Dès son entrée en vigueur en mars 2010, il ne faisait pas de doute que le nouvel instrument constitué par la question prioritaire de constitutionnalité allait ouvrir des perspectives particulièrement prometteuses en droit de la presse (1). Les plaideurs n'ont effectivement pas manqué de se saisir de ce nouveau mécanisme. Alors que la Qpc a été instituée pour rendre les libertés fondamentales plus effectives, elle comporte paradoxalement le danger d'une remise en cause des fragiles équilibres de la loi sur la presse, de nature à entraîner un recul d'une liberté constitutionnelle. Après deux années d'application, le temps est venu, à la lumière de cet enjeu, de dresser un premier bilan et de dégager dans ses grandes lignes la philosophie qui a guidé les juridictions judiciaires juges du fond et Cour de cassation et les sages de la rue Montpensier.
La loi du 29 juillet 1881, en ce qu'elle est précisément destinée à réglementer une liberté intégrée dans le bloc de constitutionnalité, essentiellement proclamée par l'article 11 de la Ddhc, avait une vocation naturelle à être mise à l'épreuve d'un contrôle de constitutionnalité.La liberté d'expression et de communication est en effet considérée par le Conseil constitutionnel comme « d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des ...
Christophe Bigot
Avocat au Barreau de Paris
1er mars 2012 - Légipresse N°292
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(2) De manière générale sur la question : P. Cassia, « L'incidence, sur le contrôlede constitutionnalité, des protections conventionnelles de la liberté d'expression», intervention colloque de la Cour de cassation, 27 mai 2011, reproduiteen page 154 de ce numéro ; P. Mbongo, « Droit des médias et Question prioritairede constitutionnalité », Légipresse 2011, n° 283, p. 281 et s. Voir égalementpour une vision plus générale : P. de Montalivet, « Droit constitutionnel de lacommunication », Jclasseur Administratif, fasc. 1465.
(3) Décision n° 2009-580 DC du 10 juin 2009, considérant 15. Motivation reprisepar la décision n° 2012-467 DC du 28 février 2012, cons. 5. Voir aussi la liste desdécisions du Conseil statuant sur le fondement de l'article 11 Ddhc, dressée parG. Lecuyer, « Les enseignements constitutionnels de la décision n° 2011-131Qpc », Légipresse n° 285 p 412.
(4) G. Lecuyer, article précité.
(5) Sur le sujet en général : J. Barthélémy et L. Boré, « Constitution et procèséquitable », Constitutions 2010 p. 67.
(6) Mais d'autres principes constitutionnels sont également mobilisables : voirsur ce point l'article du Prof. Mbongo, précité, spec. p. 283.
(7) Traité de droit de la presse et des médias, sous la direction de B. Beignier, B. deLamy, E. Dreyer, Litec 2009 § 714.
(8) E. Dreyer, Responsabilités civiles et pénales des medias, Litec 2012, § 2 p. 2.
(9) Voir sur ce point les décisions citées dans notre dernière Synthèse annuellede jurisprudence de la Cour Edh, Légipresse 2011, n° 286 p. 511.
(10) Cass. Crim 31 mai 2010 (pourvoi n° 09-87578).
(11) Selon le Conseil constitutionnel en effet, « en posant une question prioritairede constitutionnalité tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité dela portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à cettedisposition » (décision CC n° 2010-96 Qpc du 4 février 2011). Cette position adonné lieu à de très vifs débats au cours des deux années d'application de laQpc.
(12) Voir notamment, Cass. Crim. 7 juin 2011 pourvoi n° 11-90043 ; et Cass. Civ.2e, pourvoi n° 11-40017.
(13) Cass. Crim. 21 juin 2011, pourvoi n° 11-90046.
(14) Cass. crim. 17 janvier 2012, n° 11-90113.
(15) CC n° 2011-164 Qpc du 16 septembre 2011.
(16) Article 45 de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004.
(17) Proposition de loi n° TA 761 adoptée par l'Assemblée nationale le 22 novembre
(2012) Voir Tribune de F. Gras, Légipresse n° 289, p. 649.
(18) Cass. AP 21 décembre 2006, pourvoi n° 00-20493, Jcp 2007-II-10040 noteE. Dreyer, et 10111 note X. Lagarde ; D 2007 p. 835 note P. Morvan.
(19) Cass. Civ.I 23 juin 2011, n° 11-40023.
(20) Cass. Civ. I, 8 décembre 2011, LP 2012, p. 18, n° 290-25.
(21) TI Paris 9e, 17 octobre 2011, Bidalou / Le Figaro, LP n° 289, p. 659.
(22) Cass. Civ 2 14 décembre 2000, Bull. civ. 2000, 2, n° 19 ; D 2001 page 1344note B. Beignier ; Cass. Crim 2 octobre 2001, pourvoi n° 01-81.951 ; Cce 2002,commentaire n° 66, Obs. A. Lepage.
(23) Légipresse 2004, n° 213, p. 53 note B. Tabaka.
(24) Cass. crim., 3 mars 1987 : Jcp G 1987, IV, 163.
(25) Cass. 2e civ., 19 févr. 1997 : Bull. civ. II, n° 44.
(26) Tgi Paris 17e Chambre 9 novembre 2010, n° 1000608141, inédit.
(27) CA PARIS 30 juin 2011, Albin Michel / Neron inédit n° 11/2848.
(28) Décision Qpc 2011-131 du 20 mai 2011 ; Constitutions 2011 p. 388 obs.D. de Bellescize et p. 537 obs A. Darsonville ; Rev. Sc. Crim. 2011 p 401 obsY. Mayaud. Cce 2011, com.57 obs. A. Lepage.Voir sur cette décision : P. Auvret, LeConseil constitutionnel consacre la seule répression de la calomnie, Légipressen° 285, p 407 ; G. Lecuyer, Les enseignements constitutionnels de la décisionn° 2011-131 Qpc, Légipresse n° 285 p. 412.
(29) Cass. crim., 15 mars 2011, pourvoi n° 10-90.129.
(30) Ced h Mamère c/ France 7 novembre 2006, n° 12697/03.
(31) Intervention précitée, voir p. 154 de ce numéro.