La fonctionnalité Google Suggest est le fruit d'un processus purement automatique dans son fonctionnement et aléatoire dans ses résultats, de sorte que l'affi chage des « mots c lés » qui en résulte est exclusif de toute volonté de l'exploitant du moteur de recherche d'émettre les propos en cause ou de leur conférer une signifi cation autonome au-delà de leur simple juxtaposition et de leur seule fonction d'aide à la recherche.
La décision commentée est remarquable, tant par la nouveauté de la solution retenue, que par le raisonnement adopté ; elle est sans doute porteuse d'autres jurisprudences à venir qui devront la confirmer. Au visa des articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881, la Cour de cassation vient par la solution retenue briser une jurisprudence particulièrement abondante des juridictions de premier et deuxième degré, appliquant les dispositions de ce texte pour apprécier la licéité du ...
Cour de cassation, 1re ch. civ., 19 juin 2013, Google Inc. et a. c/ Société Lyonnaise de garantie
François Klein
Avocat au Barreau de Paris Kga Avocats Matthieu Bourgeois Avocat au Barreau de ...
(2) Quelques exemples : Tgi Paris, 10 juillet 2009, RG n° 09/55969, Légipressen° 278, déc. 2010 p. 244 comm. J. Huet ; Cce janvier 2010, commentaire n° 4 ;Tgi Paris, 8 septembre 2010 M. X./ Google Inc ; Éric S. et Google France, Légipressen° 264, sept. 2010, p. 128 ; Tgi Paris, 15 février 2012 Légipresse n° 293, avril 2012p. 212 ; Cce 2012, comm. 50, obs. G. Loiseau et comm. 57, obs. A. Lepage.
(3) Civ. 1re 19 février 2013, pourvoi n° 12-12.798, Légipresse n° 305, mai 2013p. 307 comm. A. Fourlon ; Cce 2013, comm. 57, obs. A. Lepage.
(4) « ( ) Attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit que les critères de prudencedans l'expression et de sérieux de l'enquête se trouvaient réunis au regard d'unprocédé de recherche dont la fonctionnalité se bornait à renvoyer à des commentairesd'un dossier judiciaire publiquement débattu ».
(5) CA Paris, 14 décembre 2011, Google, Éric S. c/ Lyonnaise de garantie, Légipressen° 290, jan. 2012 p. 10 ; Cce avril 2012, comm. 42.
(6) Selon une jurisprudence constante, l'intention coupable est nécessaire,tant pour les injures publiques que pour les injures non publiques (Crim.19 novembre 1930 ; Gaz. Pal. 1931, 1, 40). Cette exigence est également valablepour le délit de diffamation (jurisprudence constante depuis Crim. 10 février1883, DP 1883, 1 364 ; réaffirmée notamment par Crim. 12 juin 1987, Bull. crim.n° 247).
(7) Cette position est exprimée par Google en particulier dans l'affaire ayantdonné lieu à l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal decommerce de Paris en date du 7 mai 2009, SA Direct Energie c/ Google Inc. ;Légipresse n° 264, sept. 2009 p. 129 ; Jcpe n° 40, 1er octobre 2009, 1919.
(8) T. Com Paris, ordonnance de référé du 7 mai 2009 précité.
(9) Comme dans l'arrêt d'appel censuré par la décision commentée, précité.
(10) Tgi Paris, 8 septembre 2010 précité.
(11) « Affaires Google Suggest : les risques d'une dérive du droit de la presse sousl'empire des nouvelles technologies », C. Bigot, Légipresse n° 281, mars 2011,chron. p. 150.
(12) C. Bigot, op. précité.
(13) Article 10 de la Convention européenne du 4 novembre 1950 : « Toute personnea droit à la liberté d'expression ». Article 11 de la Déclaration des droits del'Homme et du Citoyen du 26 août 1789 : « La libre communication des penséeset des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peutdonc parler, écrire, imprimer librement ».
(14) Tgi Paris 4 décembre 2009 « Jpl-Cnfdi / Google Inc. » ; www.legalis.net
(15) Tgi Paris 8 septembre 2010 précité.
(16) A. Cousin, « Google Suggestions : injure sans intention de nuire ou dénigrementinvolontaire », Revue Lamy Droit de l'Immatériel août-septembre 2009,p. 26.
(17) C. Bigot, op. précité
(18) Cjue 23 mars 2010 (affaires jointes C-236/08 à C-238/08, considérant n° 120),Légipresse n° 274, juill-août 2010 p. 132 comm. Camille Maréchal
(19) Article 2, alinéa 3 de la loi informatique et libertés : « Constitue un traitementde données à caractère personnel toute opération ou tout ensemble d'opérationsportant sur de telles données, quel que soit le procédé utilisé, et notamment lacollecte, l'enregistrement, l'organisation, la conservation, l'adaptation ou la modification,l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission,diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement oul'interconnexion ( ) ».
