LA DÉCISION que vient de rendre la Cour européenne des droits de l'homme doit retenir l'attention à la fois sur le fond, puisqu'elle conforte son attachement à la protection de la mémoire européenne contre la révision et la négation de la Shoah et à la limitation de la liberté d'expression en matière de racisme et d'antisémitisme, mais également sur sa forme, puisqu'elle applique pour la première fois l'article 17 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et ...
Cour européenne des droits de l'homme, 4e sect., 24 juin 2003, Décision sur la recevabilité R. Garaudy c/ France
Michaël GHNASSIA
Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation - Avocat de l'association ...
1er décembre 2003 - Légipresse N°207
3102 mots
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(2) Article 17 de la Convention : interdiction de l'abus de droit : « Aucune des dispositions dela présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un État, un groupementou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visantà la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitationsplus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention.»
(3) Nadine Fresco, « Nouveaux visages du vieil antisémitisme », in La lutte contre le négationnisme,bilan et perspective de la loi du 13 juillet 1990, Actes du colloque du 5 juillet 2002 à lacour d'appel de Paris, Documentation française, juin 2003, pp. 34-36
(4) Article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 : « Toute association régulièrement déclarée depuisau moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts, de défendre la mémoiredes esclaves et l'honneur de leurs descendants, de combattre le racisme ou d'assister les victimesde discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peutexercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par lesarticles 24 (dernier alinéa), 32 (alinéa 2) et 33 (alinéa 3), de la présente loi.Toutefois, quand l'infraction aura été commise envers des personnes considérées individuellement,l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accordde ces personnes.»
(5) Article 48-2 de la loi du 29 juillet 1881 créé par la loi du 13 juillet 1990 : « Toute associationrégulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, qui se propose, par sesstatuts, de défendre les intérêts moraux et l'honneur de la Résistance ou des déportés peutexercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l'apologie des crimes de guerre,des crimes contre l'humanité ou des crimes ou délits de collaboration avec l'ennemi et en cequi concerne l'infraction prévue par l'article 24 bis.»
(6) Article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 créé par la loi du 13 juillet 1990 : « Seront punisdes peines prévues par le sixième alinéa de l'article 24 ceux qui auront contesté, par un desmoyens énoncés à l'article 23, l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité tels qu'ilssont définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l'accord de Londresdu 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelleen application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable detels crimes par une juridiction française ou internationale. [ ] »
(7) Article 32, alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881: « La diffamation commise par les[ ] moyens[énoncés en l'article 23] envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origineou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une raceou une religion déterminée sera punie d'un an d'emprisonnement et de 45000 euros d'amendeou de l'une de ces deux peines seulement. [ ]»
(8) Article 24, sixième alinéa de la loi du 29 juillet 1881: « Ceux qui, par l'un des moyens énoncésà l'article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'unepersonne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou deleur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, serontpunis d'un an d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peinesseulement. [ ] »
(9) CA Paris (11e chambre), 16 décembre 1998, arrêt n° 1 : condamnation pour contestationde crime contre l'humanité à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 30 000 francs d'amende,la publication de la décision et au paiement de dommages-intérêts, Légipressen° 159, III, p. 30;CA Paris (11e chambre), 16 décembre 1998, arrêt n° 2 : condamnation pour contestation decrimes contre l'humanité à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 50 000 francs d'amende, lapublication de la décision et au paiement de dommages-intérêts ; CA Paris (11e chambre),16 décembre 1998, arrêt n° 3: condamnation pour diffamation publique raciale à 3 mois d'emprisonnementavec sursis, 20 000 francs d'amende et au paiement de dommages-intérêts,Légipressen° 159, III, p. 35; CA Paris (11e chambre), 16 décembre 1998, arrêt n° 4: condamnationpour diffamation publique raciale et provocation à la haine ou à la violence raciale à 3mois d'emprisonnement avec sursis et 20000 francs d'amende et au paiement de dommagesintérêts; CA Paris (11e chambre), 16 décembre 1998, arrêt n° 5 : condamnation pour contestationde crime contre l'humanité à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 50 000 francsd'amende et au paiement de dommages-intérêts.
