Si la publication d'une photographie d'une personne, sans le consentement de celle-ci, est licite, lorsqu'elle est prise dans un lieu public et qu'elle a pour objet d'illustrer un article concernant un événement d'actualité judiciaire dans lequel cette personne est impliquée, elle ne l'est pas et porte atteinte à l'intimité de la vie privée de l'intéressé lorsqu'elle montre celui-ci à l'intérieur de son domicile alors que ledit domicile n'a aucun lien avec le lieu où se seraient déroulés les faits, objets de l'actualité judiciaire.
Cet arrêt est une illustration parfaite du raisonnement en deux étapes suivi par la jurisprudence depuis quelques années (1) afi n de déterminer si la publication d'une image est justifi ée par le droit du public à l'information. La cour applique ici cette démarche à l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé. Était en cause une photographie, publiée par le Journal du dimanche (Jdd), représentant Roman Polanski, derrière la vitre de son chalet de Gstaad, en train de ...
Cour d'appel, Paris, Pôle 1, ch. 2, 20 octobre 2010, Hachette Filipacchi associés c/ Roman Polanski
(2) V. C. Bigot, « Le nouveau régime du droit à l'image : le test en deux étapes »,D. 2004, comm. p. 2596. La démonstration de Me Bigot prend appui sur troisarrêts de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation : deux rendus le19 février 2004 (pourvois n° 02-12742 et 02-11122) et un datant du 11 décembre2003 (pourvoi n° 01-17623). Ces deux étapes ont été également décritespar M. Jean-Pierre Gridel, conseiller à la Cour de cassation, in « Protection de lavie privée : rupture ou continuité ? », Gaz. Pal., 18-19 mai 2007, Recueil mai-juin2007, p. 1461 (« lien suffi samment direct »).
(3) Tgi Paris, 13 octobre 1999, Comm. comm. électr., janvier 2001, p. 26, noteA. Lepage, Tgi Paris, 25 juin 1997 : LP 1997, n° 146-I-139 ; T. Seine 24 novembre1965 : Jcp 1966, II, 14521, note R. Lindon.
(4) Cass. crim., 9 mars 1999, pourvoi n° 98-80.376. En sens inverse cependant,V. Cass. crim., 4 mars 1997, Bull. crim. n° 83.
(5) Paris, 2 novembre 2000, Droit pénal avril 2001, p. 12, note M. Véron.
(6) Tgi Paris, 13 octobre 1999, Comm. comm. électr. janvier 2001, p. 26, note A.Lepage.
(7) Jean-Yves Dupeux, « Les règles de protection pénale de l'image des personnes», in L'image menacée : Actes du Forum Légipresse du 4 octobre 2001,Victoires-Editions, collection Légipresse, p. 61.
(8) V. en ce sens Tgi Paris, 4 décembre 2002 : LP n° 204-I-115 ; Tgi de Paris du 3 mai2002 : LP n° 194, I, p. 101 ; Tgi de Nanterre du 6 mars 2001 : LP 2001, I, p. 54 ; Paris,16 juin 1986 : D. 1987, Somm. comm., p. 136, note de R. Lindon.
(9) V. supra, note 1.
(10) « La liberté de communication des informations justifie la publication de l'imaged'une personne impliquée dans une affaire judiciaire, sous réserve du respect de ladignité de la personne humaine » : V. Cass. 1re civ., 12 juillet 2001, Comm. comm.électr. nov. 2001, p. 26, note A. Lepage ; D. 2002, jp p. 1380, note Christophe Bigot ;D. 2002, Somm. comm. p. 2298, note Laure Marino ; Droit et patrimoine, n° 98,p. 103, note Grégoire Loiseau ; Revue juridique personnes et famille, novembre 2001,n° 11, p. 10, note Éric Garaud ; Jcp 2002, II, 10152, note Jacques Ravanas.
(11) V. à cet égard C. Weill, « L'effacement des frontières entre la presse d'informationpolitique et générale et la presse people », in Les nouvelles frontières dela vie privée, Légicom n° 43, 2009/2, p. 9 ; B. Ader, « La protection judiciaire de lavie privée des personnalités politiques : entre modernité et subjectivité », ibid.p. 13. On peut constater à la lecture de cet article que dans l'affaire relative à lapublication de photo représentant M. Jean-Louis Borloo et Mme Béatrice Schönberg,France Dimanche n'a pas été condamné, alors que cet hebdomadaire estdavantage classé dans la catégorie de la presse dite people que Vsd qui, lui, aété condamné.