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Droit à l'oubli
/ Cours et tribunaux
24/01/2020
Les moteurs de recherche entre droit à l'information et droit à l'oubli : du temps réel de l'accès à l'information à un temps diversement suspendu
L'exploitant d'un moteur de recherche est responsable non pas du fait que des données sensibles (révélant les opinions politiques, les convictions religieuses, la santé ou la vie sexuelle d'un individu) figurent sur une page web, mais du référencement de cette page. C'est en raison de ce référencement, par l'intermédiaire d'une vérification à effectuer, et sous le contrôle des autorités nationales compétentes, sur la base d'une demande par une personne concernée, que les restrictions s'appliquent à l'exploitant d'un moteur de recherche.
Celui-ci peut refuser une demande de déréférencement, dès lors que les liens contestés mènent vers des pages sur lesquelles les données « sensibles » sont publiées, à des fins journalistiques. Lorsque l'exploitant est saisi d'une telle demande, il doit tenir compte de la nature de l'information, de sa sensibilité pour la vie de la personne concernée, et de l'intérêt du public à disposer d'une telle information.
Dans le cas où les pages web contiennent des données relatives à une procédure judiciaire menée contre une personne, en particulier lorsque les informations ne reflètent plus la situation actuelle de l'intéressé, l'exploitant du moteur de recherche doit prendre en considération l'ensemble des circonstances de l'affaire, le déroulement et l'issue de ladite procédure, le rôle joué par la personne dans la vie publique, et l'intérêt du public à avoir accès à l'information au moment de la demande. Enfin, il doit aménager la liste des résultats pour que celle-ci reflète la situation judiciaire actuelle.
Saisi de quatre recours pour excès de pouvoir contre des décisions de la CNIL clôturant des plaintes, et, par là même, refusant de mettre en demeure la société Google Inc. de procéder à des déréférencements, le Conseil d'État a sursis à statuer, en février 2017, dans l'attente de la réponse de la CJUE à ses questions préjudicielles(1). Il a principalement demandé si l'interdiction, faite aux responsables de traitement, de traiter des données relevant de l'article 8, § 1 ...
(1) CE, ass., 24 févr. 2017, n° 391000, Lebon ; AJDA 2017. 436 ; ibid. 740, chron. G. Odinet et S. Roussel ; D. 2017. 500, obs. M.-C. de Montecler ; ibid. 2018. 1033, obs. B. Fauvarque-Cosson et W. Maxwell ; Dalloz IP/IT 2017. 479, obs. O. Henrard ; RFDA 2017. 535, concl. A. Bretonneau ; RTD eur. 2017. 803, obs. A. Bouveresse.
(2) CJUE, gde ch., 24 sept. 2019, aff. C-136/17, GC c/ Commission nationale de l'informatique et des libertés, AJDA 2019. 1839 ; ibid. 2291, chron. P. Bonneville, C. Gänser et S. Markarian ; D. 2019. 2022, note J.-L. Sauron ; Dalloz IP/IT 2019. 631, obs. N. Martial-Braz ; Légipresse 2019. 515 et les obs., en présence de Premier ministre, Google LLC, venant aux droits de Google Inc.
(3) Défini par CJUE, 24 sept. 2019, préc., pt 60.
(4) CJUE 13 mai 2014, aff. C-131/12, Google Spain c/ Agencia Española de Protección de Datos, pts 35 à 41, AJDA 2014. 1147, chron. M. Aubert, E. Broussy et H. Cassagnabère ; D. 2014. 1476, note V.-L. Benabou et J. Rochfeld ; ibid. 1481, note N. Martial-Braz et J. Rochfeld ; ibid. 2317, obs. J. Larrieu, C. Le Stanc et P. Tréfigny ; AJCT 2014. 502, obs. O. Tambou ; Légipresse 2014. 330 et les obs. ; JAC 2014, n° 15, p. 6, obs. E. Scaramozzino ; Constitutions 2014. 218, chron. D. de Bellescize ; RTD eur. 2014. 283, édito. J.-P. Jacqué ; ibid. 879, étude B. Hardy ; ibid. 2016. 249, étude O. Tambou ; Rev. UE 2016. 597, étude R. Perray ; CCE juill.-août 2014, étude 13, obs. A. Debet ; JCP 2014, no 768, note L. Marino ; Légipresse 2014. 323, Tribune E. Drouard ; ibid. 467, note N. Mallet-Poujol ; RLDI 2014/106, no 3535, comm. C. Castets-Renard, no 3536, comm. D. Forest, no 3537, comm. A. Casanova ; RLDI 2014/107, no 3550, comm. O. Pignatari et no 3569, note J. Le Clainche ; RLDI 2014/109, no 3609, comm. R. Perray et P. Salen.
(5) Sur les traitements aux seules fins de journalisme, v. CJUE 14 févr. 2019, aff. C-345/17, D. 2019. 1673, obs. W. Maxwell et C. Zolynski ; Légipresse 2019. 261 et les obs. ; CCE avr. 2019. Comm. 27, obs. A. Debet.
(6) Sur d'autres motifs de déréférencement, v. not., le décr. no 2015-253 du 4 mars 2015 relatif au déréférencement des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique.
(7) Infra II. C.
(8) CEDH 28 juin 2018, n° 60798/10, D. 2019. 1673, obs. W. Maxwell et C. Zolynski ; AJ pénal 2018. 462, note L. François ; Dalloz IP/IT 2018. 704, obs. E. Derieux ; RSC 2018. 735, obs. J.-P. Marguénaud et n° 65599/10, aff. M.L. et W.W. c/ Allemagne, pts 89 et 100 à 102, AJ pénal 2018. 462, note L. François ; RSC 2018. 735, obs. J.-P. Marguénaud ; Légipresse 2018. 433, note R. Le Gunehec et J. Prévost.
(9) Sur ce critère, v. N. Mallet-Poujol, Information judiciaire et droit à l'oubli, Légicom 2012/1, no 48, p. 117 et s.
(10) CEDH 28 juin 2018, préc., pt 100.
(11) CEDH 28 juin 2018, préc., pt 97.
(12) CEDH 28 juin 2018, préc., pt 114.
(13) La CJUE applique la condition de motifs d'intérêt public important, de l'art. 8, § 4, aux traitements visés à l'art. 8, § 1, ce qui est logique, mais elle semble aussi l'appliquer (v. pt 75) à ceux visés à l'art. 8, § 5, ce qui est moins évident.
(14) Supra II. C
(15) N. Mallet-Poujol, Légipresse 2014. 467, op. cit.
(16) Au sens de l'art. 8, § 4, de la directive. Supra III. B.