La cour de renvoi déclare illicites, au regard de l'article L. 3323-4 du code de la santé publique, les films publicitaires La Légende du Phœnix et Les Territoires d'une légende en faveur de la bière Grimbergen. Pour la cour, ce texte doit être compris comme définissant de manière stricte et limitée le champ de la publicité en faveur des boissons alcooliques aux seules indications et références qui y sont spécifiées. La publicité ainsi autorisée doit présenter un caractère objectif et informatif qui ne concerne donc pas seulement les références relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit.
On connaît l'adage de Guillaume le Taciturne selon lequel « il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer ». Il s'applique parfaitement à la saga judiciaire de La Légende du Phœnix et de l'abbaye de Grimbergen, ayant débuté le 6 octobre 2015 par une assignation de l'Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (ANPAA).
Suivant l'analyse de la Cour de cassation, la Cour d’appel de Versailles, statuant sur renvoi, ...
Cour d'appel, Versailles, (1e ch., sect. A), 15 juin 2021
Frédéric Gras
Avocat au Barreau de Paris
17 octobre 2021 - Légipresse N°396
3479 mots
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(1) Paris, pôle 2 - ch. 2, 13 déc. 2018, no 17/03352, Légipresse 2019. 14 et les obs.
(2) « Elle brûle mais ne se consume pas », à l'image du buisson ardent.
(3) TGI Paris, 9 févr. 2017, no 15/14239.
(4) Civ. 1re, 20 mai 2020, no 19-12.278, Légipresse 2020. 344 et les obs. ; D. 2020. 1110.
(5) Crim. 15 mai 2012, no 11-83.686, ANPAA c/ Sté Ricard (affaire Jameson l'Irlandais) : l'article L. 3323-4 du code de la santé publique autorise un « fond attrayant » avec pour auteur le dessinateur de Blake & Mortimer, Légipresse 2012. 414 et les obs. ; ibid. 496, comm. E. Andrieu et F. Gras ; Civ. 1re, 1er juill. 2015, no 14-17.368, ANPAA c/ CIVB, D. 2015. 1492 ; Légipresse 2015. 462 et les obs. ; ibid. 495, comm. E. Andrieu ; « L'arrêt relève que les personnages figurant sur les affiches, expressément désignés comme des membres de la filière de production ou de commercialisation des vins de Bordeaux, ne sont pas assimilables au consommateur et se rattachent, comme ayant participé à cette production ou à cette commercialisation, au facteur humain visé par l'article L. 115-1 du code de la consommation, auquel fait référence l'article L. 3323-4 du code de la santé publique, que la seule représentation de personnages ayant un verre à demi plein à la main ne dépasse pas les limites fixées par le texte susvisé qui exige une représentation objective du produit, telle que sa couleur ou son mode de consommation, que l'impression de plaisir qui se dégage de l'ensemble des visuels ne dépasse pas ce qui est nécessaire à la promotion des produits et inhérent à la démarche publicitaire proprement dite, laquelle demeure licite, et que l'image donnée de professions investies par des jeunes, ouvertes aux femmes et en recherche de modernité, est enfin pleinement en accord avec les dispositions légales autorisant une référence aux facteurs humains liés à une appellation d'origine ; que la cour d'appel a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, qu'était remplie la prescription de l'article L. 3323-4 du code de la santé publique relative au caractère objectif et informatif de la publicité ».
(6) Pt 7 de l'arrêt.
(7) Cons. const. 8 janv. 1991, no 90-283 DC, § 29, AJDA 1991. 382, note P. Wachsmann ; Dr. soc. 1991. 332, étude D. Tabuteau ; RDSS 1991. 204, étude J.-S. Cayla.
(8) Ibid., pt 32.
(9) Civ. 1re, 1er juill. 2015, no 14-17.368, préc.
(10) V. supra.
(11) Pt 12 de l'arrêt.
(12) Pt 14 de l'arrêt.
(13) Pt 17 de l'arrêt.
(14) L'expression est de Georges Péninou et constitue le titre d'une intéressante étude sur l'« expression publicitaire des boissons alcoolisées sous l'égide de la loi Évin » (Le dit sous interdits. L’expression publicitaire des boissons alcoolisées sous l’égide de la Loi Évin, synthèse, Intelligences (Conseil en communication et développement), déc. 1991, 44 p.).
(15) Civ. 1re, 1er juill. 2015, no 14-17.368, préc.
(16) Seul l'avocat général diffère, dont les conclusions ont été retenues.
(17) Pt 16 de l'arrêt.
(18) Pt 17 de l'arrêt.
(19) Pour une solution prétorienne analogue, Civ. 1re, 20 oct. 2011, no 10-23.509, Légipresse 2011. 594 et les obs. ; ibid. 2012. 47, comm. F. Gras ; D. 2011. 2603.
(21) CEDH 8 juill. 1986, Lingens, no 9815/82, série A, no 103, § 41 ; CEDH 26 mars 1987, no 9248/81 Leander c/ Suède, série A, no 116 ; CEDH 7 juill. 1989, no 10454/83, Gaskin c/ Royaume-Uni, série A, no 160 ; CEDH 25 juin 1992, no 13778/88, Thorgeir Thorgeirson, série A, no 239, §§ 59 à 70, AJDA 1993. 105, chron. J.-F. Flauss ; RFDA 1993. 963, chron. V. Berger, C. Giakoumopoulos, H. Labayle et F. Sudre ; Cons. const. 11 oct. 1984, no 84-181 DC : « L'objectif à réaliser est que les lecteurs qui sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 de la Déclaration de 1789 soient à même d'exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions ni qu'on puisse en faire l'objet d'un marché ».
(22) V. note 5.
(23) V. le titre VIII et l'art. 64 de la Constitution.
(24) Art. 66 de la Constitution.
(25) La rédaction de ce texte est intervenue à l'initiative du Sénat, à la suite des ordonnances de référé de 2004 du TGI de Paris sanctionnant les campagnes publicitaires du Bureau interprofessionnel des vins de Bordeaux et celui des vins de Bourgogne (TGI Paris, réf., 6 janv. 2004, ANPA c/ BIVB, Légipresse 2004, no 209, I, p. 29 ; TGI Paris, réf., 18 mars 2004, ANPA c/ CIVB, no 3 ; amendement no 169, JO Sénat, 5 mai 2004 ; doc. no 1828, rapp. de la commission des affaires économiques, art. 4A, JOAN, 6 oct. 2004) au prétexte d'autoriser la promotion collective, c'est-à-dire la propagande, qui était pourtant déjà autorisée par la loi Évin.
(26) TGI Paris, 21 mars 2013, n° 11/03234, ANPAA c/ HFA et Moët Hennessy, Légipresse 2013. 463 et les obs. ; ibid. 554, Étude E. Andrieu et F. Gras.
(27) V. Légipresse 2019. 94 ; H. Le Diascorn, Publicité et alcool, discipline ou censure ?, Bourgogne Publications, 1993.
(28) Crim. 12 nov. 2008, no 07-83.398, D. 2009. 402, note J. Pradel ; ibid. 44, chron. P. Chaumont et E. Degorce ; ibid. 1779, obs. J.-Y. Dupeux et T. Massis ; AJ pénal 2009. 228, obs. C. Duparc ; RSC 2009. 129, obs. J. Francillon.