La révolution qualitative liée à la numérisation des fi lms et donc des salles de cinéma bouleverse les relations qu'entretiennent depuis des années distributeurs et exploitants. En eff et, le coût d'une copie numérique de fi lm est considérablement réduit par rapport aux copies argentiques. Les distributeurs, qui en supportent les frais, vont ainsi réaliser des économies considérables chaque année tandis que les exploitants se retrouvent dans une situation inverse, car le coût d'équipement numérique d'une salle est prohibitif. Or, certaines salles ne pourront passer au numérique sans l'aide de la puissance publique. Le CNC a donc imaginé un projet de fonds de mutualisation public, sur lequel l'Autorité de la concurrence a été amenée à se prononcer par avis le 1er février 2010. Jugeant le système imaginé par le CNC nécessaire mais anticoncurrenciel, l'Autorité a fait des propositions alternatives d'aide à la numérisation des salles. Dans le même temps, l'Assemblée nationale a adopté en en première lecture, le 16 juin 2010, une proposition de loi relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques.
Le cinéma est décidément saisi par le droit de la concurrence. Après le service public d'exploitation cinématographique (1), l'Autorité de la concurrence a été amenée à se prononcer sur un projet d'intervention publique concernant la numérisation des salles de cinéma (2).Le fi lm Cinéma paradisio de Giuseppe Tornatore a immortalisé à travers Philippe Noiret la fi gure du projectionniste de salle de cinéma. Cette image appartiendra bientôt au passé. Progressivement les fragiles ...
Marc Le Roy
Docteur en droit
Chargé d'enseignement à l'Université de Tours et au ...
1er septembre 2010 - Légipresse N°275
6359 mots
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(2) Conseil de la concurrence, avis n° 08-A-13 du 10 juillet 2008 relatif à unesaisine du syndicat professionnel UniCiné portant sur l'intervention des collectivitéslocales dans le domaine des salles de cinéma, CMP 2009, comm. n° 23,note Marc Le Roy.
(3) Autorité de la concurrence, avis n° 10-A-02 du 1er février 2010 relatif à l'équipementnumérique des salles de cinéma.
(4) Sur l'encadrement juridique de ces activités, v. Marc Le Roy, JurisClasseuradministratif, Cinéma, Fasc. 267.
(5) Autre conséquence de la numérisation, les laboratoires chargés de développerles copies argentiques pour les salles de cinéma vont voir leur activitédisparaître.
(6) Le fi lm Avatar a ainsi été tiré à 950 copies alors que certains fi lms peuventêtre tirés à moins de 10 copies.
(7) V. Rapport du groupe de travail sur le modèle économique du cinémanumérique, p. 20, rapport disponible sur le site internet du CNC.
(8) Selon le rapport précité (v. p. 24), l'économie réalisée par les distributeursdevrait atteindre un total de 43,86 millions d'euros par an.
(9) V. Rapp. préc. p. 4.
(10) L'auteur de cette saisine, qui n'est pas le ministre de la Culture qui envisagepourtant l'action publique, illustre toute la dualité du cinéma en France quiintéresse à la fois l'économie et la culture.
(11) « L'Autorité de la concurrence peut être consultée par les commissions parlementairessur les propositions de loi ainsi que sur toute question concernant laconcurrence. Elle donne son avis sur toute question de concurrence à la demandedu gouvernement. »
(12) CE Ass. 31 mai 2006, Ordre des avocats au Barreau de Paris, RJEP 2006,p. 430 concl. Didier Casas ; AJDA 2006, p. 1595 ; DA Août-septembre 2006, p. 21commentaire. Michel Bazex.
(13) Sur ce point, v. Martine Lombard, « À propos de la liberté de concurrenceentre opérateurs publics et opérateurs privés », D. 1994, p. 163.
(14) V. CE Sect. 30 mai 1930, Chambre syndicale du commerce en détail de Nevers,p. 583, S. 1931.3, p. 73 concl. Josse, note Alibert ; V. Sophie Nicinski, « Les conditionsde création d'un service public dans un environnement concurrentiel »,AJDA 2005, p. 2130.
(15) V. CE Sect. 10 février 1988, Mézy, p. 53, D. 1988, S.C ; p. 263 obs. Llorens, pourla création d'un service de thanatopraxie.
(16) CE Sect. 30 mai 1930 Chambre syndicale du commerce en détail de Nevers,préc.
(17) CE Sect. 20 novembre 1964, Ville de Nanterre, rec. p. 563.
(18) CE 7 juillet 2004, Commune de Celoux, Lebon p. 319.
(19) CE 18 mai 2005, Territoire de la Polynésie française, Lebon p. 748, 769 et 983 ;AJDA 2005, p. 2133 note Nicinski ; CAA de Nancy, 14 juin 2007, SAEM Reims Champagnecongrès expo, AJDA 2007, p. 1933 note Clamour.