(20) Tgi Paris 12 juin 2013, RG 11/10505. Légipresse n° 307 juill-août 2013 p. 399
(21) Article 2, alinéa 2 de la loi informatique et libertés : « Constitue une donnéeà caractère personnel toute information relative à une personne physique identifiéeou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à ( ) un ouplusieurs éléments qui lui sont propres ».
(22) Notion définie par l'article 3, I de la loi comme étant « la personne ( ) quidétermine ses [les] finalités et [ses] les moyens » du traitement ».
(23) Conclusions prises le 25 juin 2013 par l'avocat général (M. Niilo Jääskinen)devant la Cjue (affaire C-131/12 opposant Google Spain et Google Inc. à deuxentités espagnoles) : « Les dispositions matérielles de la directive, ( ) sont, selonmoi, fondées sur le postulat selon lequel le responsable du traitement sait ce qu'il faitau sujet des données à caractère personnel concernées, en ce sens qu'il est conscientde la nature des données ( ) qu'il traite et des raisons pour lesquelles il les traite. End'autres termes, le traitement des données doit lui apparaître, d'une façon ou d'uneautre qui soit pertinente sur un plan sémantique, comme un traitement de donnéesà caractère personnel, c'est-à-dire d'information[s] concernant une personne physiqueidentifiée ou identifiable, et non pas comme le traitement d'un simple codeinformatique » (point 83) ; « Aussi une interprétation raisonnable de la directiveexige-t-elle que le fournisseur de services ne soit pas, de façon générale, considérécomme ayant cette qualité » (point 89).
(24) Avis 1/2010 « sur les aspects de la protection des données liées aux moteurs derecherche », adopté le 4 avril 2008 par le G29 (p. 12).
(25) Conclusions du 25 juin 2013 (points 64 et 65) rendues par Monsieur NiiloJääskinen, avocat général, dans l'affaire C-131/12 : « ( ) je tends à me rallier à laconclusion du Groupe de travail Article 29 selon laquelle le modèle économiqued'un prestataire de services de moteur de recherche sur Internet doit être pris encompte en ce sens que son établissement joue un rôle significatif dans le traitementdes données à caractère personnel s'il est lié à un service intervenant dans la ventede publicité ciblée aux habitants de cet État ».
(26) TGI Montpellier, ordonnance de référé, 28 octobre 2010, Mme C. c/Google France et Google Inc, Légipresse n° 284 juin 2011, p. 365 comm. JulienLe Clainche
(27) Cass. Ass. Plén. 12 juillet 2000 (trois arrêts : pourvois n° 98-10160, 99-19004et 98-11155) : « Attendu que les abus de la liberté d'expression prévus et répriméspar la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l'article 1382du Code civil ». Légipresse n° 175, octobre 2000 p. 162 comm. B. Ader.
(28) Civ. 1re 30 octobre 2008 (pourvoi n° 07-19223) : « Qu'en statuant ainsi, quandl'imputation de la paternité d'une publication en l'absence de propos injurieux ouportant atteinte à l'honneur ou à la considération ne relève pas des dispositions dela loi du 29 juillet 1881, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 29et 53 de la loi du 29 juillet 1881 et par refus d'application l'article 1382 du Codecivil », Légipresse n° 258, jan. 2009 p. 12
(29) Civ. 1re 19 mars 2009 (pourvoi n° 07-19667). Légipresse n° 262, juin 2009p. 83. La Cour de cassation a censuré une décision d'appel ayant appliqué de laloi de 1881 en présence de propos mettant en cause les « qualités professionnelles» et « l'utilité du travail » d'une société (« qu'en statuant ainsi quand lespropos litigieux mettaient seulement en cause les qualités professionnelles et l'utilitédu travail de la société Dmhe mais pas son honneur ni sa considération, la courd'appel a violé le texte susvisé »). Civ. 2e 13 janvier 2012 (pourvoi n° 10-23679) :la Haute Juridiction valide une action civile sur le fondement de l'article 1382à l'encontre d'auteurs d'appels téléphoniques injurieux, au motif que ces faitspouvaient également relever du délit d'appels téléphoniques malveillants ausens de l'article 222-16 du Code pénal.
(30) Pour un exemple récent, dans lequel la Cour de cassation a rejeté uneaction fondée sur l'article 1382, ayant été engagée à l'encontre de proposmensongers et n'entrant dans aucun des cas prévus par la loi de 1881 : Civ. 1re10 avril 2013, Légipresse n° 307 juillet-août 2013, p. 425, N. Verly.
(31) Jurisprudence constante depuis l'arrêt « Franck », Cass. Ch. Réun.2 décembre 1941, Jcp 1942, II, 1766, note Mihura.