Présentée comme un objectif nécessaire pour faire face à la technicité croissante du droit de la propriété intellectuelle, la spécialisation des juridictions ne doit pas se faire au détriment de la sécurité juridique. Pourtant, l'analyse des trois modifications apportées en quatre ans à l'article L. 331-1 du Code de la propriété intellectuelle montre que la question de l'identification de la juridiction compétente est toujours plus épineuse à mesure des interventions législatives.
« Les lois ne sont pas de purs actes de puissance ; ce sont des actes de sagesse, de justice et de raison.Le législateur exerce moins une autorité qu'un sacerdoce.Il ne doit point perdre de vue que les lois sont faites pour les hommes, et non les hommes pour les lois ; qu'elles doivent être adaptées au caractère, aux habitudes, à la situation du peuple pour lequel elles sont faites ; qu'il faut être sobre de nouveautés en matière de législation, parce que s'il est possible, dans une ...
Emmanuel EMILE-ZOLA-PLACE
Docteur en droit, Spécialiste en droit de la propriété intellectuelle et des ...
1er septembre 2011 - Légipresse N°286
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(2) P.-Y. Gautier, « Le titre des lois, symbole de la République », blogdalloz.fr, 24 oct.2006.
(3) Objectif affirmé dans une décision n° 99-421 DC du 16 déc. 1999 et définidans une décision n° 2001-455 DC du 12 jan. 2002, comme l'obligation« d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques», « afin de prémunir les sujets de droits contre une interprétation contraire à laConstitution ou contre le risque d'arbitraire ». Sur ce principe, v. « La qualité de laloi », Les documents de travail du Sénat, Série Études juridiques, sept. 2007.
(4) S. Guinchard, M. Bandrac, X. Lagarde, M. Douchy, Droit processuel, droit commundu procès, Dalloz 1re éd., n° 238 et s.
(5) Rapp. Sénat n° 420 (2006-2007), L. Béteille au nom de la commission des lois,déposé le 26 juill. 2007, p. 35, et Rapp. AN n° 178, Ph. Gosselin, au nom de lacommission des lois, déposé le 26 sept. 2007, p. 43.
(6) Décret n° 2002-215 du 18 fév. 2002.
(7) Article 91 du Règlement CE n° 40/94 du 20 déc. 1993.
(8) Décret n° 2005-1756 du 30 déc. 2005 - Article R. 631-1 et R.631-2 du Cpi(devenu D. 631-1 et D. 631-2).
(9) La loi du 25 mai 1791 portait règlement pour l'exécution de la loi du 7 jan.1791 « relative aux découvertes utiles, et aux moyens d'en assurer la propriété ».
(10) Sur ces questions, v. J.-M. Bruguière et P. Deprez, « De l'art et de la manièrede bien faire les lois et de bien penser la compétence des juges en matière depropriété intellectuelle. L'occasion manquée de la loi du 29 oct. 2007 dite « delutte contre la contrefaçon », Jcp éd. E 2007, act.565.
(11) T. com. Lille, Ord. Réf., 20 déc. 2007, Cce 2008. Comm. 86, note C. Caron.
(12) T. com. Paris, 3 juill. 2008, Cce 2008. Comm. 101, note C. Caron et T. com.Paris, 6 nov. 2008, infirmé par CA Paris 1re ch. D. 11 fév. 2009.
(13) Article 135 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008.
(14) Affirmant la compétence du juge civil : Tgi Nanterre, 1re ch. 25 sept. 2008,RG 08/00577 ; CA Montpellier 2e ch. 16 déc. 2008, RG 08/06404 ; CA Paris, 1re ch.Sect D., 21 jan. 2009, RG 08/19923 infirmant T. Com Paris 9 oct. 2008 ; CA Paris,1re ch. Sect D., 11 fév. 2009, RG 08/21586, infirmant T. Com Paris du 6 nov. 2008.Contra : décidant qu'il était toujours compétent T. com Paris ; 15e ch. 23 oct.2008, Cee jan. 2009, Comm. 3, note C.Caron.
(15) Circulaire Dacg, Crim 08-10/G3 du 11 avril 2008.
(16) La proposition n° 11 de la Commission Guinchard de désigner un Tgipar cour d'appel a été écartée, L'ambition raisonnée d'une justice apaisée, Doc.Française, août 2008, p. 16.
(17) F. Pollaud-Dulian, « Propriétés intellectuelles et travail salarié », Rtd com.
(2001) 273.
(18) Les articles L.1411-1 et 4 du Code du travail affirmant la compétence exclusivedu Cph pour tous les litiges relatifs au contrat de travail.
(19) Par exemple, Tgi Paris, Ord. Jme., 3e ch. 2e Sect. 16 nov. 2007, RG 07/01416,contra sur le rejet de l'exception de compétence au profit du conseil deprud'hommes, v. Tgi Paris, 26 nov. 2008, Cce 2009, comm. no 3, note Ch. Caron.
(20) Soc. 29 avril 1976, Bull. 248 ; CA Paris 14e ch. B 20 mai 1988, SA Bmg, Ariola c/Sirchis Également CA Paris, 18e ch. C, 14 sept. 2000 censurant un jugement duCph qui s'était déclaré incompétent pour connaître d'un litige de résiliation d'uncontrat d'enregistrement au motif qu'il ne comportait pas les caractéristiquesdu lien de subordination.
