LA PRÉSENTE ORDONNANCE est l'aboutissement (provisoire) de l'affaire qui oppose depuis novembre 2003 Al Manar TV au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Cette chaîne libanaise, proche du Hezbollah, a diffusé en plein Ramadan un feuilleton syrien (El Shatat ou Diaspora) s'inspirant du Protocole des Sages de Sion et donc susceptible d'être qualifié d'antisémite.Conscients de l'impuissance du CSA à son égard, les pouvoirs publics ont réaménagé le référé audiovisuel de la loi ...
Conseil d'Etat, Ordonnance de référé, 20 août 2004, Conseil supérieur de l'audiovisuel
Julien SAINT LAURENT
Docteur en droit - Chargé d'enseignement Idetcom - Université Toulouse I ...
(2) Cf. l'art. 42-10 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 (modif.) relative à la liberté decommunication.
(3) Cf. les art. 43-2 à 43-4 de la loi du 30 sept. 1986, transposant l'art. 2 de la directive CEn° 89/552 du 3 oct. 1989 modif. Pour une étude détaillée de ces critères, v. A. Meyer-Heine,« Les apports de la nouvelle directive TSF du 30 juin 1997 », RTD Eur., 1999, n° 1, p. 97 et s.
(4) V. CE, 9 oct. 1996, Assoc. Ici et Maintenant ( PA, 13 juin 1997, p. 28, note Ch. Mondou ;LP, n° 139-III-30, comm. E. Mauboussin) : légalité de la sanction par le CSA d'une radio ayantlaissé diffuser des propos racistes et antisémites sur son antenne. Pour la télévision, les sanctionssont plus rares. V. cependant celle infligée à la chaîne guadeloupéenne Canal 10 pour diffusionde propos incitant à la violence et à la haine raciale à l'égard des Haïtiens établis enGuadeloupe (réduction d'un mois de l'autorisation d'émettre) : déc. CSA n° 2002-638 du 24sept. 2002 ( JO, 19 oct. 2002, p. 17394).
(5) V. R. Cukierman, cité par La Lettre du CSA, fév. 2004, p. 2.
(6) Cf. art. 33-1, loi du 30 sept. 1986 et art. 24 du décret n° 2002-140 du 4 février 2002 fixantle régime applicable aux services de radio et de télévision du câble ou du satellite.
(7) Si une convention avait été signée entre le CSA et Al Manar, elle aurait prévu des sanctionspour réprimer tout irrespect des obligations contractuelles (et notamment déontologiques) parla chaîne (cf. art. 33-1, loi de 1986 préc.). Sans cette convention, le CSA était jusqu'alorsdésarmé car la loi ne lui donnait ni le pouvoir de sanctionner les chaînes satellites extracommunautairesnon conventionnées, ni celui d'engager une procédure à l'encontre de l'opérateurde satellite la diffusant. Cette situation a pris fin aujourd'hui (v. infra).
(8) En application de l'art. 40 du code de proc. pén. et de l'art. 42-11 de la loi de 1986 préc.
(9) Cf. art. 78 de la loi de 1986.
(10) V. La Lettre du CSA, fév. 2004, p. 2.
(11) Loi n° 2004-669 ( JO, 10 juill. 2004, p. 12483).
(12) Désormais, le régulateur peut demander aux opérateurs de réseaux satellitaires « toutesles informations nécessaires à l'identification des éditeurs des services de télévision transportés», et notamment les chaînes extracommunautaires comme Al Manar (art. 19 de la loide 1986 modif. par l'art. 36 de la loi du 9 juill. 2004).
(13) Le CSA peut à présent mettre en demeure un opérateur de réseaux satellitaires de respecterla réglementation, et le sanctionner s'il ne se conforme pas à cet avertissement (art. 42de la loi de 1986 modif. par l'art. 78 de la loi du 9 juill. 2004). La loi pour la confiance dans l'économienumérique avait déjà développé le pouvoir de sanction du CSA à l'égard des servicesconventionnés (possibilité de suspendre la convention ou de la résilier unilatéralement, etc.) ;v. art. 10 et s., loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ( LP, n° 213-IV-54, comm. Y. Tésar et B. Tabaka;JCPG., 14 juill. 2004, app. rap. n° 349 d'E. Derieux).
(14) V. L. de Broissia, Commission des affaires culturelles du Sénat, avis n° 249 (2003-2004)sur le projet de loi relative aux communications électroniques, 7 avr. 2004 (disponible surwww.senat.fr).
