Promulguées quelques jours avant la fi n de la période considérée dans la Synthèse précédente (1), les dispositions de la loi HADOPI, du 12 juin 2009, bien qu'ayant, avec la lutte contre le téléchargement illégal (2), un tout autre objet principal, consacraient, dans une relation de causes à eff ets réciproques, les services de presse en ligne comme des lieux d'exercice de l'activité de journaliste professionnel. Elles introduisaient, par ailleurs, dans le Code de la propriété intellectuelle, une section nouvelle relative au « droit d'exploitation des oeuvres des journalistes » qui constitue assurément, y compris dans leurs relations avec leurs employeurs, un élément du statut des journalistes. Avec un peu plus de recul, et profi tant des nombreux commentaires dont ces textes ont été l'objet, il est nécessaire d'y revenir brièvement ici. Outre cela, la réforme législative d'importance, que l'on peut également rattacher au statut des journalistes, est celle du 4 janvier 2010, concernant la protection des sources d'information des journalistes et qui, à cette occasion, intervient également sur la défi nition du journaliste. Pour le reste, les apports jurisprudentiels récents continuent de porter sur la question même de la défi nition du journaliste, de l'exercice de l'activité et de la rupture du contrat. Sont ainsi illustrées certaines des imprécisions, incertitudes, diffi cultés d'interprétation du statut des journalistes. Le législateur y apportera-t-il, un jour, rigueur et clarté ? Les dispositions de la loi Cressard, du 4 juillet 1974, sur le statut du journaliste pigiste, et celles de la loi HADOPI, du 12 juin 2009, sur le statut du journaliste en ligne laissent quelques doutes sur ce point. Demeure alors le droit conventionnel, soumis toutefois à la concorde des partenaires sociaux Cela suppose donc que la question soit résolue.
Les éléments particuliers du statut des journalistes peuvent, comme cela fut fait dans les Synthèses précédentes (3), être regroupés autour de trois thèmes essentiels : la défi nition du journaliste (I), l'exercice de l'activité (II), qui permet à un individu de prétendre à ce titre, et, aussi négatif que cela soit, la rupture du contrat (III) qui lie un journaliste à l'entreprise à laquelle il apporte sa contribution (4). L'actualité de la période considérée (1er juillet ...
Emmanuel Derieux
Professeur à l’Université Panthéon-Assas (Paris 2)
1er octobre 2010 - Légipresse N°276
7576 mots
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(2) Derieux, E. et Gras, F., « Statut des journalistes. Juillet 2008 juin 2009 »,Légipresse, octobre 2009, n° 265.II.133-141.2. Derieux, E. et Granchet, A., Lutte contre le téléchargement illégal, Lamy, 2010,266 p.
(4) Derieux, E. et Gras, F., « Statut des journalistes. Juillet 2006 juin 2007 »,Légipresse, octobre 2007, n° 245.II.137-142 ; Derieux, E. et Gras, F., « Statut desjournalistes. Juillet 2007 juin 2008 », Légipresse, octobre 2008, n° 255.II.152-160 ; Derieux, E. et Gras, F., « Statut des journalistes. Juillet 2008 juin 2009 »,Légipresse, octobre 2009, n° 265.II.133-141.
(5) Pour une approche générale, voir notamment : Derieux, E. et Granchet,A., Droit des professionnels , Droit des médias. Droit français, européen etinternational, LGDJ, 6e éd., 2010, pp. 375-450 ; Derieux, E. et Granchet, A., Droitprofessionnel des médias, Le droit des médias, Dalloz, 4e éd., 2010, pp. 75-91.
(6) Ader, B., « Quand le journaliste s'invite dans les lois sur la presse et le droitd'auteur », Légipresse, février 2010.I.19-20 ; Gras, F., « Le journalisme en ligne oula victoire de la tautologie », Légipresse, avril 2010, n° 271.II.53-56.Depuis l'adoption du décret n° 2010-164 du 22 février 2010 modifi ant l'articleR. 311-1 4° du Code de justice administrative, les décisions de la Commissionsupérieure de la carte d'identité de journaliste professionnel, se prononçant parvoie de réclamation à l'encontre des décisions de la Commission de la carte, surla qualité de journaliste professionnel d'un individu, ne sont plus susceptiblesd'un recours direct devant le Conseil d'État, mais doivent d'abord être déféréesau tribunal administratif de Paris, à charge d'appel devant la cour administratived'appel de Paris et d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État.
(7) Où cela n'a pas vraiment sa place puisque cette loi est constitutive du statutdes entreprises de presse, éditrices de publications périodiques impriméessur support papier, mais il est vrai que nombre d'entre elles exploitent aussidésormais, à partir notamment de ce qui a été initialement imprimé, des sitesd'information en ligne !
(8) Versailles, 10 janvier 2008.8. Gras, F., « Le journalisme en ligne ou la victoire de la tautologie », Légipresse,avril 2010, n° 271.II.53-56.
(10) Derieux, E. et Granchet, A., Droit de la communication. Lois et règlements.Recueil de textes, Victoires Éditions.10. Paris, 2 mars 2010, Uni Éditions c/ Rouvière, N° R.G 09/10375.
