Peu à peu, le droit à l'image des personnes, traditionnellement considéré comme un droit de la personnalité extrapatrimonial, est en passe de devenir un droit objet de commerce. Le juriste ne peut aujourd'hui que le constater : un tel droit subjectif est en genèse. Pour autant, sauf cas particuliers, aucun texte spécifique ne réglemente le pouvoir de l'individu sur la valeur économique de son image. Dès lors, quel est le régime juridique de ce droit? Le pouvoir d'opposition à la diffusion ou de monopole fait songer à une attraction du droit d'auteur. Pourtant, on ne saurait transposer au droit à l'image patrimonial l'intégralité des dispositions applicables au droit d'auteur, et certaines règles doivent trouver leur signification ailleurs.
Théo HASSLER
Avocat au Barreau de Strasbourg. Professeur des Universités
(2) Carbonnier in D. 1950, jp 714; R Lindon, Dictionnaire des droits de la personnalité,Dalloz, 1983, 113.
(3) Paris 24 mars 1965, JCP 1965, 14305.
(4) Paris 7 juin 1983, D. 1985, IR 165, obs Lindon; Fabre-Magnan, « Propriétépatrimoine et lien social », RTD civ 1997, 583 ; Dreyer, « L'image des personnes» Juriscl. Communication, fasc 3750, n° 74 et s.
(5) Par ordre chronologique: Nerson, Les droits extrapatrimoniaux, LGDJ, 1939,n° 215 et s. ; Gaillard, « La double nature du droit à l'image et ses conséquencesen droit positif français », D. 1984, chron. 161; Acquarone, « L'ambiguïtédu droit à l'image », D. 1985, chron 131 ; Goubeaux, Les personnes, LGDJ,1989, n° 315 et s. ; Bertrand, « Un nouveau droit voisin du droit d'auteur : ledroit à l'image », Cah. Dr. auteur 1990, n° 32, 3 ; Serna, « L'image des personneset des biens », Economica, 1997; Bertrand, Droit à la vie privée et droit àl'image privée, Litec 1999 ; Roussineau, « La notion de droit à l'image existe-telleencore?« , CCE 2005, Études 22.
(10) TGI Paris, 27 sept. 2004 (on notera que l'affaire a été jugée le même jour quedans l'affaire Inès de la Fressange), CCE 2004, n° 153, obs. Caron; Tafforeau,« L'Être et l'avoir ou la patrimonialisation de l'image des personnes », CCE 2007,Études n° 7.
(11) Versailles 22 sept 2005, Prop intellec 2006, n° 20, 362 obs. Bruguière ;sous le même arrêt note Bruguière in Légipresse 2006.III. 109.
(12) TGI Paris 28 sept 2006, Légipresse 2006.I. 160.
(13) Voir note 11.
(14) Voir entre autres l'affaire Bordas, Com. 12 mars 1985, JCP 1985, 20400,obs. Bonet et concl. Montanier et l'affaire Ducasse, Com. 6 mai 2003, Propintellec 2003, n° 9, obs. Buffet-Delmas.
(15) L. Marino, « Les contrats portant sur l'image des personnes », CCE 2003,chron, n° 7.
(16) Voir Bruguière, note 10.
(17) Versailles 21 mars 2002, D 2002, 2374, obs. Caron.
(18) Voir supra note 4.
(19) TGI Aix voir supra note 5 ; voir aussi infra note 24 le vieux jugement strasbourgeoisdont la solution implique nécessairement la dualité du droit à l'image.
(21) Voir note 10; Caron, « Les contrats d'exploitation à l'image de la personne »in l'image, Trav. assoc. Henri Capitant, D. 2005, 95, p 106
(22) Voir Bertrand, supra note 4.
(23) Voir par exemple Caron supra note 16.
(24) Voir Bruguière note 10.
(25) Pour d'autres exemples, plus poétiques, signalons un jugement strasbourgeois(4 mai 1949, D. 1950, Somm. 12) dans lequel une personne, en costumefolklorique, dont l'image avait été reproduite sur des cartes postales s'était vueaccorder gain de cause; ou, toujours pour des cartes postales, la reproductiond'un marin (TGI Marseille, 6 juin 1984, D. 1985, IR 323).
(28) Beignier, Les droits de la personnalité, PUF, coll Que sais-je ? n° 73.
(29) Civ 1re 3 mars 1982, n° 80-15904.
(30) Comme le souligne M. Murat, le contrôle de l'image de la personne en droitcivil, in L'image, Trav. assoc. Henri Capitant, Dalloz, 17, p 21 et s., le principede contrôle de l'individu sur son image instaure un droit de péage difficile à gérerau niveau des autorisations et permet des chantages à des fins exclusivementfinancières.
(31) Arrêt Foca, Civ 1re 6 févr. 1996, D. 1997, Somm, 85, nos obs.
(32) Civ 1re 20 févr. 2001 n°98-23471.
