L'examen de la proposition de loi Marini visant à aménager la loi n° 94-665 du 4 août 1994, dite loi Toubon relative à l'emploi de la langue française, offre l'occasion de faire un premier bilan de celle-ci. Son application aux nouvelles technologies, et notamment à l'internet, provoque un débat, tout comme l'opposition constante entre la Commission européenne et la France sur les questions de la conciliation de la libre circulation des marchandises au sein de l'Union et de l'emploi de la langue française comme langue d'information des consommateurs. Face à ces problèmes, quelles réponses sont apportées par la proposition de loi, et sont-elles satisfaisantes ? La proposition intègre-t-elle par ailleurs les évolutions de l'univers numérique, et ose-t-elle apporter des solutions à certaines problématiques maintes fois identifiées?
APRÈS UNE ADOPTION VIVEMENT DÉCRIÉE et parfois raillée (1), la loi n° 94-665 du 4 août 1994 dite Loi Toubon relative à l'emploi de la langue française (2) célèbre une décennie d'existence et fait l'objet d'un projet de toilettage, à l'occasion de l'examen d'une proposition de loi présentée au Sénat (3). Les débats qui se sont tenus au cours de l'automne 2005 (4) ont permis de dresser un bilan de la loi Toubon, parvenue « à asseoir son ancrage dans l'opinion et dans notre ...
(2) Cf. notamment Sky M. Allgood ! : Parlons français avec Monsieur Toubonde J.-L. Chiflet, éditions Mille et une nuits, 1997.
(3) JOdu 5 août 1994, p. 11392.
(4) Proposition de loi n° 59 (2004-2005) de M. le Sénateur Philippe Marini, complétantla loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française.Adoptée en première lecture par le Sénat le 10 novembre 2005.
(5) Rapport n° 27 (2005-2006) de M. le Sénateur Jacques Legendre, au nomde la commission des affaires culturelles, déposé le 19 octobre 2005.
(6) Rapport de M. Legendre, ibid.
(7) dite "Bas-Lauriol"
(8) Enquête SOFRES, citée par M.-H. Dumeste, « Langue Française et protectiondu consommateur dans le commerce électronique», Rev. Conc. Consom. 1998,n° 101, p. 44.
(9) Enquête SOFRES réalisée à la demande de Force Ouvrière Consommateurs,citée dans le rapport de M. Legendre.
(10) En 2004, la DGDDRF a mené une enquête sur l'application de l'article 2 de laloi Toubon dans le domaine des matériels et des logiciels informatiques. Cescontrôles, réalisés dans 141 points de vente localisés dans 16 départements,ont donné lieu à 22 rappels de réglementation et à 6 procédures contentieuses.Le taux de manquement dans ce domaine est très supérieur à la moyenne.En revanche, les contrôles effectués sur internet n'ont donné lieu sur la mêmepériode qu'à deux procès-verbaux (sur 1221 contrôles).
(11) Cf.Rapport annuel 2004 du BVP.
(12) JOdu 27 avril 2005.
(13) JOn° 68 du 20 mars 1996, page 4258.
(14) Tribunal de police de Paris, 11 janvier 1996 ( BID; 1997, n° 1 p. 26) : « l'article2 de la loi du 4 août 1994 est extrêmement large dans sa définition et nefait aucune distinction selon les critères invoqués par la prévenue mais s'appliqueau contraire à tous les stades de la commercialisation» ; CA Montpellier,27 mai 1999 (inédit) : « la loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue françaiseconcerne tous les biens, produits ou services, destinés ou non à des spécialistes,et qu'elle s'applique à tous les stades de la diffusion».
(15) Voir « La loi Toubon confrontée aux technologies de l'information » de Marie-Laure De Cordovez et Sabine Lipovetsky, CCE juin 2002 p. 19.
(16) CA Paris, 27 janvier 1997, RJDA 12/97, n° 1576.
(17) CA Besançon, 2e ch. Civ., 15 janvier 1997, n° 1359/95, Santini c/ Sodeco.
(18) Tribunal de police de Paris, 11 janvier 1996 ( BID 1997, n° 1, p. 26) : desnotices accompagnant des composants électroniques.
(19) « La loi Toubon confrontée aux technologies de l'information », (précité).
(20) Voir toutefois Tribunal de police de Paris, 9 juin 1997,Association Avenirde la langue française c/ Georgia Tech Lorraine ( Computer and Telecoms lawreview, 1998/2, p. 48 ; Les Petites Affiches, 6 octobre 1997, n° 120, p. 11),statuant sur la recevabilité de l'action d'une association de défense de la languefrançaise ; par analogie, Rennes, 31 mars 2000, Comm., Com. Electr.Juin 2000, p. 24, qui retient qu'un site internet est susceptible de constituer unsupport publicitaire.
(21) Montpellier, 27 mai 1999 ; T. Pol. Paris, 11 janvier 1996, BID 1997, n° 1,p. 26 ; T. Pol. Villejuif, 7 avril 1997, inédit (cité par M.-L. de Cordovez etS. Lipovetsky).
(22) CJCE, 18 juin 1991, "Piagème", Aff. C-369/89, recueil de jurisp.1991, p. I-02971 ; 12 octobre 1995, "Piagème II", Aff. C-85/94, recueil de jurisp. 1995,p. I-02955 ; 14 juillet 1998, "Goerres", Aff. C-385/96 ; 3 juin 1999, "Colim", Aff.C-33/97 ; 12 septembre 2000, "Geffroy", Aff. C-366/98.
(23) Circulaire du 20 septembre 2001 du ministre de la Culture et de laCommunication, du secrétaire d'État au budget et secrétaire d'État aux PME.
(24) Conseil d'État, 6e et 4e sous-sections réunies, 30 juillet 2003, n° 245076,Recueil Lebon.
(25) 21 février 2005, BOCCRF2005-2004.
(26) La Documentation Française, 1998.
(27) Cf. article 20. 27. Question écrite de M. Jacques Godfrain, n° 30424 et réponse, JOAN du16 mars 2004, p. 2041.