APRÈS DEUX ANNÉES d'application jurisprudentielle, la notion de « trouble anormal » dégagée par l'Assemblée plénière dans le domaine de l'image des biens, soulève encore bien des interrogations (1). Si depuis le revirement du 7 mai 2004 (2) les juges du fond ont systématiquement placé le fameux trouble au centre de leurs analyses, les hypothèses où ils sont parvenus à le caractériser restent rares (3). Dans ces conditions, il faut essentiellement se contenter de critères ...
Cour d'appel, Paris, 11e ch. A, 27 septembre 2006, SNCF c/ SARL Graff it ! Productions et a.
(2) Pour un premier bilan sur le trouble anormal, v. E. Dreyer, « L'énigme du trouble anormalcausé par l'image d'une chose », Comm. com. électr. 2006, Étude 20.
(3) Ass. plén., 7 mai 2004 : D. 2004, p. 1545, note J.-M. Bruguière ; D. 2004, p. 1547, noteE. Dreyer ; JCP G 2004, II, 10085, note C. Caron ; JCP G 2004, I, 163, n° 3, Chron. G. Viney ;JCP G 2004, I, 171, chron. H. Périnet-Marquet ; Dr. et patrimoine, n° 128, p. 34, noteT. Revet ; RTD Civ 2004, p. 528, obs. T. Revet ; Propr. intell. 2004, n° 12, p. 817, obs. V.-L.Benabou ; Légipresse 2004, n° 213, III, p. 117, note J.-M. Bruguière et B. Gleize ; RevueLamy Dr. des affaires, juill. 2004. 9 et s., Chron. J.-L. Bergel ; Comm. com. Électr. 2004,Étude 14, note C. Caron.
(4) À notre connaissance, le trouble anormal n'a été caractérisé qu'une seule fois par les jugesdu fond : Orléans, 10 novembre 2005, Comm. com. électr. 2006, comm. 38, note C. Caron.
(5) Rouen, 13 mars 2001, Légipresse 2001, n° 182-III, p. 95, obs. J.-M. Bruguière.
(6) Pour une illustration de ce propos, v. M. Guerrin, « Patrimoine : il faut payer pour voir »,Le Monde, 27 décembre 2002, p. 19 qui évoque des propriétaires revendiquant l'image d'uncitronnier.
(7) Il est certain que la seconde partie de l'attendu de principe en contredit directement ledébut si, après avoir rejeté le modèle de la propriété, la cour revient à l'article 544 du Codecivil en visant un trouble subi ès qualités par le propriétaire. En ce sens, v. T. Revet, RTD civ.2004, p. 528, spéc. p. 533 et du même auteur « La Cour de cassation teste une nouvellefigure juridique : le propriétaire non-propriétaire », Droit et Patrimoine 2004, n° 128, p. 34.
(8) Sur ce point, v. notre thèse, La protection de l'image des biens, Thèse Montpellier, 2005,n° 279, à paraître, Defrénois.
(9) V. infra.
(10) Sur la certitude du trouble anormal, v. déjà Paris, 11 janvier 2006, Comm. com. électr.2006, comm. 38, note C. Caron.
(11) Sur la distinction entre le trouble et le dommage, v. C. Guillemain, Le trouble en droitprivé, PUAM, 2000, n° 48 et s.
(12) Sur ce point, v. notre thèse, préc. n° 441.
(13) En ce sens, v. S. Lacour, « les créations éphémères », Cahiers des écoles doctorales,Faculté de droit de Montpellier, n° 2, nov. 2001, p. 173 et s.
(14) Née dans le giron du droit d'auteur, cette théorie est également appliquée dans ledomaine de l'image des personnes (Cass. civ. 1re, 25 janvier 2000, D. 2000, Somm. p. 270,obs. C. Caron) ou de l'image des biens (Cass. civ. 1re, 25 janvier 2000, Légipresse 2000,n° 171, III, p. 59).
(15) A. et H-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, 3e éd., Litec, 2006, n° 320.
(16) En ce sens, v. Paris, 19 février 2002 : JCP 2003, II, 10073, note J. M. Bruguière où, pourappliquer la théorie de l'accessoire, la cour ne raisonne pas sur le contenu de l'image maissur les conditions de sa diffusion. L'image litigieuse étant ici insérée dans un ouvrage de 1144pages comportant 4 500 photographies, le trouble certain au droit d'usage et de jouissanceest écarté. V. également Rouen 31 octobre 2001, RJDA, 2002/4, n° 447 dans lequel les jugesconsidèrent que l'image d'un hôtel dans un dépliant publicitaire n'est reproduite que pour illustrerl'environnement et qu'elle n'a donc « qu'un caractère accessoire par rapport à l'objet dudocument publicitaire ». Là encore, le trouble n'est pas caractérisé.