Le tribunal rappelle que l'action en nullité pour cause de déceptivité a vocation à sanctionner un signe trompeur au regard des produits et services désignés, au terme d'une appréciation in abstracto, lorsque l'action en déchéance vient sanctionner l'usage déceptif d'une marque.
Aux termes des articles L. 711-2, 8°, et L. 714-6 du code de la propriété intellectuelle, la déceptivité est respectivement appréhendée comme un motif absolu de rejet et de nullité, ainsi que comme une cause de déchéance(1). D'apparence simple, la frontière entre ces sanctions n'a, toutefois, pas toujours été aisée à délimiter pour la jurisprudence, les « malentendus »(2) étant nombreux sur le sujet. Il est dès lors heureux de noter que le jugement du Tribunal judiciaire ...
Tribunal judiciaire, Paris, (3e ch. 2e sect.), 21 janvier 2022, Sté La Distillerie c/ Sté Maunier 1986 et al.
Yann Basire
Maître de conférences au CEIPI et Directeur général du CEIPI
12 avril 2022 - Légipresse N°401
2811 mots
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(1) V. sur le sujet, Y. Basire, La tromperie en droit des marques, in Y. Basire [dir.], Consommateur choqué, égaré, trompé, Légipresse 2020, Hors-série no 2, p. 85.
(2) D. Guiu, Nullité/déchéance pour déceptivité et appréciation du risque de confusion : focus (sans concession) sur le jugement du Tribunal judiciaire de Paris du 21 janv. 2022 ; blip.com, 8 févr. 2022, en ligne.
(3) V. sur cette question, les critiques de D. Guiu, op. cit.
(4) Déc. Dir. INPI, 7 sept. 1984, PIBD 1984, III, p. 235 ; Déc. Dir. INPI, 1er mars 1988 ; Paris, 12 mars 1997, RIPIA 1998, no 192, p. 104 ; OHMI, ch. de rec., 19 nov. 2011, R. 0892/2009-1.
(5) Paris, 12 févr. 1981, Ann. propr. ind. 1981. 32.
(6) TGI Paris, 9 déc. 2016, no 14-16395, PIBD 2017, no 1065, III, p. 91 ; Paris, 24 févr. 2015, no 14-11013 ; EUIPO, gd. ch., 2 mars 2020, n° 1499/2016-G.
(7) Comme tous les autres motifs absolus de refus, v. F. Pollaud-Dulian, La Propriété industrielle, Économica, 2010 ; J. Passa, Droit de la propriété industrielle. Tome 1 : Marques et autres signes distinctifs, dessins et modèles, 2e éd., LGDJ, 2e éd., 2009.
(8) TJ Paris, 3e ch. - 2e sect., 21 janv. 2022, n° 20-00412.
(9) Paris, 1er mars 2016, préc. V., dans le même sens, Rennes, 13 oct. 2015, no 13-03463 (à propos de la marque « Les Galettes de Belle Isle »).
(10) Com. 15 mars 2017, no 15-19.513, JurisData no 2017-004903 ; PIBD 2017, no 1070, III, p. 284 ; Dalloz IP/IT 2017. 403, obs. Y. Basire ; Propr. intell. 2018, no 66, p. 70, obs. J. Canlorbe.
(11) Directives relatives à l'examen des marques de l'Union européenne par l'EUIPO, partie B, section 4, chapitre 8, p. 494.
(12) Ibid, v. par ex., TUE 27 oct. 2016, aff. T-37/16, Caffè Nero, pt 53.
(13) V., par ex., Paris, 19 oct. 2005, no 04-19319, JurisData no 2005- 284133 ; Propr. intell. 2006. 217, obs. X. Buffet-Delmas ; Com. 2 mai 2007, no 05-22.029, JurisData no 2007-038852 ; Gaz. Pal. 2008. 2003, note V. Staeffen (la marque « Premier sur le matin » est jugée déceptive pour des émissions à la radio car elle laissait croire qu'il s'agissait de la station radio la plus écoutée sur cette tranche horaire) ; Com. 30 nov. 2004, no 02-13.561, JurisData no 2004-025929 (à propos de la marque Bel'Morteau pour des saucisses non fabriquées dans la commune de Morteau). V. égal. EUIPO, gde ch., 2 mars 2020, R. 1499/2016-G, La Irelandesa.
(14) V., P. Malaurie, L. Aynès et P. Stoffel-Munck, Droit des obligations, 9e éd., LGDJ, 2017 : la caducité « atteint un acte qui était valable lors de sa formation, mais sans rétroactivité ; elle n'a donc d'effet qu'à compter de la disparition de l'élément qui la provoque. […] Elle tient à un événement indépendant de la volonté de l'auteur de l'acte, faisant disparaître un élément essentiel du contrat, tel que l'objet de l'obligation ».
(15) CPI, art. L. 716-3, al. 5, et RMUE, art. 62, § 1.
(16) Directives relatives à l'examen des marques de l'Union européenne par l'EUIPO, partie D, section 2, p. 1374.
(17) Loi no 91-7 du 4 janv. 1991 relative aux marques de fabrique, de commerce ou de service.
(18) La plus célèbre d'entre elles étant l'arrêt de la Cour d'appel de Paris rendu dans l'affaire Inès de la Fressange, avec le succès qu'on lui connaît (Paris, 15 déc. 2004, préc.). V. égal., TGI Bordeaux, 26 avr. 2016, no 14-01976 (signe « Cantemerle ») ; Rennes, 13 oct. 2015, n° 04-20120 ; TGI Paris, 25 mai 2018, no 15-10851 (marque « Terra Vecchia »).