La confusion qui a un temps prévalu entre les modes de réparation et les règles de procédure, spécifiques au droit de la presse, et ceux généraux de la responsabilité civile a récemment pris fin et la jurisprudence consacre désormais pleinement la spécialité de la loi sur la presse en matière de responsabilité civile, de procédure et de prescription. Toutefois, la dispersion des compétences juridictionnelles en la matière, renforcée lorsque le délit a été commis sur l'internet, est source d'insécurité et une unification des compétences apparaît nécessaire pour assurer la cohérence et l'autonomie du régime de la liberté de la presse.
(2) Comme l'écrivait Barbier, « c'est la publication qui fait le délit» (code expliquéde la presse, 2e éd., 1911, tome I, n° 243, cité par B. Ader, dans « L'évolutionde la notion de publication : de la presse écrite à Internet » : Légipresse,octobre 1999, 165-II-123). 2. Au visa des articles 1382 et 1383 du code civil, la Cour de cassation avaitestimé que « la faute prévue [par ces articles] peut consister aussi bien dansune abstention que dans un acte positif ; l'abstention, même non dictée par lamalice et l'intention de nuire, engage la responsabilité de son auteur lorsque lefait omis devait être accompli[ ] ». Civ., 27 févr. 1951 (arrêt Branly) : D.1951,329, note Desbois ; GP. 1951, 1, 230, concl. Rey ; JCP. 1951, II, 6193, noteMihura ; S. 1951, 1, 158 ; RTD civ. 1951, 246, n° 9, obs. MM. Mazeaud; Ann.prop. ind.1951, 31, note Me Mathély.
(4) J. Carbonnier, « Le silence et le la gloire » : D.1951, chron. 119.
(5) Par exemple, civ. 2e, 19 janv. 1967 : Bull. civ.II, n° 27 ; civ. 2e, 5 mai 1993 :D.1994, somm. 193, commentaire T. Massis ; civ. 2e, 22 juin 1994, D.1995,somm. p. 268, commentaire T. Massis ; Bull. civ.II, n° 165.
(6) « Possibilité qu'offre à un demandeur la diversité des règles de compétenceinternationale de saisir les tribunaux du pays appelé à rendre la décision la plusfavorable à ses intérêts» (Vocabulaire Juridique de l'Association Capitant, sousla direction de G. Cornu).
(7) Ass. Plén., 12 juill. 2000 (cinq arrêts) : Légipresse, octobre 2000, 175-III-153(arrêts Collard et Erulin), conclusions de M. le premier avocat général LouisJoinet ; D.2000, n° 44, SC 463, observations P. Jourdain.
(8) Civ. 2e, 24 janv. 1996 : D.1997, jurispr. p. 268, note J. Ravanas ; CA Paris,1re ch. B, 12 mai 2000 : D.2000, jurispr. p. 796, commentaire D. Boccara.
(9) Civ. 2e, 8 mars 2001 (deux arrêts) : Gaz. Pal.du 17 au 19 juin 2001, p. 17 ;v. le rapport de M. le Doyen Pierre Guerder et les conclusions de M. l'Avocatgénéral Philippe Chemithe, Petites affiches, 18 mai 2001, n° 99, p. 21, noteE. Derieux ; Légipresse, mai 2001, 181-III-86 ; et civ. 2e, 29 mars 2001 : Petitesaffiches, 14 juin 2001, n° 118, p. 21, note E. Derieux ; Légipresse, avril 2002,n° 190-III-59, note F. Gras.
(10) Rapport de M. le Doyen Pierre Guerder, op. cit.
(11) CA Versailles, 1re ch., 1re section, 22 nov. 2001 : Légipresse, avril 2002,n° 190-I-40 ; LP 190-18
(12) J. Passa, Contrefaçon et concurrence déloyale, Litec, coll. Droit des affaires,série Propriété intellectuelle (Publications de l'IRPI), 1997.
(13) Pour des exemples de requalification par le juge, voir TGI Paris, 1re ch., 28fév. 1994 : Gaz. Pal.2-6 sept. 1994, p. 44; TGI Paris, 1re ch., 1re section, 11 sept.1996 : Légipresse, déc. 1996, 137-I-152 ; TGI Nanterre, 1re ch., section C, 8 juin1999 : Légipresse, déc. 1999, 167-III-172, commentaire B. Ader.
(15) Art. 65 al. 1 de la loi du 29 juillet 1881 : « L'action publique et l'action civilerésultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescrirontaprès trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis oudu jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait»
(19) Civ. 2e, 22 juin 1994: Bull. civ.II, n° 164; D.1995, somm. 264, obs. Dupeux;JCP1994, I, 3809, obs. Viney ; Gaz. Pal.1995, 1, 163, note Bruntz et Domingo.
