées par le code civil et, en particulier, son article 2224(2). De façon assez surprenante, les décisions rendues en la matière depuis la réforme de la prescription par la loi du 17 juin 2008 sont rares(3) et, à notre connaissance, aucune ne concernait l'action en responsabilité ...
Cour de cassation, (1re ch. civ. ), 5 juin 2024, n° 22-24.462
Vincent Varet
Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris Varet Près société d'avocats
26 septembre 2024 - Légipresse N°428
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(1) Celles issues de la loi PACTE n° 2019-486 du 22 mai 2019 ; v. not., les art. L. 521-3 pour les actions en contrefaçon de dessin et modèle, L. 615-8 pour les actions en contrefaçon de brevet et L. 716-4-2 en matière de marque, auxquels s'ajoutent les textes concernant les actions en annulation de ces titres. Sur l'ensemble de ces règles spéciales, v. J. Passa, Réforme en profondeur de la prescription des actions en annulation et en contrefaçon des titres nationaux de propriété industrielle, Propr. ind. 2019. Chron. 16.
(2) Cette différence de traitement, qui concerne essentiellement le point de départ du délai de prescription s'agissant de l'action en contrefaçon, peut paraître discutable, au moins pour cette dernière, car on ne voit pas en quoi la nature des divers droits en présence la justifie ; ce n'est néanmoins pas ici le lieu de développer ce débat.
(3) Quelques-unes d'entre elles seront évoquées plus loin dans ce commentaire.
(4) Ces aspects du litige, qui faisaient également l'objet de moyens de cassation, ne seront pas commentés.
(6) Cette solution, qui est issue de l'anc. art. 2277 c. civ. a été maintenue par la jurisprudence postérieure sur le fondement de l'art. 2233 issu de la réforme de 2008, v. Cass., ass. plén., 7 juill. 1978, n° 76-15.485 ; Civ. 1re, 21 févr. 2006, n° 04-20.607 ; Civ. 1re, 16 mai 2006, n° 05-17.144 ; Soc. 26 oct. 2011, n° 10-14.175, RTD com. 2012. 76, obs. B. Saintourens ; Civ. 1re, 9 févr. 2012, n° 09-69.594 ; Soc. 9 oct. 2013, n° 12-21.252. Pour son application aux redevances d'exploitation de droit d'auteur antérieurement à la réforme, v. Paris, 23 sept. 1993, n° 91/15720 ; Civ. 1re, 13 févr. 2007, n° 05-12.016, D. 2008. 2820, obs. P. Delebecque, J.-D. Bretzner et T. Vasseur ; RTD com. 2007. 540, obs. F. Pollaud-Dulian ; ibid. 543, obs. F. Pollaud-Dulian.
(7) Code des usages et des bonnes pratiques de l'édition des œuvres musicales signé le 4 oct. 2017 par les organisations représentatives des auteurs et les représentants des éditeurs dits de variété ou pop, de musique classique et contemporaine ainsi que de musique de librairie.
(8) Civ. 1re, 15 nov. 2023, n° 22-23.266, Légipresse 2023. 597 et les obs. ; D. 2024. 156, note J. Douillard ; ibid. 392, obs. A. Bensamoun, S. Dormont, J. Groffe-Charrier, J. Lapousterle, P. Léger et P. Sirinelli ; Dalloz IP/IT 2023. 612, obs. C. Lamy ; CCE 2024. Comm. 3, obs. P. Kamina.
(9) Selon une terminologie empruntée à J. Passa, RTD com. 2020. 845, obs. ss Com. 26 févr. 2020, n° 18-19.153 (concurrence déloyale), Légipresse 2020. 151 et les obs. ; D. 2020. 2421, obs. C. de droit de la concurrence Yves Serra (CDED Y. S.EA n° 4216) ; ibid. 2021. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki ; JA 2020, n° 621, p. 14, obs. S. Damarey ; RTD civ. 2020. 627, obs. H. Barbier.
(10) Civ. 1re, 6 avr. 2022, n° 20-19.034, Légipresse 2022. 217 et les obs. ; ibid. 707, étude C. Alleaume ; D. 2022. 1433, obs. J.-C. Galloux et P. Kamina ; Dalloz IP/IT 2022. 292, obs. E. Rançon ; RTD com. 2022. 273, obs. F. Pollaud-Dulian.
(11) Paris, 12 févr. 2019, n° 16/13004.
(12) Paris, 17 mai 2023, n° 21/15795.
(13) Pourvoi no T 23-18.669.
(14) En ce sens, J. Douillard, Prescription de l'action en contrefaçon en droit d'auteur : les difficultés de l'application du droit commun, D. 2024. 156.
(15) Civ. 1re, 5 oct. 2022, n° 21-15.386, Légipresse 2022. 599 et les obs. ; ibid. 625, étude C. Le Goffic ; ibid. 707, étude C. Alleaume ; D. 2023. 55, note P. Léger ; ibid. 2022. 2255, obs. Centre de droit économique et du développement Yves Serra (EA n° 4216) ; ibid. 2023. 357, obs. A. Bensamoun, S. Dormont, J. Groffe-Charrier, J. Lapousterle, P. Léger et P. Sirinelli ; ibid. 2150, obs. A. Mendoza-Caminade, C. Le Stanc et P. Tréfigny ; Dalloz IP/IT 2023. 43, obs. M. Vivant ; RTD com. 2023. 118, obs. F. Pollaud-Dulian.
(16) Cons. const. 27 juill. 2006, n° 2006-540 DC, D. 2006. 2157, chron. C. Castets-Renard ; ibid. 2878, chron. X. Magnon ; ibid. 2007. 1166, obs. V. Bernaud, L. Gay et C. Severino ; RTD civ. 2006. 791, obs. T. Revet ; ibid. 2007. 80, obs. R. Encinas de Munagorri.