La loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 affiche, par son intitulé, l'objectif d'« encadrer l'influence commerciale et [de] lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux ». Ce faisant, elle définit l'activité d'influence commerciale par voie électronique, ainsi que les obligations afférentes à son exercice.
Champs d'application, obligations d'information, secteurs réglementés ou interdits, influence commerciale des mineurs et articulation avec la loi Studer, influenceurs basés à l'étranger, agents d'influenceurs… Tour d'horizon de la loi qui a aussi pour ambition de faire de l'influenceur un vrai métier.
(1) Selon l'art. 18 de la loi, certaines dispositions voient leur entrée en vigueur fixée à la date de réception par le gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l'Union européenne (il s'agit des art. 10 à 12 et 15), d'autres dispositions, qui seront citées dans l'article, vont nécessiter un décret d'application ou seront calées sur la date d'entrée en vigueur du DSA.
(2) La loi n° 90-603 du 12 juill. 1990 relative aux agences de mannequins et à la protection des enfants et des adultes exerçant l'activité de mannequin était également née d'un scandale, celui des « mini-miss France ».
(3) L. Tanneau, Influenceur : un vrai métier ?, Liaisons soc. 2022, n° 236, nov. 2022.
(4) Communication de la Commission – Orientations concernant l'interprétation et l'application de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, § 4.2.6, « Marketing d'influence », JOUE 29 déc. 2021.
(6) V. l'analyse faite par les juges de l'activité d'influence de Cyprien pour qualifier le message d'acte de commerce : « L'activité d'influenceur décrite de M. C., de son propre aveu et ainsi que cela résulte des productions des parties, ne se limite pas à émettre des messages ou à commenter des images ou des vidéos qu'il relaie sur internet et les réseaux sociaux, mais est le résultat d'une intégration de la conception et la réalisation de vidéos associant des contenus ludiques et informatifs suivant une ligne éditoriale en direction d'un certain public jeune uni par une communauté de goûts, et la promotion publicitaire de produits réalisés personnellement, en collaboration, ou pour d'autres fournisseurs de biens ou de services. Il en résulte que la production à titre habituel de messages, mélioratifs ou satiriques, est indissociable de l'industrie des services pour les mettre en œuvre ainsi que des placements de produits en contrepartie des droits que cette chaîne de transformation de services procure, en sorte que le message imputé à M. C revêt la nature d'un acte de commerce. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a décliné sa compétence », Paris, pôle 5 – 11e ch., 24 sept. 2021, n° 19/17218, Légipresse 2021. 519 et les obs. ; ibid. 2022. 253, obs. N. Mallet-Poujol.
(7) Pour les formalités de déclaration, v. Ministère de l'Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Guide de bonne conduite : influenceurs et créateurs de contenu, juill. 2023, p. 5.
(8) J.-Cl. Comm., v° L'influenceur, par L. Carrié, fasc. 322, mise à jour 30 avr. 2022, n° 4.
(9) Communication de la Commission, préc.
(10) J.-Cl. Comm., v° Contrats d'image de personnes, par L. Carrié, fasc. 320, mise à jour 30 avr. 2022, n° 38 et s.
(11) C. Deschanel, Le Droit patrimonial à l'image : émergence d'un nouveau droit voisin du droit d'auteur, thèse, Université d'Avignon, 2017, nos 82 et s.
(12) G. Loiseau, Régulation. Une loi sur les influenceurs, CCE 2023. Comm. 60.
(13) Communication de la Commission, préc.
(14) A. Szkopinski, Adoption de la proposition de loi encadrant l'influence commerciale, la fin des dérives ?, Dalloz actualité, 8 juin 2023.
(15) G. Loiseau, préc.
(16) Ministère de l'Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Guide de bonne conduite, préc., p. 12.
(17) Communication de la Commission, préc.
(18) CJUE 2 sept. 2021, aff. C-371/20, Peek & Cloppenburg, pts 41, 46 et 47, D. 2021. 1628 ; ibid. 2022. 574, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud.
(19) Ministère de l'Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Guide de bonne conduite, préc., p. 5.
(20) J. Peigné, Encadrement de l'activité d'influenceur dans le domaine de la santé, Dalloz actualité, 19 juin 2023.
(21) Exemple de définition de l'art. 2 du décr. n° 92-280 du 27 mars 1992 pris pour l'application des art. 27 et 33 de la loi n° 86-1067 du 30 sept. 1986 et fixant les principes généraux définissant les obligations des éditeurs de services en matière de publicité, de parrainage et de télé-achat.
(22) M. Malaurie-Vignal, Que prévoit le texte contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux ?, blog.leclubdesjuristes.com, 4 avr. 2023.
(23) JO n° 0287 du 10 déc. 2016.
(24) JO Sénat CR, 21 juin 1990, p. 1963 ; L. Carrié, Contrats d'image de personnes, préc., n° 76.
(25) B. Studer, Rapport de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur la proposition de loi de MM. Bruno Studer, Gilles Le Gendre et plusieurs de leurs collègues visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne, rapp. Ass. nat. n° 3380, 5 févr. 2020.
(26) L. Carrié, Enfant influenceur : le contrôle parental sous contrôle de l'administration, du juge, des plateformes de partage de vidéos, du CSA… et de l'enfant, Légipresse 388. 691.
(27) Ont été ainsi modifiés l'art. L. 7124-1 c. trav. (enfant soumis au régime d'autorisation individuelle préalable), les art. 3, I (enfant soumis au régime de déclaration), 3, II (obligation des annonceurs qui effectuent un placement de produit dans un programme audiovisuel avec un enfant de moins de seize ans) et 4 (services visés par l'obligation de mettre en place des chartes) de la loi n° 2020-1266 du 19 oct. 2020 visant à encadrer l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne. Mentionnons qu'est également modifié l'art. 15-1 de la loi n° 86-1067 du 30 sept. 1986 relative à la liberté de communication, qui avait été introduit par l'art. 5 de la loi Studer et est relatif aux obligations de promotion par l'ARCOM des chartes auprès des services de partage de vidéos ; désormais cette obligation concerne toutes les plateformes en ligne.
(28) Ministère de l'Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Guide de bonne conduite, préc. : « Je suis mineur, puis-je devenir influenceur ? Parce que de plus en plus de mineurs sont mis en scène par des influenceurs, dans le cadre de la loi, les moins de 16 ans qui apparaissent à l'écran bénéficieront des dispositions protectrices du droit du travail régissant le travail des mineurs (comme par exemple les enfants mannequins). En substance : [si] j'ai moins de 16 ans, je peux être employé par une entreprise exerçant l'activité d'influence commerciale. Il est nécessaire d'obtenir un agrément préalable auprès des services de l'État et 90 % des sommes que j'ai perçues via l'influence commerciale seront consignées jusqu'à ma majorité […] »
(29) Sous-amendement n° CE179 : « Les enfants de moins de seize ans exerçant l'activité d'influenceur, tel que définie au deuxième alinéa du présent article, sont soumis à la loi n° 2020-1266 du 19 octobre 2020 visant à encadrer l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne. »
(30) G. Genton et T. Gitton, Influenceurs : une vie de rêve à Dubaï, webdocumentaire, 2021
(31) Ex. de l'art. 13 du règl. (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 oct. 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la dir. 2000/31/CE (règl. sur les services numériques).
(32) Pour un avis contraire, v. M. Malaurie-Vignal, préc.
(33) A. Gacquerre, Proposition de loi visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, rapp. Sénat n° 562 (2022-2023), déposé le 3 mai 2023, p. 66.