Accueil > Loi n° 2002-214 du 19 février 2002 modifiant la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion -
Décryptages
01/04/2002
Loi n° 2002-214 du 19 février 2002 modifiant la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion
L'adoption de la présente réforme législative relative à la publication de sondages d'opinion à caractère politique, provoquée notamment par l'arrêt du 4 septembre 2001 de la chambre criminelle de la Cour de cassation (1), a été quelque peu précipitée, dans la perspective des prochaines élections présidentielles et législatives. Il est vrai qu'elle était, depuis longtemps déjà, réclamée par les organismes de sondages euxmêmes.Cela ne peut surprendre. Il s'agit du libre ...
Emmanuel Derieux
Professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris 2)
(2) Cour de cassation, ch. crim., 4 septembre 2001, Ph. Amaury, Légipresse, n° 186-II-183,note B. Ader.
(3) Voir notamment Louvet, M.-N., « Incidence de l'article 10 de la Convention européenne desdroits de l'homme sur la loi française », Le droit de la presse de l'an 2000, Victoires Éditions,pp. 99-108.
(4) La Cour européenne des droits de l'homme semble, bien souvent, faire très peu de cas desdispositions du paragraphe 2 de l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme qui motivent et justifient certaines restrictions à la liberté d'expression. Force estcependant de reconnaître qu'aucune des raisons d'intervention des autorités publiques, ici énumérées,ne répond à celles qui ont pu être énoncées (libre choix des électeurs, sérénité duscrutin ) pour justifier les restrictions apportées à la diffusion des sondages d'opinion. Dansune réactualisation de ces dispositions, la solution n'aurait-elle pu consister à chercher à obtenirque soit rajoutée une telle raison, plutôt que de s'incliner devant les dispositions existanteset bien souvent ignorées sinon bafouées ?
(5) Cet aspect avait déjà été retenu, en première instance, par les juges qui avaient considéréque « dès lors que les sondages, publiés à l'étranger en toute légalité, sont connus grâce auxmoyens actuels de communication et notamment grâce à internet, par des milliers d'électeursfrançais, l'interdiction de diffusion de ces informations par les médias nationaux pendant lasemaine précédant le scrutin ne constitue plus une mesure nécessaire dans une société démocratiquepour assurer la liberté des élections et la sincérité du scrutin» (TGI Paris, 17e ch., 15 décembre1998, Min. public c. Ph. Amaury, Légipresse, n° 158-III-15, note E. Derieux)
(6) Dans l'appréciation qu'elle a eue à faire de l'application de la législation française relative auprix du livre, à des livres édités en France et réimportés d'un des États membres de l'Unioneuropéenne, la Cour de justice des Communautés européennes, dans son arrêt du 10 janvier1985, prit en compte « les cas où des éléments objectifs établiraient que les livres en causeauraient été exportés aux seules fins de leur réimportation dans le but de tourner» la législation(CJCE, 10 janvier 1985, Ass. Centres Leclerc c. Sté Au blé vert, inDerieux, E., Droit de la communication.Droit européen et international. Recueil de textes, Victoires Éditions, pp. 59-62).Dans l'arrêt TV 10, la Cour de justice des Communautés européennes a considéré « qu'un Étatmembre peut considérer comme un organisme national de radiodiffusion un organisme de radioet de télévision qui s'installe dans un autre État membre dans le but d'y prester des services destinésà son territoire, car cette mesure a pour objet d'empêcher que, à la faveur de l'exercice deslibertés garanties par le Traité, les organismes qui s'établissent dans un autre État membre puissentse soustraire abusivement aux obligations découlant de la législation nationale» (CJCE, 5 octobre1994, TV 10 et Commissariat voor de Media, in Derieux E., Droit de la communication, Droiteuropéen et international, Recueil de textes, Victoires Éditions, pp. 83-85).