Qu'elle s'inscrive dans une démarche biographique (nécrologie) ou factuelle (récits d'événements), que le sujet se rapporte ou pas à une procédure judiciaire en cours, la presse est souvent confrontée à des problèmes précis touchant à l'information relative aux personnes décédées. Dès lors, quelle est sa marge de manoeuvre au regard des nombreux intérêts en présence?
1. Médiatisation de la mort Si le décès peut être souvent considéré, pour la personne physique, comme la sortie de la scène juridique, il n'en est pas du tout de même de la scène médiatique. Sous cette rampe-là, le mort continue, parfois bien longtemps après son dernier souffle, à jouer un rôle. Qu'importe, finalement, le degré de composition de celui-ci. Sans nous engager dans le débat relatif à l'évolution plus ou moins nécrophile de notre société, remarquons simplement ...
Cédric MICHALSKI
Cédric Michalski Doctorant à la Faculté de Droit de Nancy, Membre de ...
(2) TGI Paris (référé), 5 août 1998: LP, déc. 1998, I, p. 153 TGI Paris, 18 nov.1998 : D., 1999, jurispr., p. 463, note D. Rebut; LP, janv. 1999, I, p. 11.
(3) Ces informations pouvant tomber sous le coup de la loi pénale (Crim., 23 mars1993, n° 89-81012: Légifrance) et donner lieu à droit de réponse exercé par laconjointe du défunt (Civ. 2e, 10 juill. 1996, n° 94-15189: Bull. civ. II, n° 210).
(4) D. Tallon, V° « Personnalité (Droits de la) »: Rep. pén., oct. 1996, n° 163.
(5) Civ. 1re, 14 déc. 1999, n° 97-15756: Bull. civ. I, n° 345; CCE, 2000, A. Lepage,comm. n° 39; D., 2000, jurispr., note B. Beignier, p. 372; JCP G, 2000, II, 10241,concl. C. Petit; PA, 22 mai 2000, note St. Prieur, p. 8
(6) Civ. 2e, 8 juill. 2004, n° 03-13260: Bull. civ. II, n° 390; RTD civ., 2004, noteJ. Hauser, p. 714.
(7) Civ. 1re, 27 sept. 2005, n° 03-13622: Bull. civ. I, n° 348; D., 2006, jurispr.,note Th. Hassler (p. 485) & note G. Lécuyer (p. 768); RTD civ., 2006, noteP. Jourdain, p. 126. V. E. Dreyer, « Disparition de la responsabilité civile enmatière de presse »: D., 2006, chron., pp. 1337 & s.
(8) Pour reprendre le régime de l'article 9-1 du Code civil, Civ. 2e, 8 mars 2001,n° 99-14995: Bull. civ. II, n° 46; LP, mai 2001, III, note B. Ader, p. 72; PA,18 mai 2001, note E. Derieux, p. 21.
(9) Sous réserve d'un développement futur de la notion de débat d'intérêtgénéral: v. infra, n° 9.
(10) Civ. 1re, 12 déc. 2000, n° 98-21161: Bull. civ. I, n° 321; CCE, 2001, obs.A. Lepage, comm. n° 94; D., 2001, jurispr., note J.-Ch. Saint-Pau, p. 2434;PA, 2 févr. 2001, note E. Derieux.
(11) Crim., 20 oct. 1998, n° 97-84621: Bull. crim., n° 264; D., 1999, jurispr., noteB. Beignier, p. 106; Dr. pén., 1999, comm. n° 18, M. Véron; JCP G, 1999, II,10044, note G. Loiseau. V. le jugement initial dans cette affaire, TGI Paris, 17e ch.,13 janv. 1997 : LP, mars 1997, III, comm. Th. Hassler & V. Lapp, p. 21.
(12) TGI Aix-en-Provence, 24 nov. 1988 : JCP G, 1989, II, 21329, noteJ. Henderycksen; RTD civ., 1990, obs. J. Patarin, p. 126. Pour une appréciationfavorable de cette solution, v. D. Tallon, op. cit.,n° 168.
(13) Crim., 20 oct. 1998, op. cit.
(14) Civ. 1re, 14 déc. 1999, op. cit. Civ. 1re, 15 févr. 2005, n° 03-18302: Bull.civ. I, n° 86; RTD civ., 2005, note J. Hauser, p. 363.
