L'exploitation publicitaire de représentations ou symboles religieux suscite inévitablement des polémiques, comme le montre la récente affaire Marithé et François Girbaud dont l'affiche publicitaire a été jugée comme « outrageant un thème sacré» et constitutive d'une injure aux sentiments religieux. La jurisprudence sur la question est hésitante et contradictoire. Dès lors, comment concilier liberté d'expression, respect des croyances et sécurité juridique ? Une approche méthodologique consistant à confronter les principes en présence, à l'aune notamment de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, apparaît nécessaire.
(2) Communiqué du 10 février 1998, « Accord amiable entre Croyances etLibertés, DDB et Volkswagen », disponible sur le site www.cef.fr.
(3) Lettre ouverte de Mgr Billé au Président de Volkswagen du 4 février 1998,disponible sur le site www.cef.fr.
(4) TGI de Paris, ordonnance du 10 mars 2005, RG n° 05/52087 confirmée par un arrêtde la CA de Paris du 8 avril 2005, RG n° 05/06086, LP221-16 et 221-17; voir pourles réactions du milieu professionnel «Girbaud / Cathos - À qui profite la mise enCène?», Anne Lavaud et Charlotte Bricard, CB Newsn° 825 du 7 mars 2005, p. 38.
(5) CEDH, arrêt n° 178 du 22 mai 1990, La convention européenne des droitsde l'homme Commentaires article par article, sous la direction de Louis-EdmondPetiti, Emmanuel Decaux et Pierre-Henri Imbert, Economica 1999, p. 368.
(6) La convention européenne des droits de l'homme Commentaires articlepar article, sous la direction de Louis-Edmond Petiti, Emmanuel Decaux et Pierre-Henri Imbert, Economica 1999, p. 370.
(7) Affaire Markt intern Verlag GmbH et Klaus Beermann, n° 3/1988/147/201du 20 novembre 1989.
(8) Pour une critique de la liberté qui serait concédée aux publicitaires, voirBernard Edelman en commentaire d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du28 mai 1996, relatif à une affiche Benetton, Dalloz1996, Jurisprudence, p. 617.
(13) Voir, notamment, pour l'affiche du film Il gèle en enfer, Cass. Civ. 1, 23 juin1992, Légifrancen° 90-16225, pour l'affiche du film Amen, TGI Paris, 21 février2002, JCP G2002, II, 10064, note Ph. Malaurie et Légipressen° 192-III, p. 105,com. : A. Tricoire ; pour l'affiche du film Larry Flint, TGI Paris, 20 février 1997,Gaz. Pal. 1997, jur. P. 328, note E. Morain et Légipressen° 140-III, p. 49, com. :M.-N. Louvet.
(14) En pratique, relève E. Dreyer ( JCL Communication, Fasc. 3710, n° 51), « ledroit français, comme le droit européen, fait une place à part à l'information légitimedu public et module la protection en fonction de l'objectif poursuivi par lemédia». Tout en approuvant avec réserve cette jurisprudence, l'auteur écrit ainsi« que le principe d'égalité n'a donc pas la portée générale que les moins valeureuxdes communicants prétendent lui reconnaître». Toutefois, il apparaît dangereuxde manipuler ainsi une liberté par une subtile appréciation de son degré d'intensité.Au demeurant, la latitude concédée par la CEDH aux autorités nationalesa trait à la portée des restrictions. La nuance peut apparaître subtile en pratiquemais me semble indispensable dans le cadre d'une approche méthodologique.
(15) CEDH, aff. Otto-Preminger-Institut, 20 septembre 1994, n° 11/1993/406/485.
(16) Cet article dispose que : « Dans les cas prévus par la loi, les peines encouruespour un crime ou un délit sont aggravées lorsque l'infraction est commiseà raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, dela victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. La circonstanceaggravante définie au premier alinéa est constituée lorsque l'infractionest précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ouactes de toute nature portant atteinte à l'honneur ou à la considération de la victimeou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de leurappartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie,une nation, une race ou une religion déterminée.»
(17) L'article 32 de la loi du 29 juillet 1881 dispose que « la diffamation commisepar les mêmes moyens envers une personne ou un groupe de personnes à raisonde leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à uneethnie, une nation, une race ou une religion déterminée sera punie d'un an d'emprisonnementet de 45000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement.» ; L'article 33 de cette même loi dispose que « sera punie de six moisd'emprisonnement et de 22 500 euros d'amende l'injure commise, dans lesconditions prévues à l'alinéa précédent, envers une personne ou un groupe depersonnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenanceà une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.»
(18) CEDH, aff. Otto-Preminger-Institut, 20 septembre 1994, n° 11/1993/406/485,§ 47.
