La Cour de cassation casse l'arrêt ayant relaxé Éric Zemmour, qui avait déclaré que « Pétain a sauvé des juifs français », du chef de contestation de crimes contre l'humanité. Elle note qu'il est indifférent que Philippe Pétain n'ait pas été condamné pour un ou plusieurs crimes tels qu'ils sont définis à l'article 6 du statut du Tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945, pour que le délit soit constitué. De plus, la cour d'appel n'a pas procédé à une analyse exhaustive des propos poursuivis. Enfin, la cour aurait dû mieux expliquer, en examinant le contexte, en quoi les propos reprochés faisaient écho à des propos plus mesurés qu'Éric Zemmour aurait exprimés antérieurement.
Le 21 octobre 2019, lors de l'émission « Face à l'info » diffusée en direct à 19 heures sur CNews, rediffusée le jour même à 23h25 et en « vidéo à la demande » sur le service Replay du site internet de la chaîne, le chroniqueur phare du programme, célèbre polémiste (et aujourd'hui homme politique) est interpellé par son contradicteur sur des propos qu'il a tenus en 2014 dans divers supports écrits et audiovisuels, selon lesquels Philippe Pétain aurait « sauvé les ...
Cour de cassation, (ch. crim.), 5 septembre 2023, UEJF et a.
Thomas Besse
Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles, université de ...
6 novembre 2023 - Légipresse N°418
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(1) TJ Paris, 4 févr. 2021, n° 20023000020, Légipresse 2021. 74 et les obs. ; ibid. 2022. 253, obs. N. Mallet-Poujol.
(2) Paris, 12 mai 2022, n° 21/02860, Légipresse 2022. 278 et les obs. ; ibid. 427, étude T. Hochmann ; ibid. 2023. 119, étude E. Tordjman, O. Lévy et S. Menzer ; ibid. 241, étude N. Mallet-Poujol.
(3) Les associations poursuivantes, victorieuses à ce stade de la procédure, ont d'ores et déjà entrepris d'enfoncer le clou en faisant publier le texte de leur plaidoirie devant la Cour de cassation (M. Ghnassia, Pétain « sauveur » des juifs : le texte de la plaidoirie des parties civiles contre Zemmour », La Règle du jeu, 8 sept. 2023).
(4) T. Hochmann, Dire du bien de Pétain, Légipresse 2022. 427.
(6) P. 9 de l'arrêt. Cette indication, comme le souligne l'avocat général, P. Lemoine, dans ses conclusions sur le pourvoi formé en l'espèce (p. 26), est partiellement erronée : Pétain fut déclaré coupable d'intelligence avec l'ennemi et de haute trahison.
(7) Arrêt commenté, pt 21.
(8) E. Dreyer, Persistance du révisionnisme : on ne conteste pas la rafle du Vel d’Hiv !, RSC 2021. 103.
(9) V. not., les contributions de J.-L. Nadal et B. Jouanneau in AFHJ, CNCDH, ENM, La lutte contre le négationnisme. Bilan et perspectives de la loi du 13 juillet 1990 tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe, actes du colloque du 5 juill. 2002 à la Cour d'appel de Paris, Doc. fr., 2003 ; P. Wachsmann, Liberté d'expression et négationnisme, RTDH 2001. 585 ; B. Beignier, « De la langue perfide, délivre moi… », Réflexions sur la loi du 13 juillet 1990 dite « loi Gayssot », in Pouvoir et liberté. Études offertes à Jacques Mourgeon, Bruylant, 1998, p. 497-533, spéc. p. 531.
(10) L'article 6 du statut du Tribunal militaire international étend ainsi la responsabilité des crimes relevant de sa compétence matérielle aux « dirigeants, organisateurs, provocateurs ou complices qui ont pris part à l'élaboration d'un plan concerté ou d'un complot pour commettre l'un quelconque » de ces crimes. De même, l'article 25 du statut de Rome de la Cour pénale internationale évoque, au titre de la responsabilité pénale individuelle pour les crimes relevant de la compétence de la Cour, la commission des crimes autant que leur complicité par aide, instigation ou toute autre forme de contribution.
(11) Crim. 24 mars 2020, n° 19-80.783, Légipresse 2020. 273 et les obs. ; ibid. 362, étude T. Hochmann ; ibid. 2021. 112, étude E. Tordjman et O. Lévy ; RSC 2021. 103, obs. E. Dreyer.
(12) F. Marchadier (dir.), Le Rôle normatif de la Cour de cassation, Étude annuelle, Cour de cassation, 2018, 345 p., spéc. p. 306.
(13) Crim. 5 août 1831, Bull. crim. n° 176.
(14) T. Besse, La Pénalisation de l'expression publique, Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, coll. « Thèses », t. 187, 2019, nos 168 et s.
(15) B. de Lamy, La Liberté d'opinion et le droit pénal, LGDJ, coll. « Bibl. sc. crim. », t. 34, 2000, n° 567.
(17) TGI Paris, 17e ch. corr., 18 avr. 1991, RTDH 1991. 441, obs. D. Batselé, M. Hanotiau et O. Daurmont.
(18) Crim. 17 juin 1997, n° 94-85.126, D. 1998. 50, note J.-P. Feldman.
(19) Crim. 27 mars 2018, n° 17-82.637, Légipresse 2018. 253 et les obs. ; D. 2019. 216, obs. E. Dreyer.
(20) Crim. 29 janv. 1998, n° 96-82.731 ; Crim. 12 sept. 2000, n° 98-88.202 ; Crim. 19 oct. 2021, n° 20-84.127, Légipresse 2021. 520 et les obs. ; ibid. 2022. 188, étude E. Tordjman, O. Lévy et J. Sennelier ; ibid. 253, obs. N. Mallet-Poujol ; RSC 2022. 75, obs. E. Dreyer.
(21) Récemment encore, s'agissant du même prévenu en matière de provocation à la haine raciale et d'injure raciste, v. Crim. 21 févr. 2023, n° 21-86.068 P, Légipresse 2023. 142 et les obs. ; ibid. 227, étude T. Hochmann ; D. 2023. 397 ; AJ pénal 2023. 144 et les obs.
(22) V. not., Crim. 12 sept. 2000, n° 98-88.200 et n° 98-88.202.
(23) L'avis de l'avocat général sur le pourvoi comporte, à ce titre, un rappel historique extrêmement détaillé (p. 5-16) de la participation du régime de Vichy à l'entreprise génocidaire nazie.
(24) E. Dreyer, Droit de la communication, 2e éd., LexisNexis, 2022, n° 1184.
(25) V. les indications de l'avocat général, P. Lemoine, dans ses conclusions sur le pourvoi, p. 32.
(26) R. Herreros, Éric Zemmour met « au défi » les historiens de le contredire sur Vichy, ils le prennent au mot », Huffpost, 8 sept. 2023.