Les Qpc fondées sur la liberté d'expression devant les juridictions suprêmes sont peu nombreuses. Il est pourtant loisible de dégager trois cas de figure, la distinction découlant de l'articulation entre le contrôle de conventionnalité et le contrôle de constitutionnalité a posteriori.
1 - La liberté constitutionnelle d'expression a-t-elle une utilité dans le cadre de la Qpc ? Une réponse positive paraît commandée par l'actualité : dans sa décision 2011-131 Qpc du 20 mai 2011, Mme Térésa C., le Conseil constitutionnel ne vient-il pas de déclarer qu'une des dispositions de la loi de 1881 sur la presse celle interdisant de prouver la vérité des faits diffamatoires pour des faits qui remontent à plus de dix années était disproportionnée au regard de la ...
Paul CASSIA
Professeur de droit public à l'Université Panthéon-Sorbonne Membre de ...
1er mars 2012 - Légipresse N°292
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(1) * Intervention au colloque « La liberté d'expression : une liberté en mouvement» qui s'est tenu à la Cour de cassation le 27 mai 2011.
(2) « Cette interdiction vise sans distinction, dès lors qu'ils se réfèrent à des faits quiremontent à plus de dix ans, tous les propos ou écrits résultant de travaux historiquesou scientifiques ainsi que les imputations se référant à des événements dont lerappel ou le commentaire s'inscrivent dans un débat public d'intérêt général ; que,par son caractère général et absolu, cette interdiction porte à la liberté d'expressionune atteinte qui n'est pas proportionnée au but poursuivi ; qu'ainsi, elle méconnaîtl'article 11 de la Déclaration de 1789 ».
(3) CC 11 oct. 1984, n° 84-181 DC : la liberté d'expression est « d'autant plusprécieuse que son exercice est l'une des garanties essentielles du respect des autresdroits et libertés et de la souveraineté nationale ».
(5) CE 9 juillet 2010, Pitté, n° 337320 ; CE 13 oct. 2010, Sté Betclic entreprises Ltd,n° 342142.
(6) Par ex. : Crim. 24 juin 1920, DP 1920. 1. 48.
(7) Cjue, 22 juin 2010, aff. jtes C-188/10 et C-189/10.
(8) Rapport n° 2838 du 5 octobre 2010 : « Si la Cour de cassation a refusé detransmettre des questions prioritaires de constitutionnalité portant non pas sur letexte d'une disposition législative mais sur sa propre jurisprudence, elle n'a fait que seconformer strictement à la lettre de la loi et à l'intention du législateur organique ».
(9) CE 9 avril 2010, Matelly, n° 312251, à mentionner au Lebon.
(11) Tgi Paris 21 janvier 2011, Bessis, n° 1009908286.
(12) Concl. D. Hédary sur CE 9 juillet 2010, Pitté, n° 337320.
(13) Ajda 2010, p. 1013, concl. A. Courrèges.
(14) Déc. CC 2010-3 Qpc du 28 mai 2010, rejetant au fond le grief tiré de laviolation de la liberté d'expression.
(15) N° 10-90.126.
(16) V. déjà : Crim. 7 nov. 1995, inédit : si l'article 10 Conv. Edh reconnaît en sonpremier paragraphe à toute personne le droit à la liberté d'expression, ce texteprévoit en son second paragraphe que l'exercice de cette liberté comportantdes devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités,conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent, dansune société démocratique, des mesures nécessaires, notamment, à la protectionde la morale et des droits d'autrui ; tel est l'objet de l'article 24 bis de la loidu 29 juillet 1881.
(17) Le Conseil constitutionnel considère que ce principe est respecté dès lorsque l'infraction est définie « dans des conditions qui permettent au juge, auquelle principe de légalité impose d'interpréter strictement la loi pénale, de se prononcersans que son appréciation puisse encourir la critique d'arbitraire ».
(18) Imprécision au demeurant relevée en creux dans le rapport n° 428 du13 avril 2011 du Sénat sur la proposition de loi tendant à réprimer la contestationde l'existence du génocide arménien : on y lit en effet, à propos de cetteproposition de loi, que celle-ci présente un risque d'inconstitutionnalité car« le terme contestation, dont le champ est plus large que celui de négation, peutdonner lieu à diverses interprétations : parfois employée comme synonyme dediscussion, la «contestation peut en effet porter sur l'ampleur, les méthodes, leslieux, le champ temporel du génocide, sans forcément nier, au terme de l'analyse etde manière générale, qu'il y en ait eu un ».
(19) Crim. 8 juin 2004.
(20) Crim. 16 mars 1993 ; crim. 3 juillet 1996.
(21) B. Beignier, dir., Traité de droit de la presse et des médias, Litec, 2009, no 789.
(22) Cour Edh 7 nov. 2006, Mamère c. France, req. no 12697/03, Rec. Ced h, p. 2006-XIII, § 24 : la loi française interdisant de rapporter cette preuve lorsque les faitsen question remontent à plus de dix années ne répond pas à l'exigence deproportionnalité, spécialement lorsque l'écoulement du temps apporte denouvelles lumières sur des faits historiques ou scientifiques.
(23) P. Wachsmann, Liberté d'expression, J-Cl. Libertés, 2008