(15) « Seules les personnes représentées sur la photographie peuvent demanderréparation de l'atteinte portée à leur image »: Civ. 1re, 27 sept. 2005, op. cit.
(18) Par ex., Civ. 1re, 9 déc. 2003, n° 01-03989: Légifrance. V. E. Dreyer,« Image des personnes »: J.-cl. Communication, fasc. 3750, 31 août 2002,nos 74 & s.
(19) Civ. 2e, 30 juin 2004, n° 02-19599: Bull. civ. II, n° 340; JCP G, 2004, II,10160, note D. Bakouche.
(20) V. P. Auvret, « Droit du public à l'information et exploitation médiatique dela personnalité d'autrui »: LP, avr. 2000, II, p. 33 M. Dupuis, « Le droit àl'image face au droit d'informer: un effort de simplification »: RJPF, déc. 2004,chron., p. 31 J.-P. Gridel, « Liberté de la presse et protection civile des droitsmodernes de la personnalité en droit positif français »: D., 2005, chron., p. 391.
(22) Civ. 1re, 24 nov. 2006, n° 04-16706: Bull. civ. I, n° 437: LP, mai 2007, III, p. 89,comm. A. Lepage Civ. 1re, 27 févr. 2007, n° 06-10393: Bull. civ. I; D., 2007, act.jurispr., p. 804, obs. C. Delaporte-Carré; LP, mai 2007, III, p. 107, comm.L. Marino. Civ. 1re, 15 mai 2007, n° 06-18448: Bull. civ. I.
(23) CEDH, Cour plén., Sunday Times c/Royaume-Uni, 26 avr. 1979,req.n° 6538/74, § 65: F. Sudre, J.-P. Marguénaud, Joël Andriantsimbazovina,A. Gouttenoire & M. Levinet, Les grands arrêts de la Cour européenne desdroits de l'Homme, Paris, PUF, coll. Thémis, 4e éd., 2007, p. 576 (M. Levinet).Sur la question des rapports entre vie privée et art. 10 Conv. EDH, v. :P. Auvret, « L'équilibre entre la liberté de la presse et le respect de la vie privéeselon la Cour européenne des droits de l'Homme », Gaz. Pal., 2005,doctr., p. 879; M. Levinet, « Le droit au respect de l'image », in Le droit aurespect de la vie privée au sens de la Convention européenne des droits del'Homme, F. Sudre (dir.), Bruxelles, Bruylant-Nemesis, coll. Droit & justice(n° 63), 2005, pp. 179 & s. (spéc. pp. 181 à 186).
(24) Par ex., un recel de violation du secret professionnel comme dans l'affaireCEDH, Gde ch., Fressoz & Roire c/France, 21 janv. 1999, req. n° 29183/95 ( LP,oct. 1998, II, p. 115, comm. G. Cohen-Jonathan; Gaz. Pal., 1999, jurispr.,p. 477, note P. Lambert; PA, 4 août 1999, p. 11, note R. Marie; JCP G, 1999,II, 10120, note E. Derieux; RtdH, 1999, p. 673, obs. Ch. Bigot; JDI, 2000, p. 91,chron. A. Guedj): en l'espèce, la Cour européenne sanctionne la condamnationdans son principe, et non dans son quantum. Pour un autre ex. d'application,v. CEDH, sect. II, Brasilier c/France, 11 avr. 2006, req. n° 71343/01, § 43: LP,juill.-août 2006, III, p. 129, comm. B. Ader.
(26) Civ. 1re, 20 févr. 2001, n° 98-23471: Bull. civ. I, n° 42; JCP, 2001, II,n° 10533, note J. Ravanas.
(27) Ibid. Nous nous permettons de renvoyer à C. Michalski, « La mise encause d'autrui »: AJ pén., 2007, pp. 11 & 13.
(28) Civ. 1re, 20 déc. 2000, n° 98-13875 (action intentée par la « famille » dudéfunt) : Bull. civ. I, n° 341; JCP G, 2001, II, 10488, concl. J. Sainte-Rose ¬e J. Ravanas; LP, avr. 2001, III, note E. Derieux, p. 57 Civ. 2e, 8 avr. 2004,n° 03-10959 (action intentée par les héritiers) : Bull. civ. II, n° 191.
