Il résulte des articles 11 et 28 du code de procédure pénale que les agents ou fonctionnaires auxquels les lois spéciales mentionnées au second de ces textes attribuent des pouvoirs de police judiciaire sont soumis au secret de l'enquête. La présence d'un tiers ayant obtenu d'une autorité publique l'autorisation de capter, par le son ou l'image, fût-ce dans le but d'informer le public, le déroulement des actes d'enquête auxquels procèdent ces agents ou fonctionnaires, constitue une violation de ce secret. Une telle violation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée.
Encourt par conséquent la cassation l'arrêt qui, à propos du contrôle d'un restaurant au cours duquel une équipe de la direction départementale de la protection de la population, composée d'inspecteurs de la santé publique vétérinaire, du ministère de l'Agriculture et de la Concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ayant constaté les infractions au code de la consommation poursuivies, énonce que la présence d'une équipe de télévision munie d'une caméra ne viole ni le secret de l'enquête ni aucune forme prescrite par la loi à peine de nullité et que la société exploitant le restaurant ne justifie d'aucun grief.
Ils sont partout ! Journalistes et caméras ne s'intéressent pas seulement aux enquêtes criminelles. On les retrouve aussi… dans les cuisines d'un restaurant de poissons à la suite d'agents d'une direction départementale de la protection des populations (DDPP) effectuant un contrôle(1). Dès lors que la société exploitant ce restaurant est identifiable, on imagine le tort que peut lui causer la diffusion de l'enregistrement réalisé à cette occasion. A fortiori, quand – comme en ...
Cour de cassation, (ch. crim.), 9 mars 2021, Sté Firh
Emmanuel DREYER
Professeur à l'Ecole de droit de la Sorbonne (Université Paris 1)
24 mai 2021 - Légipresse N°392
3073 mots
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(1) Les directions départementales de la protection des populations sont des services déconcentrés de l'État, constitués dans les préfectures, à partir des anciennes directions départementales des services vétérinaires et des anciennes directions départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
(2) Crim. 24 mars 2020, no 19-80.909, publié au Bulletin ; Légipresse 2020. 212 et les obs. ; ibid. 227, étude E. Dreyer ; D. 2020. 877 ; ibid. 1643, obs. J. Pradel ; RSC 2020. 682, obs. P.-J. Delage ; Dr. pénal 2020. Comm. 134, obs. P. Conte ; Gaz. Pal. 2020, no 29, p. 61, obs. F. Fourment ; Procédures 2020. Comm. 125, obs. A.-S. Chavent-Leclère.
(3) Soit parce qu'il a prolongé une atteinte au secret professionnel, soit parce qu'il a accepté un document soumis à des restrictions de communication sur le fondement de l'article 114-1 du code de procédure pénale (ce qui doit être vérifié, Crim. 11 mars 2020, no 19-84.887, publié au Bulletin ; Légipresse 2020. 405 et les obs. ; D. 2020. 538 ; RSC 2020. 943, obs. H. Matsopoulou ; Dr. pénal 2020. Comm. 107, obs. V. Peltier ; ibid. 131, obs. P. Conte).
(4) V., E. Dreyer et O. Mouysset, Procédure pénale, LGDJ, coll. « Cours », 2016, p. 61 et p. 164 et s.
(5) Crim. 11 juill. 2017, no 17-80.313, Bull. crim. no 208 ; D. 2017. 1532 ; ibid. 2018. 196, chron. B. Laurent, G. Barbier, E. Pichon, L. Ascensi et G. Guého ; AJ pénal 2017. 436, note J.-B. Perrier ; Dr. pénal 2017. Comm. 154, obs. A. Maron et M. Haas ; Gaz. Pal. 2017, no 31, p. 18, note G. Pitti ; Gaz. Pal. 2017, no 36, p. 53, obs. F. Fourment.
(6) Crim. 10 janv. 2017, no 16-84.740, Bull. crim. no 11 ; Légipresse 2017. 72 et les obs. ; ibid. 81, Étude E. Dreyer ; D. 2017. 113 ; ibid. 1676, obs. J. Pradel ; AJ pénal 2017. 140, obs. J.-B. Thierry ; RSC 2017. 334, obs. F. Cordier Gaz. Pal. 2017, no 8, p. 20, note R. Mésa ; ibid. no 16, p. 55, obs. F. Fourment ; CCE 2017. Comm. 25, obs. A. Lepage.
(7) Crim. 9 janv. 2019, no 17-84.026, Bull. crim. no 8 ; Légipresse 2019. 90, obs. E. Derieux ; D. 2019. 74 ; AJ pénal 2019. 144, note A. Dejean de la Bâtie ; JCP 2019. 275, note J. Pradel ; Gaz. Pal. 2019, no 6, p. 17, note R. Mésa ; ibid. no 17, p. 66, obs. F. Forment ; Procédures 2019. Comm. 94, obs. A.-S. Chavent-Leclère.
(8) Crim. 10 janv. 2018, no 17-84.896, Légipresse 2018. 193 et les obs. ; Gaz. Pal. 2018, no 18, p. 44, obs. P. Piot.
(9) La Cour de cassation exigeait auparavant la preuve d'un grief effectif : « La violation du secret de l'instruction, non pas postérieure mais concomitante à l'accomplissement d'un acte de la procédure, ne peut conduire à son annulation que s'il en est résulté une atteinte aux intérêts d'une partie » (Crim. 25 janv. 1996, n° 95-85.560), Bull. crim. no 51 ; Dr. pénal 1996. Comm. 200, obs. A. Maron, excluant que le reportage ait causé grief aux suspects filmés).
(11) Comp., CEDH, gr. ch., 29 mars 2016, n° 56925/08, Bédat c/ Suisse, §§ 49 et s., Légipresse 2016. 206 et les obs. ; RSC 2016. 592, obs. J.-P. Marguénaud ; CEDH 7 juin 2007, n° 1914/02, Dupuis c/ France, § 44, AJDA 2007. 1918, chron. J.-F. Flauss ; D. 2007. 2506, note J.-P. Marguénaud ; RSC 2007. 563, note J. Francillon.
(12) Cons. const. 2 mars 2018, no 2017-693 QPC, §§ 8, 9 et 12, D. 2018. 462 ; ibid. 2019. 1248, obs. E. Debaets et N. Jacquinot ; Constitutions 2018. 188, Décision ; RSC 2018. 997, obs. B. de Lamy.