L'arrêt qui nous est présenté concerne un domaine nouveau pour la Cour européenne des droits de l'homme (1) : le débat en matière historique. Ce domaine est particulièrement sensible puisque, portant sur les événements de la Seconde Guerre mondiale, il fait l'objet de diverses entreprises visant à mettre en cause les valeurs essentielles sur lesquelles la démocratie moderne s'est construite au lendemain du conflit mondial. Parmi ces valeurs, les principes de dignité et de ...
Cour européenne des droits de l'homme, 23 septembre 1998, Lehideux et Isorni c/ France
Paul MATHONNET
Allocataire de recherche de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
(3) Voir entre autres Cour européenne des droits de l'homme (CEDH),7 décembre 1976, Handyside c/ Royaume-Uni, série An° 24, § 49 ; 8 juillet 1986, Lingens c/ Autriche, série A n° 103,§ 41 ; 23 septembre 1994, Jersild c/ Danemark, série A n° 298,§ 37.
(4) Outre la substance des idées et informations exprimées, l'article10 protège aussi leur forme d'expression, voir entre autres CEDH,24 février 1997, De Haes et Gijsels c/ Belgique, § 48 ; 20 mai 1998,Schöpfer c/ Suisse, § 33.
(5) § 47 : « la catégorie des faits historiques clairement établis tell'Holocauste dont la négation ou la révision se verrait soustraite par l'article17 à la protection de l'article 10 ». Plus loin, § 53, la Cour associe àce domaine l'apologie d'une politique pronazie. Il s'agit de la suite logiquede l'attachement de la Cour à : « la lutte contre la discrimination racialesous toutes ses formes et manifestations », CEDH,23 février 1994, Jersil c/ Danemark, série A n° 298, § 30.
(6) Commission européenne des droits de l'homme,24 juin 1996, Pierre Marais c/ France, D.R. 86-A, p. 184 ; 6 septembre1995, Remer c/ Allemagne, D.R., 82-A p. 117 ; 29 novembre 1995,Nationaldemokratische Partei Deutschlands, D. R., 84-A, p. 149.
(7) Cf. Légipresse, n° 141-II, p. 57, l'affaire Faurisson devant le Comitédes droits de l'homme des Nations unies.
(8) L'article 24 bisde la loi du 29 juillet 1881 : « peut conduire, dans des circonstancesdifférentes de celles de la présente affaire à adopter des mesuresincompatibles avec le Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques » ; voir Cohen-Jonathan (G.), Négationnisme et droits del'homme, Revue trimestrielle des droits de l'homme 1997, p. 571 sqq.
(9) Commission européenne des droits de l'homme, 24 juin 1996, PierreMarais c/ France, précité, p. 190.
(10) Voir Lambert (P.), Les restrictions à la liberté de la presse et la marged'appréciation des États au sens de la jurisprudence de Strasbourg,Revue trimestrielle des droits de l'homme, 1996, p. 143 sqq.
(11) En ce qui concerne la morale, voir entre autres, CEDH, 7 décembre1976, Handyside c/ Royaume-Uni, précité, § 51 ; 24 mai 1988,Müller et autres c/ Suisse, série A n° 133, § 36. En ce qui concerne lesentiment religieux, voir entres autres CEDH, 20 novembre 1994, OttoPreminger Institut c/ Autriche, série A n° 295-A ;25 novembre 1996, Wingrove c/ Royaume-Uni, Revue trimestrielledes droits de l'homme, 1997, p. 713 sqq., commentaire J.M. Larralde.
(12) Kastanas (E), Unité et diversité, notions autonomes et marge d'appréciationdes États dans la jurisprudence de la Cour européennedes droits de l'homme, Bruylant, 1996, p. 257 sqq.
(13) Le principe de subsidiarité implique, selon la Cour elle-même, queles autorités nationales sont les mieux placées pour apprécier les faitsen cause et pour choisir les moyens les plus adaptés pour atteindre lebut poursuivi en conformité avec la convention.