(20) Civ. 2e, 16 déc. 1999 : D.2000, IR 14.
(21) Art. 53 al. 1 et 3 de la loi du 29 juillet 1881 : « La citation précisera et qualifierale fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite.»« Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite.»Il faut souligner que la nullité de l'alinéa 3 doit être invoquée en première instancein limine litis.
(22) Civ. 8 avr. 1895 : DP1895, 1, 360. Dans le même sens, civ. 29 oct. 1900 :DP1900, I, 37 ; Req. 30 mai 1911 : DP1912, I, 295.
(24) Civ. 2e, 18 mars 1999: Bull. civ.II, n° 52. Voir également civ. 2e, 4 mai 2000:D.2000, IR 164.
(25) Voir à ce sujet l'article de X. Raguin et Ch. Bigot, « De l'opportunité d'unifierles prescriptions en matière de presse » : Légipresse, avril 1999, 160-II-41.
(26) Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomptiond'innocence et les droits des victimes : JOdu 16 juin 2000, 9038-9062.
(27) Notamment les délits prévus aux articles 226-1 et suivants du code pénal,227-18 à 227-24, ou encore 434-16 du même code.
(28) Art. 2270-1 du code civil : « Les actions en responsabilité civile extra-contractuellese prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage oude son aggravation.»
(29) Ces deux nouveaux articles ont été édictés par la loi n° 93-2 du 4 janvier1993, art. 47 et 53. 29. Amendement adopté par le Sénat malgré l'intervention de Robert Badinterqui rappelait qu'« en matière de presse, on ne peut pas dissocier la courte prescriptiondu fait que l'on doit rapporter la preuve préétablie selon des exigencestrès précises et dans un délai très bref. C'est la raison pour laquelle on souhaiteque le procès soit lié, sinon vidé, dans un délai de trois mois parce que,si le temps s'écoule, la preuve de la vérité des faits diffamatoires pourra ne pasêtre conservée par l'auteur de la publication» ( JOSénat, 25 juin 1999, p. 4493et 4494). Cet amendement fut ensuite supprimé par l'Assemblée nationale( JOAN, 10 fév. 2000, p. 1019).
(32) TGI Paris, 17e ch. corr., 13 nov. 1998 : Expertises, janvier 1999, p. 443.
(33) CA Paris, 11e ch. A, 15 déc. 1999 (arrêt Costes) : JCP G,n° 13 du 29 mars2000, jurispr. II, 10 281, p. 587, note P. A. Schmidt et V. Facchina ; Légipresse,mars 2000, n° 169-III-38, note B. Ader.Cette jurisprudence a notamment été suivie par : TGI Paris, 17e ch., 6 déc. 2000 :Légipresse, janv./févr. 2001, n° 178-III-10, note E. Derieux; Expertises, avril 2001,jurispr. p. 153, commentaire de A. Sendra, p. 145; CCE, janv. 2001, p. 23, noteJ.-C. Galloux; D.2001, IR p. 180; et TGI Paris, 17e ch., 16 janv. 2001 : Légipresse,mai 2001, n° 181-I-58.
(34) CA Paris, ch. d'accusation, 2e section, 23 juin 2000 (arrêt Tranchant) :Légipresse, nov. 2000, 176-III-182, note C. Rojinsky.
(35) Crim. 30 janv. 2001 : Bull. crim.n° 27; D.2001, n° 23, jurispr. p. 1833,commentaire E. Dreyer; Gaz. Pal., 6-10 mai 2001, p. 15, note Y. Monnet; Petitesaffiches, 3 avril 2001, n° 66, p. 3, note F.-J. Pansier ; Légipresse, avril 2001,180-III-58, note B. Ader ; CCE, juin 2002, p. 35, note A. Lepage.
(36) Crim. 16 oct. 2001 (arrêt Tranchant) : Bull. crim.n° 211 ; JCP G, 13 février2002, n° 7, p. 350, note P. Blanchetier ; Légipresse, décembre 2001, 187-III-205, note E. Dreyer ; CCE, décembre 2001, p. 30, note A. Lepage.
(37) Crim. 27 nov. 2001 (arrêt Costes) : Légipresse, mars 2002, 189-III-26 ;CCE, février 2002, p. 38, n° 32, note A. Lepage.
(38) Voir par exemple TGI Paris, 17e ch. corr., 26 février 2002 (Amicale des déportésd'Auschwitz et des camps de Haute Silésie c/ Yahoo Inc. et Timothy Koogle):Expertises, juin 2002, p. 236. 38. Art. R. 311-15 du code de l'organisation judiciaire : « L e président du tribunalprend par ordonnance les mesures d'administration judiciaire.»