(29) Sur le rejet d'un amendement parlementaire tendant à la suppression del'article 35 quater de la loi de 1881 : « Cette disposition vise à réprimer, pourprendre un exemple marquant, la diffusion de la photographie dénudée d'unefemme ensanglantée à la suite d'un attentat, qui ne sert à mon sens aucunementl'information, mais qui porte en revanche atteinte à la dignité de la victime.» (réponse du garde des Sceaux, Mme E. Guigou: JO AN, débats, 2eséance du mercredi 23 janv. 2002, p. 922; col. g.)
(30) B. Beignier, L'honneur et le droit; Paris, LGDJ, coll. Bibliothèque de droitprivé, t. 234, 1995, p. 55.
(31) « Si la loi ne proscrit pas le récit par la presse de faits divers dans lesquelsun mineur est impliqué, toute information sur son identité est interdite et ce envue de faciliter le reclassement ultérieur du mineur ». La justification du raisonnementtenu par les juges d'appel ne manque pas de surprendre s'agissant d'unmineur décédé, donc insusceptible d'un quelconque reclassement La Cour decassation le valide pourtant, Crim., 9 oct. 1995, n° 94-83171: Bull. crim., n° 297.
(33) Alors que la jurisprudence antérieure à la loi de 1881 considérait que ladiffamation atteignait nécessairement l'héritier (Cass., ch. réunies, 1er mai1867); le législateur a donc adopté une position plus restrictive : B. Beignier,op. cit., pp. 226 & s.
(34) Crim., 12 déc. 2006, n° 04-20179: D., 2007, note E. Dreyer, p. 541; JCPG, 2007, II, 10010, note B. De Lamy; LP, avr. 2007, III, note L. Merlet &N. Verly, p. 65. V. C. Chamagne, « Les diffamations et injures envers lamémoire des morts: perspectives d'évolution de l'article 34 de la loi du 29 juillet1881 »: Légicom, 2002/3, p. 35.
(35) L'historien est d'ailleurs soumis à des obligations plus strictes que le journaliste,s'agissant du sérieux de ses travaux envisagé sous le prisme de l'exceptionde bonne foi: Crim. 27 juin 2000, n° 99-81622 ( Légifrance) G. Lécuyer, Liberté d'expression et responsabilité; Paris, Dalloz, coll.« Nouvelle bibliothèque de thèses », 2006, pp. 399 & s. L. Roguet-Poinsignon, Histoire et droit pénal (mémoire DU de criminologie, dir.F. Fourment, Faculté de droit de Nancy, 2007, nos 46 & s.).
(36) Comp., rapport E. Pelletant : « Quelle leçon (l'histoire) pourrait-elle nousdonner, si la loi de la diffamation vient étendre son voile sur les morts pour lescacher à la postérité? » ( Documents parlementaires, Sénat, séance du18 juin 1881, annexe n° 334, p. 463, col. g.)
(37) Nous nous permettons de renvoyer à C. Michalski, op. cit., p. 11.
(46) Par ex., CEDH, sect. II, Éditions Plon c/France, 18 mai 2004,req.n° 58148/00, § 53: Com. comm. élec., 2004, comm. n° 96, A. Lepage; D.,2004, jurispr., p. 1838, note A. Guedj; LP, oct. 2004, III, p. 173, comm.E. Derieux; RTD civ., 2004, p. 483, chron. J. Hauser; Th. Massis, « Santé, droitsde la personnalité et liberté d'expression », Gaz. Pal., 2004, doctr., p. 3563.
(47) Par ex., en matière de prescription (art. 65 & 65-1 L. 29 juill. 1881).Comp., « l'information est un bien périssable et en retarder la publication,même pour une brève période, risque fort de la priver de toute valeur et detout intérêt» et une période d'un an est longue « dans le cas d'un bien éphémèrecomme l'information », CEDH, Cour plén., Observer & Guardianc/Royaume-Uni, 26 nov. 1991, req. n° 13585/88, §§ 60 & 64 pour les deuxcitations : JDI, 1992, p. 813, chron. E. Decaux.
(48) Cl.-J. de Ferriere, cité par B. Beignier, op. cit., p. 226.
(49) C'est-à-dire « (aux) personne(s) ayant par elle(s) -même(s) ou par (leur)auteur vocation à exercer un droit ( ) » ou « qui (ont) droit à une prestationsociale ( ) en raison de (leur) appartenance à la catégorie qui y donne vocation.»: G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, V° « ayant droit »; Paris, PUF, 5eéd., 1996.