(12) N° de pourvoi : 07-44254, non publié au Bulletin.
(13) Paris, 26 juin 2007.
(14) N° de pourvoi : 08-43634, non publié au Bulletin.
(15) Paris, 29 mai 2008.
(16) Alleaume, Ch., « Droit d'auteur des journalistes : la révolution en marche »,Légipresse, octobre 2009, n° 265.II.121-127 ; Derieux, E., « Loi du 12 juin 2009. Restrictiondes droits d'auteurs des journalistes », RLDI /51, juillet 2009, n° 1698, pp. 96-102 ; Derieux, E., « Droits d'auteurs des journalistes », Lamy Droit des médias et de lacommunication, Etude 133, novembre 2009, 17 p. ; Derieux, E., « La presse : le droitd'auteur des journalistes. Incidences de la loi du 12 juin 2009 », Institut de rechercheen propriété intellectuelle (IRPI), Créations et inventions de salariés. Rompre avec lesschémas reçus, Litec, 2010, pp. 71-88 ; Derieux, E., « L'exploitation des oeuvres desjournalistes de la presse écrite », Petites affi ches, 30 juillet 2010, pp. 4-0 ; Derieux,E. et Granchet, A., Droits d'auteurs des journalistes, Lutte contre le téléchargementillégal, Lamy, 2010, pp. 154-163 ; Derieux, E. et Granchet, A., « Droit d'auteur desjournalistes », Droit des médias. Droit français, européen et international, LGDJ, 6e éd.,2010, pp. 789-818 ; Drai, L., « La réforme du droit d'auteur des journalistes par la loin° 2009-669 du 12 juin 2009 », Comm. Comm. électr., septembre 2009, pp. 8-12 ;Hassler, Th., « Loi Hadopi et la cession légale des droits d'auteur des journalistes »,RLDI /52, août 2009, n° 1733, pp. 74-79 ; Hassler, Th., « La protection des journalistesauteurs, personnes physiques, lors des cessions de droits, existe-t-elle encore ? »,RLDI /60 , n° 1969, mai 2010 ; pp. 10-13 ; Lapousterle, J., « Droits d'auteur des journalistes: de l'orthodoxie au pragmatisme », Légipresse, mars 2010, n° 270.II.37-44.16. N° de pourvoi : 07-44254, non publié au Bulletin.
(18) Pour une même solution, à la même date : Cass. soc., 16 sept. 2009, n° depourvoi : 07-44275, non publié au Bulletin.
(19) Paris, 20 mai 2008.
(20) Cass. soc., 29 septembre 2009, Mme X. c. Bayard Presse, Légipresse, décembre2009, n° 267.III.241-248, note F. Gras.
(21) Auvret, P., « Commentaire de la loi n° 2010-1 du 4 janvier 2010 relative à laprotection des sources des journalistes », Comm. Comm. électr., avril 2010, pp.8-15 ; Chavagnon, A., « La protection du secret des sources des journalistes :la décevante loi n° 2010-1 du 4 janvier 2010 », Dalloz 2010, p. 275 ; Derieux, E.,« Secret des sources des journalistes. A propos de la loi du 4 janvier 2010 », JCPG 2010, n° 3, 40, pp. 9-11 ; Guedj, A., « Sentiments mitigés autour de la loi du4 janvier 2010 relative à la protection du secret des sources des journalistes »,Légipresse, février 2010, n ° 269.II.19-24.21. Derieux, E., « CEDH et liberté d'expression. Deux ans de jurisprudence(1er juin 2007 31 mai 2009) », RLDI/52, août 2009, n° 1715, pp. 29-39 ; Derieux,E. et Granchet, A., « Protection des sources d'information des journalistes »,Droit des médias. Droit français, européen et international, LGDJ, 5e éd., 2008,pp. 885-911.
(23) Dans son rapport annuel de 1991, intitulé « De la sécurité juridique », leConseil d'État soulignait justement : « Quand le droit bavarde, le citoyen ne luiprête qu'une oreille distraite ». La situation ne s'est pas arrangée depuis, puisquePierre Mazeaud, président du Conseil constitutionnel, relevait, dans ses voeuxau président de la République, en 2005 : « la loi qui tâtonne, hésite, bafouille,revient à bref intervalle sur le même sujet dans un sens ou dans un autre, selon lesréactions réelles ou supposées de la société ».23. Gras, F., « La divulgation de ses sources par un journaliste professionnel »,Légipresse, juillet 2010, n° 274, pp. 178-183.
(25) Légipresse, novembre 2009, n° 266.IV.99-100.
(26) Pour créer, il est vrai, la Press Complaints Commission.
(27) N° de pourvoi : 08-44222, non publié au Bulletin.27. Paris, Pôle 6, 8e ch., 3 juin 2010, SA Nouvelle Sté de Publication c. Corvaisier,N° R.G S 08/10928 ; voir page 312.
(29) Paris, 1re Ch., sect. P, 02 déc. 2008, SA Nouvelle Sté de Publication c. Corvaisier,N° R.G 08/19821