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La loi "Fake news" publiée après sa validation par le Conseil constitutionnel
La loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information est parue au JO et va pouvoir, conformément à la volonté de l'exécutif, être mise en œuvre dans la perspective des prochaines élections européennes de mai prochain. D'ici là, deux décrets d'application devront être adoptés, comme le prévoit l'art. 1er du texte instaurant le mécanisme de référé pour faire cesser la diffusion de "fausses informations". Le premier concerne les juridictions compétentes (TGI et cour d'appel) pour connaître des actions fondées sur le texte. L'autre concerne les obligations (d'information notamment) imposées aux opérateurs de plateformes en ligne "dont l'activité dépasse un seuil déterminé de nombre de connexions sur le territoire français".
Le Conseil constitutionnel avait validé, quelques jours plus tôt, les lois ordinaire et organique, tout en formulant quelques réserves d’interprétation.
Tout d’abord, les Sages se sont prononcés sur la procédure de référé nouvellement instaurée (art. L. 163-2 du code électoral, issu de l’article 1er de la loi). Celle-ci permet d’obtenir, pendant les trois mois précédant une élection générale, la cessation de la diffusion de fausses informations sur les services de communication au public en ligne, lorsqu’elles sont de nature à altérer la sincérité du scrutin.
S’agissant du champ de la procédure critiquée, le Conseil constitutionnel relève que le législateur a strictement délimité les informations pouvant en faire l’objet. Il juge, d’une part, que cette procédure ne peut viser que des allégations ou imputations inexactes ou trompeuses d’un fait de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir. Ainsi, ces allégations ne recouvrent ni les opinions, ni les parodies, ni les inexactitudes partielles ou les simples exagérations. Elles sont celles dont il est possible de démontrer la fausseté de manière objective. D’autre part, seule la diffusion de telles allégations ou imputations répondant à trois conditions cumulatives peut être mise en cause : elle doit être artificielle ou automatisée, massive et délibérée.
Rappelant que la liberté d’expression revêt une importance particulière dans le débat politique et dans les campagnes électorales, le Conseil constitutionnel formule néanmoins des réserves d’interprétation, compte tenu des conséquences d’une procédure pouvant avoir pour effet de faire cesser la diffusion de certains contenus d’information. Ainsi, une une telle mesure de cessation de diffusion ordonnée en référé ne pourra être justifiée que si le caractère inexact ou trompeur des allégations ou imputations mises en cause est « manifeste ». Il en est de même pour le risque d’altération de la sincérité du scrutin, qui doit également être « manifeste ».
Sous ces réserve, la nouvelle procédure de référé instituée par la loi ne porte pas atteinte à la liberté d’expression et de communication un atteinte qui ne serait pas nécessaire, adaptée et proportionnée, juge le Conseil.
Par symétrie, les mêmes réserves sont formulées concernant l’article 6, qui attribue au CSA le pouvoir de suspendre la diffusion d’un service de radio ou de télévision contrôlée par un État étranger ou placée sous l’influence de cet État en cas de diffusion de fausses informations en période électorale : la notion de fausses informations s’entend dans la même acception que celle des allégations ou imputations inexactes visées à l’article 1erde la loi déférée : leur suspension ne sera proportionnée que si leur caractère inexact ou trompeur, ou si le risque d’altération de la sincérité du scrutin est « manifeste ». En outre, les Sages rappellent que les décisions du CSA peuvent être contestées devant le juge administratif. «Le droit à l'exercice d'un recours effectif n'est donc pas méconnu», estiment-ils.
Le Conseil constitutionnel a également jugé conformes à la Constitution les dispositions de l’article 11 de la loi déférée, qui mettent à la charge des opérateurs de plateforme en ligne des mesures en vue de lutter contre la diffusion de fausses informations susceptibles de troubler l’ordre public ou d’altérer la sincérité du scrutin. La loi prévoit notamment la mise en place d’un dispositif permettant à leurs usagers de signaler de telles informations et mettre en œuvre des mesures complémentaires pouvant notamment porter sur la transparence des algorithmes ou la lutte contre les comptes propageant massivement de fausses informations.
Enfin, les Sages ont écarté les critiques adressées par les députés et sénateurs requérants à l’article L. 163-1 du code électoral, nouvellement issu de l’article 1er de la loi déférée. Cet article impose aux opérateurs de plateforme en ligne, pendant les trois mois précédant une élection générale, des obligations de transparence relatives à la promotion de « contenus d’information se rattachant à un débat d’intérêt général ». Le Conseil constitutionnel a également écarté les critiques adressées aux dispositions sanctionnant la méconnaissance de ces obligations.