La prévention et l'interdiction imposées à un hébergeur pour empêcher toute nouvelle mise en ligne de l'image contrefaisante, sans même qu'il en ait été avisé par une autre notification régulière pourtant requise pour qu'il ait effectivement connaissance de son caractère illicite et soit alors tenu d'agir promptement pour la retirer ou en rendre l'accès impossible, aboutissent à le soumettre, au-delà de la seule faculté d'ordonner une mesure propre à prévenir ou à faire cesser le dommage lié au contenu actuel du site en cause, à une obligation générale de surveillance des images qu'il stocke et de recherche des reproductions illicites et à lui prescrire, de manière disproportionnée par rapport au but poursuivi, la mise en place d'un dispositif de blocage sans limitation dans le temps.
1. C'est à nouveau par une salve d'arrêts que la Cour de cassation s'est prononcée sur le régime des hébergeurs. En 2010, la Cour avait rendu le même jour quatre arrêts dans les affaires Adwords (1), entérinant l'interprétation de la Cour de justice sur la qualification d'hébergeur (qui ne « joue pas de rôle actif de nature à lui confier une connaissance ou un contrôle des données stockées (2) »). En 2011, la Cour de cassation consacrait par trois arrêts du même jour le « ...
Cour de cassation, 1re civ., 12 juillet 2012, (3 arrêts) Google Inc. Et Google France Pourvois n° 11-15165 et 11-15188, pourvoi n° 11-13666 et pourvoi n° 11-13669
Philippe ALLAEYS
Avocat associé, spécialiste en droit de la propriété intellectuelle, Twelve, ...
(2) Cass. com. 13 juillet 2010, Bull. civ. n° 123, D. 2010.1966, note P. Tréfigny-Goy ;Légipresse 2010 p. 367, note P. Allaeys.
(3) Cjue, 23 mars 2010, aff. C-236/08 à C-238/08, Légipresse 2010.158, noteC. Maréchal.
(4) Cass. 1re civ. 17 février 2011, Bull. civ. I, n° 30, D. 2011.1113, obs. C. Manara,note L. Grynbaum ; Rtd Com. 2011.351, obs. F. Pollaud-Dulian.
(5) Cass. 1re civ. 17 février 2011, Bull. civ. I, n° 31.
(6) Cass. 1re civ. 17 février 2011, Bull. civ. I, n° 32.
(7) Cass. 1re civ. 12 juillet 2012 (arrêt n° 827, pourvois n° 11-15165 et 11-15188formés contre un arrêt CA Paris ch. 5-2, 4 février 2011, RG n° 09/21941).
(8) Cass. 1re civ., 12 juillet 2012 (arrêt n° 828, pourvoi n° 11-13666 formé contreCA Paris, ch. 5-2, 14 janvier 2011, RG N° 09/11729) et Cass. 1re civ., 12 juillet 2012(arrêt n° 831, pourvoi n° 11-13669 formé contre CA Paris, ch. 5-2, 14 janvier2011, RG N° 09/11779).
(9) Le service Google Vidéo a été fermé en 2011 (les procédures étudiéesavaient débuté en 2007) et se différenciait de services plus célèbres commeYouTube et Dailymotion puisque Google Vidéo proposait principalement unservice de moteur de recherche de vidéos.
(10) Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.
(11) V. ce mot in dictionnaire Larousse.
(12) Sauf de manière prospective à l'article 21.
(13) Que l'on retrouve cependant aux articles 6.I.4, 6.I.5, 6.I.8 et 6.II.
(14) V. Questionnaire « Un internet intègre et ouvert : consultation publique surles procédures de notification des contenus illégaux hébergés par des intermédiairesen ligne, et sur la lutte contre ce phénomène », cité infra.
(15) Directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique.
(16) Par exemple : diffamation, contenu à caractère terroriste, contrefaçon,pédopornographie, publicité trompeuse, incitation à la haine ou à la violence.
(17) Cjue, 12 juillet 2011, aff. C-324/09, L'Oréal c. eBay, points 120 à 124.
(18) Conclusions de l'avocat général Jääskinen du 9 décembre 2010 devant laCjue (aff. C-324/09), points 162 et 163.
(19) Cass. 1re civ. 17 février 2011, Bull. civ. I, n° 32.
