N'a pas justifié sa décision la cour d'appel qui a déclaré conformes aux prescriptions légales trois affi ches publicitaires en faveur d'une marque de whisky, sans rechercher si la publicité incriminée ne dépassait pas les limites des indications prévues par l'article L. 3323-4 du Code de la santé publique en dépit de la modifi cation de ce texte par la loi du 23 février 2005, sur les eff ets de laquelle elle ne s'est pas expliquée (1re espèce page 33) La loi du 21 juillet 2009 a ajouté internet à la liste des supports autorisés pour la publicité en faveur des alcools. Alors même qu'aucun décret d'application n'a été pris s'agissant du nouvel alinéa 9 de l'article L. 3323-2 du Code de la santé publique, la publicité ou propagande sur internet doit se conformer aux dispositions générales de l'article L. 3223-4 dudit Code (loi Evin). Ainsi, le caractère interactif de la communication ne libère pas l'émetteur de l'interdiction de ne pas transgresser les limites autorisées par la loi. Le juge des référés constate que le site internet d'une marque de whisky ne respecte pas la réglementation, en ce qu'il s'agit avant tout d'une présentation attractive et de qualité mais non informative et sans références autorisées. (2e espèce page 34) Les publicités litigieuses ne respectent pas à l'évidence le critère d'objectivité imposé par les dispositions de l'article L. 3323-4 du Code de la santé publique et constituent bien des publicités illicites en faveur de l'alcool. (3e espèce page 37) Le juge n'a pas à procéder à des distinctions que la loi ne fait pas, tandis que compte tenu des dispositions légales et réglementaires comme des usages professionnels, la représentation fi gurative de professionnels appartenant à la fi lière de l'élaboration, de la distribution et de la commercialisation de vins de Bordeaux comme le caractère avenant, souriant, jeune, en tenue de ville, de personnes ou groupe de personnes, présentant diff érentes marques de vins en levant le bras en tenant un verre, avec une impression manifeste de plaisir ne peuvent être utilement reprochés dès lors que les autres exigences de la législation et réglementation applicables sont respectés, une telle représentation n'étant pas, par elle-même de nature à inciter à une consommation abusive et excessive d'alcool, étant observé que par essence la publicité s'eff orce de présenter le produit concerné sous un aspect favorable pour capter la clientèle et non pour l'en détourner. (4e espèce page 39)
Le rapt de séduction, délit pénal sous l'empire du droit de l'Ancien Régime, avait fait le délice de la doctrine pénale au XVIIIe siècle et continue à inspirer les historiens du droit (1).En droit de la publicité, point de rapt, mais l'article L. 3323-4 du Code de la santé publique donne lieu à une jurisprudence qui s'interroge sur l'incitation du visuel publicitaire et sa capacité de séduction. La question peut paraître paradoxale puisque la cause du contrat de publicité est ...
Cour d'appel, Paris, Pôle 5, ch. 11, 26 février 2010, Anpaa c/ Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux et SA Insert
(2) Muyart de Vouglans, Les lois criminelles de France : « Le rapt de violence est lecrime de ceux qui enlèvent par force et malgré elles, des filles, femmes, et veuves, soitmajeures soit mineures, dans la vue d'en abuser Le rapt de séduction se commetpar des personnes majeures qui ont suborné une jeune fille ou veuve mineures, ens'emparant de son coeur par des voies illicites et artificieuses, pour en abuser souspromesse de mariage ».
(3) Georges Péninou, Expression publicitaire des boissons alcoolisées sous l'égide dela loi Évin (déc. 1991 [dactyl.], 44 p.
(4) CA Paris, 13e ch., 20 mai 1994, Bruneau c/ Anpaa : Juris-Data n° 1994-021382 ;Contrats, conc., consom. 1994, comm. 233 confirmé par Cass. crim., 31 mai1995 ; Tgi Paris, réf., 18 mars 2004, Anpaa c/ Civb, Légipresse n° 211, mai 2004 ;Tgi réf., 10 juill. 2006, Anpaa c/ Interprofessions des vins du val de Loire, Légipressen° 236, nov. 2006 : ces deux décisions distinguent la publicité licite sur leproduit de la publicité sur le boire, par nature illicite. Une telle distinctionn'apparaît pas manifestement à la lecture de la loi. Est ainsi sanctionnée « unecampagne publicitaire Bourgognes révélation utilisant un langage évocateur etdes visuels féminins, évoquant un univers riche fait d'élégance, de légèreté et demodernité » (Tgi Paris, réf. 6 janv. 2004, Anpaa c/ Civb, Légipresse n° 209, mars 2004)
(5) La loi du 30 juillet 1987, venant modifier le Code des débits de boissons,prévoyait que « toute publicité en faveur des boissons de plus de 1 degré d'alcooldoit comporter un conseil de modération concernant la consommation de cesproduits alcooliques ». Une circulaire du 16 octobre 1987 était venue préciserque « le conseil de modération doit figurer désormais de façon perceptible surtoute publicité » et le Bvp recommandait d'utiliser la formule « sachez apprécieret consommer avec modération » en indiquant qu'« une parfaite perception exigel'utilisation d'une couleur ou d'une sonorité tranchant sur le fond du message,l'inscription à l'horizontale, que la taille et le corps des caractères soient choisis enfonction du support et perceptibles dans des conditions normales de lecture « (Cestextes sont reproduits in : Greffe, La publicité et la loi : Litec, 1990, p. 765 et s.).
