En rejetant les demandes du Syndicat national des éditeurs de phonogrammes, visant à faire ordonner à Google la suppression des termes litigieux des suggestions proposées quand, d'une part, le service Google Suggest orientait systématiquement les internautes, par l'apparition des mots-clés suggérés en fonction du nombre de requêtes, vers des sites comportant des enregistrements mis à la disposition du public sans l'autorisation des artistes-interprètes ou des producteurs de phonogrammes, de sorte que ce service offrait les moyens de porter atteinte aux droits des auteurs ou aux droits voisins, et quand, d'autre part, les mesures sollicitées tendaient à prévenir ou à faire cesser cette atteinte par la suppression de l'association automatique des mots-clés avec les termes des requêtes, de la part des sociétés Google qui pouvaient ainsi contribuer à y remédier en rendant plus difficile la recherche des sites litigieux, sans, pour autant, qu'il y ait lieu d'en attendre une efficacité totale, la cour d'appel a violé les articles L. 336-2 et L. 335-4 du Cpi.
1. La Cour de cassation a rendu, le 12 juillet 2012, une décision majeure pour l'effectivité de la protection des droits de propriété intellectuelle sur l'internet (1). La portée de l'arrêt ne fait aucun doute. Outre sa très large publication, il s'agit d'un arrêt de cassation (qui, comme tel, oblige la cour régulatrice à se démarquer par rapport aux juges d'appel) rendu au double visa des articles L. 335-4 et L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle (Cpi) (ce qui permet de ...
Cour de cassation, 1re civ., 12 juillet 2012, Snep c/ Google
Christophe Alleaume
Professeur à l’Université de Caen Basse-Normandie, Directeur de l’Institut ...
(5) CA Paris, pôle 1, chambre 3, 3 mai 2011 (RG 10/19845) : Comm. Comm. électr.,2011, n° 63, obs. C. Caron ; Rida, avril 2011, p. 365, chron. P. Sirinelli ; Propr. Intell.,2011, p. 304, obs. J.-M. Bruguière ; Petites Affiches, 22 déc. 2011, n° 254, p. 10, obs.X. Daverat, Légipresse n° 284-11.
(6) CC, 10 juin 2009, DC n° 2009-580, n° 38 : Jcp G, 2009, n° 101, note Fedelman ;D., 2009, p. 2045, note L. Marino ; Propr. Intell., 2009, p. 212, obs. V.-L. Benabou.
(7) P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, Puf, Droit fondamental, 8e éd.,2012, n° 342 : « L'usager, fût-il consommateur, sera lui-même punissable s'il communiqueen réseau à l'échelon planétaire. Ne saurait de ce point de vue être retenuel'idée selon laquelle il ne ferait que donner accès dans sa maison virtuelle à descamarades qu'il ne connaît ni d'Ève ni d'Adam » et n° 769.
(8) P.-Y. Gautier, ibid.
(9) P.-Y. Gautier, op. cit., n° 343, pour qui, dans ce cas, le grief de « contrefaçonou de recel » de contrefaçon est constitué. A. Lucas, H.-J. Lucas et A. Lucas-Schloetter, Traité de la propriété littéraire et artistique, 4e édition, 2012, n° 380 :« Le législateur a de toute évidence voulu réintroduire dans le champ du monopolela copie réalisée dans le cadre du système de peer to peer, ou à partir d'un site destreaming dont l'illégalité est notoire ».
(10) A. Lucas, H.-J. Lucas et A. Lucas-Schloetter, op. cit., n° 306, font toutefoisdépendre le streaming du droit de représentation. Contra : P.-Y. Gautier, op. cit.,n° 247.
(11) Sur ce texte, N. Binctin, Droit de la propriété intellectuelle, Lgdj, manuel, 2e éd.,2012, n° 1226 et s. J. Huet et E. Dreyer, Droit de la communication numérique,Lgdj, manuel, 2011, n° 112.
(12) Les juges français savent parfaitement manier ces adverbes : manifestement,notoirement
(13) P.-Y. Gautier, op. cit., n° 766, fait d'ailleurs référence au devoir des hébergeursde se comporter en « bon père de famille ». A. Lucas, H.-J. Lucas et A. Lucas-Schloetter, op. cit., n° 380 évoquent de leur côté un site de streaming « dontl'illégalité est notoire » pour conclure que, dans ce cas, l'activité n'échappe pas aumonopole d'exploitation.
(14) Tgi Paris, 13 juillet 2007 : Comm. Comm. électr., 2007, n° 143, obs. C. Caron ;Propr. Intell., 2008, p. 116, obs. J.-M. Bruguière, condamnant l'hébergeur sur labase de l'évidence que le service qu'il propose servira à des échanges interdits(mais pas de condamnation selon Cass. civ. 1re 17 février 2011 : D., 2011, p. 1113,note L. Grynbaum ; Propr. Intell., 2011, p. 197, obs. A. Lucas ; Rida, avril 2011,chron. P. Sirinelli ; Rtd Com., 2011, p. 351, obs. F. Pollaud-Dulian).
(15) P.-Y. Gautier, op. cit., n° 768 : « Celles [les plates-formes] qui permettent auxinternautes de déposer toutes sortes de contenus amateurs, mais aussi donnéesprotégées, ne sauraient trop facilement clamer leur ignorance ».
(16) Sur ce point, N. Binctin, op. cit., not. n° 1231.
(17) A. Lucas, H.-J. Lucas et A. Lucas-Schloetter, op. cit., n° 1105 : le dispositif néde la loi Hadopi « crée une véritable action en cessation spécifique en matière dedroit d'auteur ».
(18) La cour régulatrice note que le service en cause « orientait systématiquementles internautes [ ] vers des sites comportant des enregistrements mis à ladisposition du public sans l'autorisation des artistes-interprètes ou des producteursde phonogrammes ».
(19) Écartée par la Lcen, v. ci-dessus n° 13.
(20) A. Lucas, H.-J. Lucas et A. Lucas-Schloetter, op. cit., n° 1106.
(24) Par ex., Cjue, 3e ch., 24 novembre 2011, aff. C-70/10, « Scarlet Exended SA » :D., 2011, p. 2925, obs. C. Manara ; Légipresse, 2012, p. 167, note O. Bustin ; Propr.Intell., 2012, p. 47, obs. V.-L. Benabou ; Rida, janv. 2012, p. 271, chron. P. Sirinelli ;Comm. Comm. électr., 2012, n° 63, note A. Debet ; Europe, 2012, comm. 44, obs.L. Idot. V. aussi P.-Y. Gautier, « De l'éventuel rôle actif des opérateurs Internetdans la réalisation du dommage (qualification de responsabilité civile) » : D.,2011, p. 2054. V. aussi N. Binctin, op. cit., n° 1227.