Le droit de divulguer une oeuvre, attribut du droit moral d'auteur, emporte, par application des dispositions de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle, le droit de déterminer le procédé de divulgation et celui de fi xer les conditions de celle-ci. Un auteur ayant, par dispositions testamentaires, confi é l'exercice de ce droit exclusivement à son fi ls, ce dernier était seul habilité à décider de la communication au public des oeuvres posthumes de son père, du choix de l'éditeur et des conditions de cette édition.
L'exercice du droit de divulgation post mortem est réservé au titulaire du droit moral désigné par l'auteur. Dans un arrêt du 25 mars 2010 la première chambre civile de la Cour de cassation a confi rmé ce principe, excluant que l'indivision des droits patrimoniaux puisse faire obstacle à l'exercice exclusif du droit de divulgation par le bénéfi ciaire testamentaire de l'auteur.En l'espèce, il s'agissait de déterminer si l'un des deux descendants du philosophe Emmanuel Lévinas, par ...
Cour de cassation, 1re ch. civ., 25 mars 2010, Mme S. c/ Éditions Grasset et Fasquelle
(3) D. Martin, La dévolution successorale des droits d'auteur, th. Besançon, 2010,n° 547 et s.
(4) Article L.121-2 CPI : « L'auteur a seul le droit de divulguer son oeuvre. Sous réservedes dispositions de l'article L.132-24, il détermine le procédé de divulgation et fi xeles conditions de celle-ci. Après sa mort, le droit de divulgation de ses oeuvres posthumesest exercé leur vie durant par le ou les exécuteurs testamentaires désignéspar l'auteur. À leur défaut, ou après leur décès, et sauf volonté contraire de l'auteur,ce droit est exercé dans l'ordre suivant : par les descendants, par le conjoint contrelequel n'existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de corpsou qui n'a pas contracté un nouveau mariage, par les héritiers autres que les descendantsqui recueillent tout ou partie de la succession, par les légataires universelsou donataires de l'universalité des biens à venir. Ce droit peut s'exercer même aprèsl'expiration du droit exclusif d'exploitation déterminé par l'article L.123-1 ». M. Vivant,J.-M. Brugière, Le droit d'auteur, éd. Dalloz, 2009, n° 925 ; CA Paris, 9 juin 1964, JCPG 1965, II, 14 172, note A. Françon.
(5) TGI Paris, 4 juillet 1984, RIDA 1984, p. 232 : « L'article 19 (de la loi du 11 mars1957) se fonde soit sur la volonté de l'auteur soit sur une présomption de confi anceenvers les personnes susceptibles de se trouver en communion de pensée avec luimêmeet ainsi d'être plus attentifs au respect de ses créations ». F. Pollaud-Dulian,Le droit d'auteur, éd. Economica 2005, n° 492.
(6) H. Mazeaud, « Le droit moral des artistes sur leurs oeuvres et leur incidence »,D. 1959, chron. p. 133 : « (Si le droit moral) survit au décès de l'auteur, à la diff érencedu droit de propriété corporelle, il subit une transformation profonde quandil se transmet à cause de mort. Il n'est plus, alors, pour son nouveau titulaire, quel'instrument d'un devoir de fi délité à l'égard des intentions de l'auteur ».
(7) H. Desbois, Le droit d'auteur en France, 3e éd., éd. Dalloz 1978, n° 466.
(8) C. Caron, Abus de droit et droit d'auteur, th. Paris, éd. Litec 1998.
(9) CA Paris, 12 octobre 2003, Propriétés Intellectuelles 2004, n° 10, p. 546, obs.A. Lucas : l'épuisement du droit de divulgation ne joue pas dès lors que l'oeuvreest exploitée sous une nouvelle forme, en particulier sous une forme portantatteinte au droit moral de l'auteur sur ce dernier point voir Cass. Civ. 1re,21 novembre 2006, Propriétés Intellectuelles janvier 2007, p. 84, note A. Lucas ;RIDA janvier 2007, p. 345, note P. Sirinelli ; RTDCom 2007, p. 536, obs. F. Pollaud-Dulian.
(10) P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, coll. Droit fondamental, 6e éd., éd.PUF, 2007, n° 142 : « La liberté créatrice de l'adaptateur ne saurait être anéantie ( )le passage d'un genre à l'autre suppose un nécessaire ajustement ».
(11) A. Lucas, « Droit de divulgation Épuisement », Propriétés Intellectuelles2001, p. 60, com. n° 3.
(12) Cass. Civ. 1re, 14 juin 1972, RIDA 1972, note H. Desbois, p. 135 ; H. Desbois,« Propriété littéraire : dévolution du droit moral après la mort de l'auteur ( ) »,RTD Com 1972, p. 898.
(13) H. Desbois, op. cit., n° 480.
(14) A. Lucas et H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, 3e éd., éd.Litec 2006, n° 25, p. 32, l'objet de l'indivision artistique ce n'est pas la choseincorporelle mais « le droit qui en permet l'appropriation ».
(15) Pour un exemple de confl it entre le légataire universel titulaire des droitspatrimoniaux et les enfants, gardiens du droit moral, voir TGI Paris, 23 avril 1997,« Blier », RIDA juillet 1997, p. 366.
(16) Cass. Civ. 1re, 24 octobre 2000 : « Le droit de divulgation post mortem n'estpas absolu et doit s'exercer au service de l'oeuvre, en accord avec la personnalitéde l'auteur telle que révélée et exprimée de son vivant » ; Bull. civ. I, n° 266 ;RTD Com 2001, note A. Françon ; D. 2001, jur. p. 918, note C. Caron.
(17) G. Henry, L'évaluation en droit d'auteur, th. Paris II, coll. Irpi, 2007.
(18) A. Favreau, « La transmission successorale de la création et l'indivision »,Revue Lamy Droit des Aff aires 2007, n° 21, p. 113.
(19) D. Martin, La dévolution successorale des droits d'auteur, th. préc., n° 472.
(20) Pour un exemple de confl it entre les indivisaires : Cass. Civ. 1re, 4 avril 1991,« Aff aire Picasso », Bull. civ. I, n° 115 ; D. 1991, I.R p. 159 ; D. 1991, jur. p. 261, noteP.-Y. Gautier ; RTD Civ 1991, p. 160, note J.-P. Patarin ; Defrénois 2001, art. 37 412,p. 1172, note C. Nivelon-Andrieu.