DANS LES ENTRAILLES DE LA montagne Sainte-Geneviève, Victor Hugo et Émile Zola que la Patrie reconnaissante a réunis pour l'éternité dans le caveau n° 14 du Panthéon, ont dû voir dans le feuilleton judiciaire relatif à la suite des Misérables, un curieux objet de Contemplations.L'affaire a défrayé la chronique littéraire en 2001 lorsque les éditions Plon publièrent deux livres de François Cérésa intitulés Cosette ou le temps des illusions et Marius ou le fugitif, ...
Cour de cassation, 1re ch. civile, 30 janvier 2007, Société Plon et a. c/ Pierre Hugo et a.
Emmanuel EMILE-ZOLA-PLACE
Docteur en droit, Spécialiste en droit de la propriété intellectuelle et des ...
(2) Le livre était revêtu d'un bandeau rouge reproduisant un message accrocheur : « Cent cinquanteans plus tard, voici revenir les héros légendaires. Cosette a dix-huit ans et ne sait pasgrand-chose de la vie. Son mari, le baron Marius Pontmercy, en a vingt-trois. Ils sont jeunes,riches et beaux. Mais Thénardier, le bourreau pervers, que l'on croyait aux Amériques, rôde dansl'ombre. Et Javert, le redoutable inspecteur Javert, s'est-il vraiment noyé dans la Seine ? ( ) »
(3) TGI Paris, 1re ch., 12 sept. 2001, CCE déc. 2001, comm. n° 29, C. Caron, PropriétésIntellectuelles, avril 2002, p. 56, obs. A. Lucas, RTD com. 2002, n° 475, obs. Françon.
(4) CA Paris, 4e ch. A. 31 mars 2004, D. 2004. p. 2028 et s. commentaire B. Edelman, RTD com.2004, n° 474, obs. F. Pollaud-Dulian., CCE mai 2004, comm. n° 50, C. Caron, PropriétésIntellectuelles, juill. 2004, p. 768, obs. A. Lucas, RIDA, oct. 2004, n° 261 et s. note A. Kéréver.
(5) Sur la perpétuité et l'imprescriptibilité du droit moral, v. E. Emile-Zola-Place, La prescriptionextinctive en droit d'auteur, Thèse Paris II, 2005.
(6) Déclarant recevable l'action des héritiers tendant au respect du nom d'un auteur mort et del'intégrité de son oeuvre, CA Paris, 27 déc. 1866, Pataille, 1866.1.361, et CA Paris, 30 nov.1888, Pataille, 1890.31.
(7) Pouillet, Traité de la propriété littéraire et artistique et du droit de représentation, Paris 1908,3e éd. n° 157 et 204 bis.
(8) De fait, elle s'est autant employée à la justifier v. Desbois, Le droit d'auteur en France, 3e éd.n° 322 et 382, P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, 5e éd. PUF n° 122, F. Pollaud-Dulian,« Droit moral et droit de la personnalité », JCP éd G., 1994 I 3780, n° 17 et C. Pourquier,Propriété et perpétuité, contribution à l'étude de la notion de perpétuité en droit privé, PUAM2000, n° 325; qu'à la combattre, v. P.Kayser, « Les droits de la personnalité, aspects théoriqueet pratique », RTD civ. 1971, p.445 et s., A. et H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire etartistique, Litec 2007, n° 428, G. Lyon-Caen, J. Raynard, Droit d'auteur et conflits de loi, Essaisur la nature juridique du droit d'auteur, Litec 1990, n° 281.
(9) Civ. 1re 11 janv. 1989, Bull. n° 9, D. 1989, p. 308, note B. Edelman, RIDA juill. 1989.256 ets. et sur renvoi, CA Versailles, 3 oct. 1990, RIDA oct. 1991, p. 148, note P.Y. Gautier.
(10) Par testament olographe du 23 septembre 1875, Victor Hugo leur confiait « la charge depublier mes manuscrits de la façon que voici ( ) dans l'esprit et dans la pensée qu'ils meconnaissent » et leur conférait « plein pouvoir pour requérir l'exécution entière et complète deses volontés ».
(11) V. la note de C. Caron sous TGI Paris, 1re Ch. 12 septembre 2001 précité.
(12) Civ. 1re, 18 juill. 2000, Bull. n° 226, D. 2000, p. 821, note P.-Y. Gautier.
(13) M.-N. Jobars-Bachellier et X. Bachellier, La technique de cassation, Dalloz, 6e éd. v°« substitution de motifs », définie comme une technique permettant d'éviter une cassation quiserait inutile dès lors qu'en définitive la décision prise par les juges est la bonne.