(33) Voir par exemple Civ 2e 21 févr. 2006, Légipresse 2006.III. 95, nos obs.
(35) Déjà en ce sens, Bouvard, « La commercialisation de l'image de la personnephysique », in Image et droit, dirigé par P. Bloch, L'Harmattan, 2002, p 386.
(38) TGI Paris, 27 sept 2006, GP 6-10 mai 2007, GP 6-10 mai 2007, p. 16.
(39) Civ 1re 20 mars 2007, Légipresse 2007.I.80.
(40) Voir A et H-J Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, Litec, 3eed, n° 503
(41) La protection de la vie privée et des autres biens de la personne, Bruylant,1990, n° 660 et s.
(42) « La crise d'identité de droits de la personnalité », PA 7 déc. 2004, p. 3.
(43) Ass. plén. 12 juill. 2000, Légipresse 2000.III. 153, concl. av. gén. Jouannet.
(44) Voir Marino, supra note 14.
(45) Edelman, « Esquisse d'une théorie du sujet, l'homme et son image »,D. 1970, chron. 119.
(46) Bouvard, voir supra, note 33, p 392.
(47) En ce sens Ravanas, La protection des personnes contre la réalisation etla publication de leur image, LGDJ 1978, p. 181; Caron, préc. note 20, p. 101.
(48) Tb. Civ. Seine 10 févr. 1903, DP 1905.II. 389. Et plus tard TGI Seine 13 mars1968, GP 1968.1. 379.
(49) La notion fut introduite par H. E. Perreau (« Des droits de la personnalité »,RTD Civ 1909, 501) dès 1909, mais elle ne fut véritablement popularisée queplus tard.
(50) Voir supra note 10.
(51) La doctrine parle de conventions d'exercice du droit et non d'abdication(cession) dudit droit. C'est là une pudeur linguistique, destinée à sauver la face,qui ne trompe pas grand monde. Dans l'affaire Johnny Hallyday (voir supra note10) la formule contractuelle, finement ciselée, ne manque pas d'habileté pouréviter l'écueil : « bien que le nom et l'image d'une personne soient incessibles,s'agissant d'attributs de la personnalité, un artiste peut valablement autoriserleur usage commercial ».
(52) Voir supra note 36.
(53) Voir supra les références aux notes 9, 10, 11, 37, 38.
(54) Caron, voir supra notes 16; Tafforeau voir supra note 9 (n° 12).
(55) Voir supra note 8
(56) TGI Paris 17 nov. 1984, D. 1985, Somm. 164; notes 8, 10, 35.
(57) Voir supra note 38.
(58) Voir supra note 10, 14, 20.
(59) Lepage, Caron, de Mattos, Decocq, Brüning, « De quelques points de rencontreentre le droit et l'émission de télévision Loft Story », CCE 2003, chron14, p. 9.
(60) Voir note 8 et 10.
(61) Voir supra note 8
(62) Voir supra note 38.
(63) Voir supra note 10.
(64) Par exemple la cause de nègre, en matière d'édition, affecte le droit aunom et est donc révocable: Civ 1re 5 mai 1993, RIDA 4/1993, 205; Caron, précnote 20.
(65) Versailles 21 mars 2002, D. 2002, 2374, note Caron.
(67) Paris 7 juin 1983, D. 1985, IR 165, obs. Lindon. Cet arrêt est au reboursde sa solution qui avait été adoptée dans le jugement fondateur du droit à l'image(affaire Rachel) : Trib. civ. Seine, 16 juin 1858, DP 1858.2.62.
(68) Sur cette question voir Roussineau, préc, n° 16.
(69) Grenoble 24 juin 2002, Légipresse 2002.I. 118 ; Aix 21 mai 1991 (arrêtconfirmant sur ce point le jugement dans l'affaire Raimu voir supra note 5 citépar Me Roussineau; TGI Paris 23 oct. 1996, Légipresse 1997.I.11; TGI Paris 22oct. 1997, Légipresse 1998.I. 18.
(70) Voir supra note 38.
(71) Sur la question voir nos obs. (note 7 et n° 3) sous Civ 1re 31 mai 2007,Légipresse 2007.III. 158.
(72) Voir Bruguière supra note 10 in Prop intellectuelles.
(73) TGI Paris 18 mars, nos obs. in « La jurisprudence des dessins et modèles2005 : le best of », Prop. Ind. 2006, Études n° 17 (n° 8).
(74) Paris 26 févr 2003, voir supra note 72.
(75) TGI Nanterre 27 oct 1998, Légipresse 1999.I.19.
(76) Voir supra note 37.
(77) Contra Caron, voir supra note 20, p. 104.
(78) Caron, voir supra note 16.
(79) Voir par exemple supra note 11 dans l'affaire Evelyne Thomas.
(80) Voir supra note 24.
(81) CA Toulouse voir supra note 26.
(82) 19 juill 2001, inédit: nous remercions Me V. Lapp de nous avoir aimablementcommuniqué cette décision.