(21) CA Versailles 11 jan. 1996 Emi c/Consorts Roboly.
(22) CA Paris, 1re ch. D, 19 sept. 2001.
(23) Soc. 21 mai 2008, Rtd com. 2008. 555, obs. F. Pollaud-Dulian, Cce 2008,comm. no 86, note Ch. Caron, Jcp E 2008, 1428, note X.Blanc-Jouvan, Propr. intell.2008, no 29, p. 433, obs. J.-M. Bruguière. Affirmant au contraire l'incompétencedu Cph si le litige est sans lien avec l'exécution du contrat de travail, CA Paris, 4ech. B, 15 fév. 2008, Propr. intell. 2008, no 288, p. 334, obs. J.-M. Bruguière.
(25) Depuis lors, la chambre sociale a été saisie plusieurs fois de litiges opposantartistes ou auteurs à leur employeur sur des questions de droit de la propriétélittéraire et artistique mais dans lesquels la question de la compétence n'étaitpas expressément soulevée, Soc. 6 janvier 2010, n° 08-44117 et Soc. 19 oct.2010, n° 08-45254.
(26) CA Paris, P1-Ch. 4, 18 fév. 2011, 10/10877, également CA Paris 14 mai 2009.
(27) Toute convention contraire étant interdite, la jurisprudence y voit une règled'ordre public, Soc. 8 décembre 1983 Jcp 1984 IV 54, Soc. 12 fév. 1985, Bull. 107.
(29) J.-L. Piotraut, « Les droits de propriété littéraire et artistique à l'épreuve desjuridictions administratives », Rfda 1997.105 et récemment, C. Cottier, « Le jugeadministratif et les litiges sur les oeuvres de l'esprit », Rida jan. 2011, p. 5 et s.
(30) CE, 3 avril 1936, Sudre, n° 40765, Lebon pour la dégradation d'une fontainemonumentale reprochée à une commune sur le fondement de la violation dudroit moral de son auteur, CE, 26 avril 1963, Ministre des Ptt c. Dengrémont, T. confl.15 oct. 1973, Jcp 1974. II. 17663, concl. Braibant et note A. Françon Rida, avr. 1974,p. 52, Rtd com. 1974. 280, obs. Desbois ; T. confl. 6 janv. 1975, D. 1975. 702, notePlouvin, Rtd com. 1975. 846, obs. H. Desbois, CE 5 janvier 1977, Marcuccini et15 avril 1988, n° 00261 et 47686, Lebon.
(31) Le Conseil d'État considère en effet qu'un auteur ne peut prétendre imposerau maître de l'ouvrage une « intangibilité absolue de son oeuvre » ou de l'édificequi l'accueille et qu'il peut toutefois être porté atteinte au droit de l'auteur si lesmodifications apportées à l'ouvrage « sont rendues strictement indispensablespar des impératifs esthétiques, techniques ou de sécurité publique, légitimés par lesnécessités du service public », CE 14 juin 1999, Conseil de Fabrique de la Cathédrale deStrasbourg, n° 181023 et 11 septembre 2006 Agopyan Villes de Nantes n° 265174.
(32) Art. L.111-1 al.3, 121-7-1 et 131-3-1 à L.131-3-3 du Cpi.
(33) CE 27 avril 2011, n° 314577, 10e et 9e sous sections réunies, v. Légipresse n° 284,p. 334. Pour une analyse détaillée de l'apport de l'arrêt à la théorie généraledu droit d'auteur et des droits de la personnalité, v. G.Lecuyer, « Les droits de lapersonnalité au Palais Royal », D. 2011, p. 1945 et s. L'arrêt propose une définitionde l'oeuvre, exerce un contrôle de qualification de l'oeuvre, réaffirme la protectiondes oeuvres orales, propose de soumettre l'entretien au régime des oeuvres decollaboration.
(34) Dans le même sens, CE 2 décembre 2009, n° 302020, reconnaissant au Csala compétence pour veiller au respect de la législation relative à la protectionde la propriété intellectuelle par les services audiovisuels placés sous soncontrôle et, en cas de méconnaissance par ceux-ci de leurs obligations, pourexercer le pouvoir de sanction que lui confèrent les dispositions de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.
(35) V. Légipresse n° 284, p. 335
(36) Rapport 211 AN n° 3112, p. 274.
(37) Proposition de loi n° 525 tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon.
(38) Rapport d'information (2010-2011) Sénat n° 296. Ce rapport recommandaitune spécialisation analogue pour le contentieux pénal de la contrefaçon(recommandation n° 14), non reprise dans la proposition de loi.
(39) Proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon n° 755.
(40) Sur le sujet, v. R.Gassin, « Lois spéciales et droit commun », D., 1961, Chron.p. 91 et s., M.-F. Renoux-Zagamé, « La méthode du droit commun, réflexions sur lalogique des droits non codifiés », Revue d'histoire des facultés de droit, 1990, p. 133et s., F. Grua, « Les divisions du droit », Rtd civ., 1993, p. 59 et s. et en droit d'auteur,V.-L. Bénabou, « Puiser à la source du droit d'auteur », Rida, avril 2002, p. 3 et s.