(14) Dans un arrêt Fernand Léger, la Cour avait décidé que la renonciation à la succession impliquait« la volonté de l'intéressé de renoncer à être le continuateur de la personne du défunt età devenir titulaire du droit moral sur son oeuvre », Civ. 1re, 3 déc. 2002, Bull. n° 294.
(15) Civ. 1re, 15 fév. 2005, Bull. n° 84, CCE 2005, comm. n° 62, C. Caron et RTD com. 2005,p. 316, note F. Pollaud-Dulian.
(16) Le nouvel article 815-2 du Code civil admet désormais qu'un seul indivisaire peut solliciterdes mesures conservatoires « même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence ».
(17) Favorable à un contrôle par référence à la théorie générale de l'abus de droit plutôt que parréférence à l'article L. 121-3 du CPI qui se limite à l'abus dans l'exercice du droit de divulgation,v. C. Caron, Abus de droit et droit d'auteur, Litec-IRPI, 1998, n° 101 et s.
(18) Déjà en ce sens, affaire Paul Féval, Civ. 1re 16 avril 1975, Bull. n° 116.18.La Cour de cassation avait déclaré la SGDL irrecevable en sa demande tendant à l'interdictionde l'adaptation cinématographique des Liaisons dangereuses par Roger Vadim, auxmotifs qu'elle n'était pas investie du droit moral de Choderlos de Laclos et que la défense de« la pensée française » ou de « l'intérêt national », dépassait les intérêts professionnels dontelle a la charge, Civ. 1re, 6 déc. 1966, D. 1967. p 381, note Desbois, JCP éd G. 1967 II 14937,concl. Lindon.
(20) Article 2-4° de la loi L. n° 46-21196 créant le Centre National du Livre.
(21) TGI Paris, 15 avril 1964,Les Misérables, D.1964,p 746, note Desbois et Gaz. Pal.,1964.2.23, concl. Gulphe.
(22) Expression empruntée au professeur P. Henaff, « Le droit moral de l'auteur décédé :menace pour la liberté d'expression et la création artistique », LPA, juillet 1999 n° 143, p. 17 et s.
(23) En ce sens, R. Prades, « Suite de film: oeuvre dérivée ou autonome? Réflexions sur lanature juridique des droits dits de sequel », CCE déc. 2004. Études n° 41: « la suite d'un filmn'est pas la reprise sous une autre forme d'une première oeuvre, mais plutôt un prolongementde celle-ci, ou encore une oeuvre nouvelle reprenant les caractéristiques d'un précédent film.De cette absence d'assimilation de la suite d'un film à l'adaptation d'une oeuvre première, il s'ensuitque la nouvelle oeuvre n'obéira pas au régime juridique des oeuvres composites ».
(24) P.-Y. Gautier, op. cit., n° 319.
(25) Par un mécanisme comparable, l'article L. 113-7 du CPI assimile aux auteurs d'une oeuvreaudiovisuelle, les auteurs de l'oeuvre originaire, le plus souvent littéraire.
(26) P. Henaff, art. préc. et A. Lucas-Schloetter, Droit moral et droits de la personnalité : étudede droit comparé français et allemand, PUAM, n° 737 et s.
(27) S. Choisy, Le domaine public en droit d'auteur, Litec-IRPI, 2002, n° 398 et s.
(28) Cette solution ne remet cependant pas en cause celle applicable au droit de divulgationselon laquelle « le droit de divulgation post mortem, s'il doit s'exercer au service de l'oeuvre,doit s'accorder à la personnalité et à la volonté de l'auteur telle que révélée et exprimée de sonvivant », Civ. 1re, 3 nov. 2004, Bull. n° 247, D. 2004, p. 3223, obs. Ph. Allaeys.
(29) Par exemple, TGI Paris, 3e ch. 15 oct. 1992, RTD com. 1993. 98 obs. Françon, accueillantla demande des ayants droit de Beckett tendant à l'interdiction de la représentation d'une piècejouée par des femmes, à l'inverse des directives explicites de l'auteur exigeant une distributionexclusivement masculine.
(30) Civ. 1re, 24 oct. 2000, D. 2001, p. 918, note C. Caron et RTD com. 2001, n° 94, obs.Françon.
(31) Civ. 1re, 7 nov. 2006, D. 2007, p. 417 et s. note Ph. Allaeys.
(32) V. Hugo, Discours d'ouverture du congrès littéraire international du 17 juin 1878, Paris,Calmann Lévy éd., 1878, p. 5 et s.