(40) Voir Annexe : Juridictions compétentes en matière de délits de presse.
(41) Art. 45 de la loi du 29 juillet 1881 : « Les infractions aux lois sur la pressesont déférées aux tribunaux correctionnels, sauf : dans les cas prévus par l'article 23, en cas de crime ; lorsqu'il s'agit de simples contraventions.»
(42) Art. 23 al. 1 de la loi du 29 juillet 1881 : « Seront punis comme complicesd'une action qualifiée crime ou délit ceux qui, soit par des discours, cris oumenaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés,dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support del'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposésdans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affichesexposés au regard du public, soit par tout moyen de communication audiovisuelle,auront directement provoqué l'auteur ou les auteurs à commettre laditeaction, si la provocation a été suivie d'effet.»
(43) Crim. 17 mars 1938 : Bull. crim.n° 79 ; S. 1939, I, 297.
(44) Crim. 1er juin 1967 : Bull. crim.n° 172, p. 408 ; confirmé par T. confl. 6 nov.1967 (arrêt Coutanceau) : Gaz. Pal.1967, 2, 41.
(45) Loi du 11 juin 1887, concernant la diffamation et l'injure commises par lescorrespondances postales et télégraphiques, circulant à découvert : Bull. desLois, 12e S., B. 1095, n° 18042 ; DP1887, 4, 53.
(46) Art. 2 de la loi du 11 juin 1887 : « Les délits prévus par la présente loi sontde la compétence des tribunaux correctionnels.»
(47) Art. 1er de la loi du 11 juin 1887.
(48) Art. R. 321-8 du COJ.
(49) Civ. 2e, 27 juin 1973 : Bull. civ.1973, II, n° 206, p. 164.
(50) Loi du 25 mai 1838, art. 5, 5°: Duvergier 1838, Recueil de lois et décrets, p. 333. 50. Loi du 13 juillet 1905, relative à la compétence des juges de paix, art. 6, 3°.
(52) Ordonnance n° 58-1273 du 22 décembre 1958, relative à l'organisationjudiciaire ; décret n° 58-1281 du 22 décembre 1958, portant application de l'ordonnancen° 58-1273 du 22 décembre 1958 et relatif à l'organisation judiciaire :D.1959, 35 ; BLD 1959, 40.
(53) Art. 6 de la loi du 29 juillet 1982, al. 1 : « Toute personne physique ou moraledispose d'un droit de réponse [ ] » ; et al. 6 : « En cas de refus ou de silencegardé sur la demande par son destinataire dans les huit jours suivant celui desa réception, le demandeur peut saisir le président du tribunal de grande instance,statuant en matière de référés[ ] ».
(54) CA Paris, 27 nov. 1929 ( DP. 1930, 2, 155, note Nast), qui avait décidé quel'article 12 de la loi du 29 juillet 1881 n'était pas applicable aux communicationsaudiovisuelles.
(55) Art. 13 al. 1 de la loi du 29 juillet 1881 : « Le directeur de la publication seratenu d'insérer, dans les trois jours de leur réception, les réponses de toute personnenommée ou désignée dans le journal ou écrit quotidien, sous peine d'uneamende de 3 750 euros [ ]. »
(56) Cf. C. Rojinsky, « L'approche communautaire de la responsabilité des acteursde l'internet » : Expertises, octobre 2000, p. 297.
(57) Loi n° 86-897 du 1er août 1986, portant réforme du régime juridique de lapresse, Art. 1er : « Au sens de la présente loi, l'expression publication de pressedésigne tout service utilisant un mode écrit de diffusion de la pensée mis à ladisposition du public en général ou de catégories de publics et paraissant à intervallesréguliers.»
(58) Dans ce sens, P. Guerder, « Saisine de la juridiction: quelle compétence? »:Gaz. Pal. 12-14 mai 2002, p. 30.
(59) TI Puteaux, 28 septembre 1999 et TI Paris, 11e arr., 3 août 1999: Légipresse,janv. févr. 2000, 168-III-22, note Ch. Bigot, favorable en opportunité à cette décision; TI Puteaux, 28 septembre 1999 : Gaz. Pal., 31 janv. 1999-1er févr. 2000,p. 27, note E. Morain. 60. TI Paris, 20e arr., 22 janvier 2002, inédit, RG n° 11-01-001269.
(62) Art. R. 631-1 du code de la propriété intellectuelle, et art. R. 312-3 du codede l'organisation judiciaire. Les tribunaux en question, pour l'ensemble du territoiremétropolitain et de l'outre-mer, sont les suivants (dans l'ordre alphabétiquedes cours d'appel auxquels ils sont rattachés) : Marseille, Bordeaux,Strasbourg, Lille, Limoges, Lyon, Nancy, Paris, Rennes, et Toulouse.