(20) CE 18 mai 2005, Territoire de la Polynésie française, préc. : « Considérant quela bonne desserte aérienne de la Polynésie française, indispensable à ses relationsavec le reste du monde et à son développement, constitue un intérêt public local ;qu'en jugeant que l'intérêt public ne pouvait s'apprécier au regard des besoins futursdu développement touristique et que seule l'insuffi sance de l'initiative privée étaitsusceptible de justifi er les délibérations litigieuses, la cour administrative d'appel deParis a commis une erreur de droit ».
(21) Citons par exemple Ymagis ou Arts Alliance Media.
(22) Les visas de l'avis en font pourtant mention.
(23) V. CJCE 24 juillet 2003, Altmark Trans GMBH, AJDA 2003, p. 1739 note S. Rodrigues.
(24) CJCE 23 avril 1991, Höfner/Macrotron, Rec. I p. 1979, point 21 ; CJCE 11 septembre1997, Job Centre, Rec.7119.
(25) V. Marc Le Roy, Jurisclasseur administratif, Cinéma, préc.
(26) L'écrémage conduit, dans un secteur concurrentiel, à une surconsommationdes produits subventionnés et une sous-consommation des produits surtarifés(destinés à fi nancer les produits subventionnés) ce qui prive l'opérateurproposant ce service de contrepartie fi nancière. Le fi nancement du servicerepose alors trop lourdement sur les fi nances publiques : v. § 96 de l'avis. Cetype de fi nancement n'est eff ectivement viable qu'en matière de marché nonconcurrentiel de type monopolistique.
(27) Pour un exemple en droit communautaire : CJCE, grande chambre, 8 septembre2009, Liga Portuguesa de Futebol Profi ssional, Bwin International LTD. c/Departamento de Jogos da Santa Casa, AJDA 2009, p. 2184 note Marc Le Roy.
(28) CJCE 19 mai 1993, Paul Corbeau, Rec. I, p. 2533, AJDA 1993, p. 865 noteHamon.
(29) CE 30 juin 2004, Département de la Vendée, p. 277 ; RJEP 2004, p. 487 concl.Collin ; AJDA 2004, p. 2210 note Sophie Nicinski et p. 2309 note Nicolas Charbit ;JCP A 2004, n° 1712 note M.-C. Rouault ; DA 2004, comm. 161 note Michel Bazexet Sophie Blazy.
(30) Sur cette question, v. Marc Le Roy, L'extension de la légalité administrative,Thèse Tours, 2007.
(31) CJCE 27 avril 1994, Commune d'Almelo, D. 1995, p. 17 note Dutheil de laRochère.
(32) CJCE 23 avril 1991, Höfner, aff . C-41/90, Rec. I-01979. Dans le même sens, CJCE19 mars 1991, République française c/ Commission, Rec. p. 1223.
(33) Préc.
(34) CAA Nantes, 29 décembre 2005, M. Daniel Vitteau, AJDA 2006, p. 1289.
(35) Notons que cette solution n'est pas celle admise par le CE dans l'arrêtDépartement de la Vendée ou par les décisions Corbeau ou Ville d'Almélo (préc.).
(36) Voir notamment en matière de liberté publique : CE 19 mai 1933, Benjamin,p. 541 ; S. 1934.3.1, conclu. Michel, note Mestre ; CE Ass. 28 mai 1971, Ministre del'équipement et du logement c. Fédération de défense des personnes concernées parle projet « Ville nouvelle est », p. 409 concl. Braibant ; RDP 1972, p. 454 note Waline.
(37) V. Didier Truchet, Droit administratif, PUF, 2008, p. 215 et s.
(38) L'avis fait référence treize fois à cette notion.
(39) En ce sens, v. Michel Bazex, DA 2010, comm. N° 49.
(40) Comm. Européenne, Livre blanc sur les services d'intérêt général, COM(2004) 374 fi nal, pt 3-3).
(41) Loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste etaux activités postales, JORF du 10 février 2010 page 2321.
(42) Banque, télécoms
(43) L'Autorité admet aussi la possibilité de fi nancement pas un crédit d'impôtaccordé à l'opérateur qui exerce le service universel : v. Ceil. Concurrence, Avisn° 05-A-08, DA 2005, comm. 93.
(44) V. § 153 de l'avis.
(45) Le nouveau projet a été annoncé le 17 février, 15 jours après la décision del'Autorité de la concurrence.
(46) Communiqué de presse du CNC : http://www.cnc.fr/Site/Template/T1.aspx?SELECTID=3790&ID=2722&t=1.
(47) V. supra.
(48) La région Ile-de-France prépare également un projet d'aide.
(49) Une partie des 750 000 euros destinés à la numérisation des biens culturels.