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Liberté d'expression et respect de la vie privée : la cedh conçoit un protocole d'accord
/ Cours et tribunaux


01/04/2012


Liberté d'expression et respect de la vie privée : la Cedh conçoit un protocole d'accord



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L'éditeur d'un quotidien allemand à grand tirage, qui avait publié en une et pages intérieures plusieurs articles, assortis de trois photographies, concernant l'arrestation pour possession de cocaïne d'un acteur de télévision connu, dans un chapiteau du festival de la bière de Munich, fut condamné par les juridictions allemandes. Jugeant en particulier que le droit de l'intéressé à la protection de sa personnalité l'emportait sur l'intérêt du public à être informé, même si la véracité des faits relatés par le quotidien n'était pas contestée, celles-ci prononcèrent l'interdiction de publier à nouveau les articles litigieux. L'éditeur se plaignait, sur le terrain de l'article 10, de cette interdiction.
Examinant si l'ingérence était nécessaire dans une société démocratique, la Cour Edh estime que l'acteur en question était suffisamment connu pour être qualifié de personnage public, élément qui renforce l'intérêt du public à être informé de son arrestation et de la procédure pénale le concernant. Si elle souscrit pour l'essentiel à l'analyse du juge allemand selon laquelle l'intérêt de l'éditeur requérant à la publication des articles litigieux tenait uniquement au fait que l'acteur était l'auteur d'une infraction qui, si elle avait été commise par un inconnu, n'aurait probablement jamais fait l'objet d'un reportage, la Cour rappelle que l'arrestation de l'acteur a eu lieu en public, au cours de la fête de la bière à Munich.
De plus, l'espérance pour l'acteur de voir sa vie privée effectivement protégée était réduite par le fait qu'il avait auparavant révélé des détails sur sa vie privée dans un certain nombre d'interviews. Rien n'indique que l'éditeur n'ait pas mis en balance son intérêt à publier l'information et le droit de l'acteur au respect de sa vie privée.
Ayant obtenu la confirmation des informations par les autorités de poursuite, le requérant n'avait pas de raisons suffisamment fortes de croire qu'elle devait préserver l'anonymat de l'acteur. Il n'a donc pas été démontré qu'elle a agi de mauvaise foi. À cet égard, la Cour note également que toutes les informations révélées par l'éditeur le jour de la publication du premier article ont été confirmées par le procureur à d'autres magazines et chaînes de télévision. La Cour observe en outre que les articles n'ont pas révélé de détails de la vie privée de l'acteur, mais ont principalement porté sur les circonstances de son arrestation et l'issue de son procès. Ils ne comportaient aucune expression injurieuse ni aucune allégation dépourvue de base factuelle. Bien que légères, les sanctions imposées à l'éditeur ont pu exercer un effet dissuasif sur lui. La Cour conclut que les restrictions imposées à ce dernier n'étaient pas raisonnablement proportionnées au but légitime de la protection de la vie privée de l'acteur. Il y a donc eu violation de l'article 10. L'Allemagne est condamnée à verser à l'éditeur requérant 17 734,28 euros pour dommage matériel et 32 522,80 euros pour frais et dépens.

Il est de notoriété publique que la liberté d'expression et le respect de la vie privée ne s'entendent pas. Mais, puisqu'ils coexistent juridiquement et qu'il n'y a pas, entre eux, de hiérarchie normative (1), il est nécessaire de réguler leurs rapports par des principes directeurs. C'est le mérite et l'apport des arrêts rendus le 7 février 2012 par la Cour européenne des droits de l'homme que d'y pourvoir dans un sens didactique. En fait, il faut simplement avoir à l'esprit que ...
Cour européenne des droits de l'homme, Grande ch., 7 février 2012, Axel Springer c/ Allemagne
Grégoire Loiseau
Professeur à l'École de droit de la Sorbonne - Université de Paris 1 ...
 
1er avril 2012 - Légipresse N°293
3167 mots