(10) Articles 132-2 à 132-7 du code pénal.
(11) Cass. crim., 12 décembre 2000, pourvoi n° 98-88.202 portant sur l'arrêt n° 1; Cass. crim.,12 décembre 2000, pourvoi n° 98-88.200 portant sur l'arrêt n° 2 ; Cass. crim., 12 décembre2000, pourvoi n° 98-88201 portant sur l'arrêt n° 3 ; Cass. crim., 12 décembre 2000, pourvoin° 98-88.203 portant sur l'arrêt n° 4 ; Cass. crim., 12 décembre 2000, pourvoi n° 98-88.204portant sur l'arrêt n° 5.
(12) Bertrand de Lamy, Juris-Classeur communication, « Révisionnisme », Fasc. 3160. ; Lalutte contre le négationnisme, bilan et perspective de la loi du 13 juillet 1990, Actes du colloquedu 5 juillet 2002 à la cour d'appel de Paris, Documentation française, juin 2003.
(13) Entre autres : Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Handyside c/ Royaume-Uni,7 décembre 1976, série A n° 24, § 49; arrêt Lingens c/ Autriche, 8 juillet 1986, série A n° 103,§ 41 ; arrêt Jersild c/ Danemark, 23 septembre 1994, série A n° 298, § 37.
(14) Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Lehideux et Isorni c/ France, 23 septembre1998, Rec. des arrêts et décision 1998-VII, §§47 et 53, Légipresse, n° 157-III, p. 166, obs.Paul Mathonnet ; RTDH 1999, p. 351, obs. G. Cohen Jonathan ; Rev. Sc. Crim.1999, p. 151,obs. F. Massias ; JCP G 1999, II, 10119, obs. H. Moutouth ; D. 1999, jurisp., p. 223, obs.P. Rolland.
(15) J.-F. Flauss, « L'abus de droit dans le cadre de la Convention européenne des droits del'homme », RUDH, 1992, pp. 464 et s.
(16) Pour une étude complète concernant l'article 17 de la Convention européenne, voir PierreLe Mire, « Article 17 » in La Convention européenne des droits de l'homme, commentairearticle par article, sous la direction de G. Cohen-Jonathan, Economica, 2e édition, 1999, pp. 509-522 ; S. Drooghenbroeck, « L'article 17 de la Convention européenne des droits de l'homme :incertain et inutile ? » in Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ?sous la direction deH. Dumont, P. Mandoux, A. Strowel, F. Tulkens, Bruylant, 2000, pp. 140-197 ; J.-L. Chartier,Code de la Convention européenne des droits de l'homme, Litec, édition 2003-2004,« Article 17 », pp. 329-331 ; J.-F. Flauss, ibid., note 14.
(17) Commission européenne des droits de l'homme, rapport Lawless c/ Irlande, 19 décembre1959, série B, p. 180, § 141, Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Lawless c/ Irlande,Série A, n° 3, p. 45, § 7.
(18) Selon S. Van Drooghenbroeck, ibid.note 15, p. 151 et s., l'article 17 ne serait invocableque pour les droits déduits des articles 8, 9, 10, 11, 14 de la Convention européenne ainsi queles articles 3 du premier protocole additionnel, 2 du quatrième protocole additionnel mais excludes prérogatives consacrées par les articles 2, 3, 4, 5, 6, 7, 13 de la Convention européenneet des articles 1 à 4 du septième protocole additionnel.
(19) S. Van Drooghenbroeck, ibid.note 15, p. 153 et s. ; Commission européenne des droitsde l'homme, rapport De Becker c/ Belgique, 8 janvier 1960, série B, p. 137, § 279.
(20) G. Cohen-Jonathan, « La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme etla position du Comité des droits de l'homme des Nations Unies » in La lutte contre le négationnisme,bilan et perspective de la loi du 13 juillet 1990, Actes du colloque du 5 juillet 2002à la cour d'appel de Paris, Documentation française, juin 2003, p. 79.