(20) CA Bordeaux, 10 mai 2012, disponible sur http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3425
(21) À savoir : date, identification complète du notifiant et du destinataire,description des faits litigieux et localisation précise, motifs pour lesquels lecontenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et desjustifications de fait, et copie de la correspondance adressée au fournisseur ducontenu.
(22) Pour un exemple récent, voir : Tgi Paris 3e ch. 1re sect., 29 mai 2012 (RG10/11205) TF1 et al. c. YouTube Llc, qui énonce que la connaissance effectivepeut résulter d'une alerte envoyée par un tiers qui identifierait le contenulitigieux en lieu et place du titulaire.
(23) Pour un débat fourni sur l'appréciation de la recevabilité des demandeurs àinvoquer la responsabilité du prestataire en ligne en raison de l'exploitation decontenu protégé par le droit d'auteur et/ou les droits voisins, v. Tgi Paris, 3e ch.4e sect. 13 septembre 2012, TF1 et al. c. Dailymotion (disponible sur http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3486).
(24) Conformément à la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel(décision n° 2004-496-DC du 10 juin 2004). On retrouve d'ailleurs des exigencessimilaires dans la jurisprudence de droit anglais, par exemple : Arrêt de la HighCourt (Qbd) le 2 mars 2012 dans Tamiz v Google Inc [2012] Ewhc 449.
(25) Cjue, 12 juillet 2011, préc., point 122.
(26) Questionnaire intitulé « Un internet intègre et ouvert : consultation publiquesur les procédures de notification des contenus illégaux hébergés par desintermédiaires en ligne, et sur la lutte contre ce phénomène » disponible enfrançais et accessible à l'adresse suivante : http://ec.europa.eu/internal_market/consultations/2012/clean-and-open-internet%5Fen.htm. Les réponses étaientacceptées entre le 4 juin et le 11 septembre 2012.
(27) Pour un exemple récent jugeant qu'un délai de 5 jours pour retirer unevidéo sur YouTube n'était pas prompt : Tgi Paris 3e ch. 1re sect., 29 mai 2012, préc.
(28) CA Paris 9 avril 2010 et CA Paris 14 avril 2010, Légipresse 2010, p. 144, notrenote.
(29) D. 2012.2071, conclusions C. Petit.
(30) Par exemple : quel peut être l'objet ou le sujet ciblé ? un fichier, un utilisateur,un mot-clé, etc. ?
(31) Ce qui est temporaire doit-il se compter en jours, en semaines, en mois, enannées ? Pour un exemple de mesure temporaire pour une durée de deux ans,v. CA Paris, ch. 1-4, 26 mars 2010 (RG n° 09/12552).
(32) Cjue, 16 février 2012, aff. C-360/10, Sabam c. Netlog, point 44 (et de même,s'agissant d'un fournisseur d'accès à internet, v. Cjue, 24 novembre 2011, aff.C-70/10, Sabam c. Scarlet, point 46), Com. comm. élec., juin 2012, comm. n° 63,p. 31, obs. A. Debet.
(33) V. l'étude de A. Neri, « L'injonction de filtrage rendue à l'égard d'un intermédiaire: une mesure controversée aux conséquences redoutables », Com. comm.élec., janvier 2012, étude n° 3, p. 19.
(34) Cjue, 24 novembre 2011, préc.
(35) Cjue, 16 février 2012, préc.
(36) Directive 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits depropriété intellectuelle, article 3.
(37) Cass. 1re civ., 12 juillet 2012, aff. Snep c. Google (arrêt n° 832, pourvoi n° 11-20358).
(38) Institué par la loi dite « Hadopi » n° 2009-669 du 12 juin 2009, modifiée parla loi n° 2009-1311 du 28 octobre 2009 (dite « loi Hadopi 2 »).
(39) V. déjà en 2001 : « Les services d'intermédiaires peuvent, en particulier dansun environnement numérique, être de plus en plus utilisés par des tiers pour porteratteinte à des droits. Dans de nombreux cas, ces intermédiaires sont les mieux àmême de mettre fin à ces atteintes » (considérant 59, directive 2001/29/CE dite« Dadvsi »).
(40) Cjue, 12 juillet 2011, préc.
(41) V. article 21 « Réexamen »
(42) A. Bensamoun et C. Zolynski, « La lutte contre la contrefaçon sur internet :les sources de l'implication des prestataires techniques », Rldi, octobre 2011,p. 59, Analyse n°2494.