(15) V. J. Chevallier, « Le nouveau statut de la liberté de communication », AJDA, 1987, p. 77.
(16) V. Ch. Debbasch, note sur CE, ord. réf., 21 sept. 1988, CNCL c/ TF1, D., 1989, jur., p. 125.
(17) CE, ord. réf., 20 oct. 1998, CNCL c/ Sté La Cinq (Rec., p. 352 ; LPA, 19 mai 1989,n° 60, p. 5, note Ch. Gavalda).
(18) CE, ord. réf., 16 mars 1988, CNCL c/ TF1 (Rec., p. 124 ; RDP, 1988, p. 1373, comm. Y.Gaudemet) ; CE, ord. réf., 7 déc. 1998, CNCL c/ Sté La Cinq (Rec., T., p. 997) ; CE, ord. réf.,8 avr. 1994, CSA c/ TF1 ( AJDA, 1994, p. 370, note C. Maugüé et L. Touvet).
(19) CE, ord. réf., 21 juin 1988, CNCL c/ La Cinq et CNCL c/ M6 (RDP, 1988, p. 1373, comm. Y.Gaudemet; RFDA, 1989, p. 259, note D. Truchet; LPA, 1988, n° 107, p. 14, obs. Guyot-Sionnest).
(20) CE, ord. réf., 27 mars 2003, CSA ( AJDA, 2003, p. 1454, note J.-P. Thiellay ; JCPG., I, 178,p. 2032, obs. E. Dreyer in chr. B. Beignier et S. Regourd; JCPG, II, n° 10189, note A. Chaminade).
(21) Dans ce sens, K. Favro, « L'usage des référés dans le secteur de la communication audiovisuelle: un pas de deux entre le juge administratif et le CSA », LP, 2003, n° 200-II-49.
(22) Dans ce sens, v. Ch. Debbasch, H. Isar, X. Agostinelli, Droit de la communication, Dalloz,2002, p. 106, § 130 ; E. Derieux, Droit de la communication, LGDJ, 2003, p. 202.
(23) V. J. Morange, « Le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel », RFDA, 1989, p. 235.
(24) Cf. CE, ord. réf., 21 juin 1988, CNCL c/ La Cinq, préc.
(25) V. la note préc. d'Y. Gaudemet, p. 1376 ; v. aussi Ch. Debbasch (dir.), Droit des médias,Dalloz, 2002, p. 329.
(26) Y. Gaudemet, art. préc., p. 1377 ; sur le sujet, v. aussi Ch. Charles, Le juge administratif,juge administrateur, thèse droit, Toulouse I, 2003.
(27) V. art. 42-10 de la loi de 1986 tel que modifié par l'art. 82 de la loi du 9 juill. 2004, préc.
(28) V. Cons. Const., déc. n° 88-248 DC, 17 janv. 1989, CSA (Rec. 18 ; RDP, 1989, p. 399,comm. L. Favoreu ; RFDA, 1989, n° 2, p. 215, note B. Genevois) : « Cons. qu'une peine ne peutêtre infligée qu'à la condition que soient respectés [ ] le principe de non-rétroactivité de la loipénale d'incrimination plus sévère » (cons. 35). Cette décision est elle-même dans la lignéede celle du 30 déc. 1982 (n° 82-155 DC; Rec. 88) qui pose que ce principe « ne concerne passeulement les peines appliquées par les juridictions répressives mais s'étend nécessairementà toute sanction ayant le caractère d'une punition même si le législateur a cru devoir laisser lesoin de la prononcer à une autorité de nature non judiciaire» (cons. 33).
(29) CE, 11 fév. 2004, Sté Medya TV ( LP, n° 213-I-96, n° 213-03 ; AJDA, 2004, p. 1203, noteJ. Saint Laurent).
(30) Au cours de l'audience, Al Manar a reconnu le caractère inadmissible du feuilleton AlShatat. Mais, pour se dédouaner, elle a expliqué qu'il a été mis à l'antenne « par erreur», cequi n'a pas manqué de faire « tousser» au CSA selon O. Costemalle (v. son article « Al Manardécroche un sursis du CSA », Libération, 21 août 2004).
(31) V. www.diplomatie.gouv.fr/actu/article.asp?ART=43528
(32) V. S. Regourd, Droit de la communication audiovisuelle, PUF, 2001, p. 169, § 161.