(21) Entre autres : Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Young, James et Websterdu 13 août 1981, série A, n° 44 § 63. p. 25.
(22) Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Isorni et Lehideux c/ France, 23 septembre1998, ibid. note 13.
(23) S. Van Drooghenbroeck, ibid.note 15.
(24) Commission européenne des droits de l'homme, décision Parti communiste d'Allemagnec/ Allemagne, 20 juillet 1957, Ann. 1.
(25) Commission européenne des droits de l'homme, décision Glimmerveen et Hagenbeekc/ Pays-Bas, 11 octobre 1979. D.R., 18, p. 187.
(26) Commission européenne des droits de l'homme, décision X c/ République fédéraled'Allemagne, 16 juillet 1982, D.R., 29, p. 202-203 ; décision T. c/ Belgique, 14 juillet 1983,D.R.,34, pp. 164-165 ; décision Ditlieb Felderer c/ Suède, 1er juillet 1985, non publié.
(27) Commission européenne des droits de l'homme, décision Kühnen c/ Allemagne, 12 mai1988, D.R.,56; décision Udo Walendy c/ Allemagne, 11 janvier 1995, D.R., 80-A, pp. 94 ets. ; décision Otto E. F. A Remer c/ Allemagne du 6 septembre 1995, D.R., 82-B, pp. 117 ets. ; décision Gerd Honsik c/ Autriche du 18 octobre 1995, D.R.83-B, pp. 77 et s. ; décisionNational demokratische Partei Deutschand et a. c/ Allemagne, 29 novembre 1995, D.R., 84-B, p. 149 ; décision Pierre Marais c/ France, 24 juin 1996, D.R., 86-A, pp. 184 et s. ; décisionD.I. c/ Allemagne, 26 juin 1996 ; décision Karl-August Hennicke c/ Allemagne du 21 mai 1997 ;décision Herwig Nachtmann c/ Autriche, 9 sept. 1998.
(28) Comité des droits de l'homme, arrêt Faurisson c/ France, 8 novembre 1996, Légipresse,n° 141-II, p. 57 mai 1997, obs. X Tracol, RTDH 1997, pp. 571-597, obs. G. Cohen-Jonathan.
(29) Cass. crim., 12 décembre 2000, pourvoi n° 98-88201 confirmant CA Paris (11e chambre),16 décembre 1998, arrêt n° 3, ibid.notes 9 et 10.
(30) T. correctionnel 27 février 1998 confirmé par CA Paris (11e chambre), CA Paris(11e chambre) 16 décembre 1998, arrêts n° 4 et Cass. crim., 12 décembre 2000, pourvoin° 98-88.203, ibid.notes 9 et 10.
(31) CA Paris (11e chambre) 16 décembre 1998, arrêts n° 4 confirmée par Cass. crim.,12 décembre 2000, pourvoi n° 98-88.203, ibid note 9 et 10.
(32) Entre autres : Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Isorni et Lehideux c/ France,23 septembre 1998, ibid note 13, spécialement § 50 ; arrêt Kemmache c/ France (n° 3),24 novembre 1994, série A n° 296-C, p. 87, § 37.
(33) Entre autres : Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Zana c/ Turquie, 25 novembre1997, recueil 1997-VII, pp.2 547-2548, § 51; arrêt Incal c/ Turquie, 9 juin 1998, Recueil 1998-IV, § 48.
(34) Commission européenne des droits de l'homme, décision Pierre Marais c/ France, 24 juin1996, ibid.note 26.
(35) E. Dreyer, « Le fondement de la prohibition des discours racistes en France », Légipresse,n° 199-II, mars 2003, p. 22.
(36) Crim. 28 avril 1998, 1er arrêt, Légipresse, n° 156-III, novembre 1998, p. 148.
(37) CA Paris (11e chambre), 15 mai 2003, Légipresse, n° 204-III, septembre 2003, pp. 135-138, obs. J.-Y. Dupeux.