(7) L'article L. 3421-4 du Code de la santé publique dispose : « La provocationau délit prévu par l'article L. 3421-1 ou à l'une des infractions prévues par les articles222-34 à 222-39 du Code pénal, alors même que cette provocation n'a pas étésuivie d'effet, ou le fait de présenter ces infractions sous un jour favorable est puni decinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.Est punie des mêmes peines la provocation, même non suivie d'effet, à l'usage desubstances présentées comme ayant les effets de substances ou plantes classéescomme stupéfiants.Lorsque le délit prévu par le présent article constitue une provocation directe et estcommis dans des établissements d'enseignement ou d'éducation ou dans les locauxde l'administration, ainsi que, lors des entrées ou sorties des élèves ou du public oudans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements ou locaux,les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende.Lorsque le délit prévu par le présent article est commis par voie de la presse écrite ouaudiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sontapplicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables.Les personnes coupables des délits prévus par le présent article encourent égalementla peine complémentaire d'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais,un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de produits stupéfiants ». L'articleL. 3421-1 du Code de la santé publique disposant pour sa part que : « L'usageillicite de l'une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d'unan d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende ».
(8) Dans sa décision du 8 janvier 1991 (Jorf, 10 janv. 1991), le Conseil constitutionnela pu relever que le législateur « s'est borné à limiter la publicité en cedomaine, sans la prohiber de façon générale et absolue ».
(9) Tgi Paris, 4e ch., 2e sect., 28 janv. 2010, Anpaa c. SA Brasseries Kronenbourg,N° RG : 08/16318, ci-dessus reproduit.
(10) Joan CR 12 déc. 1990, p. 6680 (intervention Le Guen), et p. 6682, (interventionC. Évin).
(11) Tgi Paris, réf., 16 févr. 2010, Anpaa c. Sas Lixir & The Brand Nation, n° RG :10/51504 : l'ordonnance sanctionnant toutefois peu après, la « présentationattractive de qualité ».
(13) Paris, Ch. 11, pôle 5, 26 févr. 2010, Anpaa c. Civb, N° R.G : 07/00620 : « lesrestrictions ainsi apportées ne peuvent qu'être interprétées strictement dès lors d'unepart que la faculté par le producteur ou le négociant de développer une publicitéen faveur des produits qu'il crée, élabore, distribue et commercialise est l'exerciced'un droit qui participe du principe constitutionnel de la liberté du commerce etde l'industrie qui ne peut être limité qu'à raison d'un principe de même portée, enl'espèce l'obligation de l'État de garantir le droit à la santé reconnu par le préambulede la Constitution du 27 octobre 1946, d'autre part que la réglementation de laCommunauté Européenne notamment en faveur de la libre de circulation desproduits impose au législateur d'exclure toute entrave qui ne serait pas nécessairetout en permettant à chaque État de définir dans l'ordre interne les limitations nécessairespour assurer la protection de la santé, de troisième part, que les restrictionsapportées emportent cette conséquence que le caractère illicite constitutif d'uneinfraction pénale découle du non-respect de ces restrictions, ce qui impose leurinterprétation stricte ».
(14) Tgi Paris, 4e ch., 2e sect., 28 janv. 2010, Anpaa c/ SA Brasseries Kronenbourg,N° RG : 08/16318, ci-dessus reproduit.
(15) JO S., Déb., séance du 19 janv. 2005, Art. 4A.
(16) Tgi Paris, 4e ch., 2e sect., 28 janv. 2010, Anpaa c/ SA Brasseries Kronenbourg,N° RG : 08/16318.
(17) Cass. crim., 31 mai 1995, Bruneau : Dr. pén. 1995, comm. 260, note J.-H.Robert. Une telle appréciation apparaît bien stricte car ce slogan aurait pu êtrerattaché conjointement aux mentions autorisées que sont l'origine (historique)et le mode d'élaboration.
(18) Cass. crim., 18 mai 1994, Sales & Télérama, Bowes et Sodev.i
(19) Cass. 2e civ., 28 juin 1995, Anpaa c/ Mumm & Dab Needham : Contrats, conc.,consom. 1995, comm. 196, note approbatrice G. Raymond ; Juris-Data n° 1995-001713.