Saisi sur question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel prononce la conformité, sans réserve, de l'applicabilité de la comparution immédiate, en vertu de l'article 397-6, alinéa 2, du code de procédure pénale, aux infractions de l'article 24 (provocation et apologie principalement), à la contestation de crimes contre l'humanité (art. 24 bis) et aux injures racistes et sexistes (art. 33, al. 3 et 4), ainsi que la conformité, avec réserve, de l'exclusion des exigences spéciales en matière de réquisitions, en vertu de l'article 65-3, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881 (pour certains délits de provocation, d'apologie de crimes, de contestation de crimes, de diffamation ou d'injure, les dispositions de l'article 65 de la même loi, qui impose l'exigence d'articulation et de qualification des faits dans les réquisitions aux fins d'enquête, ne s'appliquent pas).
Le 17 mai 2024, le Conseil constitutionnel a rendu trois importantes décisions en matière de droit de la presse et, plus largement, de la communication. La première a permis de valider l'essentiel de ce qui allait devenir la loi n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique(1). La deuxième a déclaré non conforme à l'article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (dont découle le principe selon lequel nul n'est tenu de ...
Conseil Constitutionnel, 17 mai 2024, n° 2024-1088 QPC
Evan Raschel
Professeur à l'Université Clermont Auvergne - Directeur adjoint du Centre ...
1er juillet 2024 - Légipresse N°426
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(1) Cons. const. 17 mai 2024, n° 2024-866 DC, non-conformité partielle, Légipresse 2024. 273 et les obs. ; AJDA 2024. 1048 ; D. 2024. 965, et les obs.
(2) Cons. const. 17 mai 2024, n° 2024-1089 QPC, effet différé de l'abrogation, avec réserve transitoire, v. le commentaire, p. XXX ; D. 2024. 967.
(3) Cons. const. 17 mai 2024, n° 2024-1088 QPC, Légipresse 2024. 283 ; D. 2024. 966.
(4) V. en jurisprudence not., Cass., ass. plén., 15 févr. 2013, n° 11-14.637, Légipresse 2013. 152, Étude J.-C. Marin et P. Guerder ; D. 2013. 741, obs. S. Lavric, note E. Dreyer ; ibid. 718, point de vue C. Bigot ; ibid. 2487, obs. J. Larrieu, C. Le Stanc et P. Tréfigny ; ibid. 2014. 508, obs. E. Dreyer ; Constitutions 2013. 252, obs. D. de Bellescize ; RSC 2013. 104, obs. J. Francillon ; RTD civ. 2013. 557, obs. P. Deumier ; Civ. 1re, 9 sept. 2020, n° 19-19.196, Légipresse 2020. 536 et les obs. ; ibid. 2021. 177, étude N. Verly ; D. 2020. 1794 ; ibid. 2021. 197, obs. E. Dreyer ; et plus largement C. Bigot, Pratique du droit de la presse, 4e éd., Dalloz, 2023, n° 341.91.
(5) A. Lepage, Les délits d'expression incriminés par le code pénal, Travaux de l'ISCJ, n° 1, Cujas, 2011, p. 171, n° 14.
(6) J.-B. Thierry, La déspécialisation de la procédure pénale applicable aux infractions de presse, AJ pénal 2021. 504.
(7) C. Pr. pén., art. 495 et s. (trib. correctionnel) ; C. pr. pén., art. 524 et s. (trib. de police).
(8) CEDH 30 mars 2023, n° 71244/17, Diémert c/ France, § 37, Légipresse 2023. 203 et les obs. ; ibid. 341, étude C. Bigot ; ibid. 2024. 125, obs. N. Verly.
(9) Pour rappel, le Conseil constitutionnel a décidé en 1971 (Cons. const. 16 juill. 1971, n° 71-44 DC, Liberté d'association) de consacrer cette nouvelle catégorie de normes constitutionnelles à partir de l'al. 1er du Préambule de la Constitution de 1946 (qui « réaffirme solennellement […] les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ») auquel se réfère le Préambule de la Constitution de 1958.
(10) D'abord, que le principe trouve un ancrage textuel dans une ou plusieurs lois adoptées sous un régime républicain antérieur à 1946 ; ensuite, qu'il n'ait jamais été dérogé à ce principe par une loi républicaine antérieure à l'entrée en vigueur de la Constitution de 1946.
(11) V. en ce sens, C.-É. Sénac, Y a-t-il encore place pour la découverte de nouveaux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ?, Titre VII 2022/1, n° 8, p. 27.
(12) V. toutefois, censurant le même jour le délit d'outrage en ligne pour l'atteinte disproportionnée causée à la liberté d'expression, Cons. const. 17 mai 2024, n° 2024-866 DC, préc., § 79.
(13) E. Dreyer, Droit de la communication, 2e éd., LexisNexis, 2022, n° 24 : le contrôle constitutionnel « paraît en retard par rapport à celui qui s'exerce à Strasbourg ».
(14) V., pour l'applicabilité de la comparution immédiate aux outrages (C. pén., art. 433-5 et 434-24) qui ne sont ni des délits de presse ni des délits politiques, Crim. 5 mars 2024, n° 23-84.813, Légipresse 2024. 149 et les obs.
(15) C. pr. pén., art. 397-6, al. 1er.
(16) C. pén., art. 421-2-5 ; v. E. Dreyer, L'opportunité d'une sortie des infractions de presse de la loi du 29 juillet 1881 au regard d'un exemple précis : le cas du délit d'apologie du terrorisme et de provocation aux actes de terrorisme, in N. Droin et W. Jean-Baptiste (dir.), La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ?, LGDJ, 2017, p. 37 et s.
(17) C. pr. pén., art. 395.
(18) Et enfin au prétendu PFRLR mentionné supra, qui ne fut pas reconnu par le Conseil.
(19) Loi du 29 juill. 1881, art. 65-3, al. 1er.
(20) Loi du 29 juill. 1881, art. 65-4.
(21) Cons. const. 12 avr. 2013, n° 2013-302 QPC, consid. 6, Légipresse 2013. 269 et les obs. ; ibid. 350, Étude B. Ader ; D. 2013. 1526, note E. Dreyer ; AJ pénal 2013. 410, obs. J.-B. Perrier ; Constitutions 2013. 248, obs. D. de Bellescize ; RSC 2013. 910, obs. B. de Lamy.
(22) Pour des précisions sur cet alinéa, v. E. Raschel, La procédure pénale en droit de la presse, Gaz. Pal. 2019, §§ 118 et s.
(23) Sont également concernées, par renvoi de l'art. 65-4 de la loi sur la presse, les contraventions de presse (diffamations, injures et provocations non publiques commises avec un mobile discriminatoire prévues dans le code pénal).
(24) L. Saenko, La modification des règles de prescription en matière de presse, Gaz. Pal. 25 avr. 2017, p. 1322 et s., spéc. p. 1324.
(25) Crim. 20 juin 2006, n° 05-86.690,D. 2006. 2212 ; AJ pénal 2006. 372.