(21) Cass. Civ. 1, 29 octobre 1990, Légifrance n° 88-19366.
(22) Art. 11. « La libre communication des pensées et des opinions est un desdroits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimerlibrement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminéspar la Loi. »
(23) Art. 1. « La France est une République indivisible, laïque, démocratique etsociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinctiond'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisationest décentralisée.»
(24) CEDH, aff. Otto-Preminger-Institut, 20 septembre 1994, n° 11/1993/406/485,n° 55.
(25) Méthodes d'interprétation et sources en droit privé, LGDJ 1954, cité dansle JCL Communication, Fasc. 1200, n° 113.
(26) Au 9., « nous concluons dès lors que l'OPI a agi d'une manière responsable,propre à limiter, autant qu'on pouvait raisonnablement attendre d'elle qu'elle leslimitât, les éventuels effets préjudiciables résultant de la projection du film».
(27) Cass. Crim., 30 juin 1999, Légifrancen° 98-80501; voir également l'arrêt de lacour d'appel de Paris du 3 juillet 1995 ( JCP G., 1995, Jurisprudence, n° 22601 noteCyrille Duvert) qui relève que les tribunaux n'ont pas « à arbitrer entre les différentesconceptions que peuvent avoir les croyants quant aux exigences de leur foi».
(28) Rapport fait au nom de la Commission d'enquête sur les sectes du22 décembre 1995, disponible sur le site www.assemblee-nationale.fr.
(29) Dans son rapport précité, la Commission d'enquête relève ainsi que « le principede neutralité de l'État signifie que les croyances religieuses ne sont pas unfait public sous réserve des restrictions liées au respect de l'ordre public, que lefait religieux relève des seuls individus, de la seule sphère privée des citoyens».
(30) CEDH, aff. Hassan et Tchaouch, 26 octobre 2000, n° de requête 30985/96
(31) La CEDH a jugé que la croyance doit être « identifiable», décision du 4 octobre1977, n° 7291-75.
(32) Aff. Campbell & Cosans, 25 février 1982, n° 7511/76 et 7743/76.32 et 33. Dictionnaire Le Petit Robert, édition 2003.
(36) Décret n° 92-280 du 27 mars 1992 fixant les principes généraux définissantles obligations des éditeurs de services en matière de publicité, de parrainageet de télé-achat. Éditeurs de service de télévision.
(37) L'article 12 de la Directive CE n° 89/552 du 3 octobre 1989 visant à lacoordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administrativesdes États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusiontélévisuelle dispose que « la publicité télévisée et le télé-achat ne doivent pas(...) attenter à des convictions religieuses ou philosophiques».
(38) Cette formule et celles qui suivent paraphrasent ou reprennent des définitionsdonnées par Le Petit Robert, éd. 2003.
(39) Aff. Otto-Preminger-Institut, 20 septembre 1994, n° 11/1993/406/485.
(40) TGI Paris, 20 février 1997, Gaz. Pal., n° 142, 18 et 18 mai 1997, p. 18, noteE. Morain et Légipressen° 140-III, p. 49, com. : M.-N. Louvet.
(41) Dans l'affaire Ave Maria(TGI Paris, 23 octobre 1984, Gaz. Pal.Rec., jur.p. 727, note Ph. Bertin), l'affiche représentait une femme fixée sur une croix,pieds et poignets retenus par des cordes. Il est vrai que la jeune femme en questionétait également représentée « la chevelure ouverte et exhibant largementsa poitrine dénudée»
(42) A. Lucas, H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, Litec, n° 415.
(43) Voir, en ce sens, Ch. Bigot, Droit de la création publicitaire, LGDJ, n° 311.
(44) Voir, notamment, Conseil Constitutionnel, décision du 20 janvier 1993,n° 92-316, portant sur la loi relative à la prévention de la corruption et à la transparencede la vie économique et des procédures publiques, Légifrance.
(45) Pour une présentation détaillée de ces mesures, voir JCL Communication,Emmanuel Dreyer, Fasc. 3710, « Juge des référés et activités de la communication», n° 147 et suivants.
(46) Cass. com., 14 décembre 1999, Légifrancen° 97-14988 Cass. civ. 2,11 octobre 1989, Légifrancen° 88-12073.
(47) Voir, notamment, Cass. civ. 1, 11 décembre 2001, Légifrancen° 00-13270- Cass. civ. 1, 12 décembre 2000, Légifrancen° 98-21161.
(48) Les grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, Thémis,PUF, 2004, p. 69.
(49) Voir l'ouvrage précité, notamment p. 71.
(50) Cass. Civ. 1, Légifrancen° 88-19366.
(51) Dans l'affaire Ave Maria, le TGI de Paris juge ainsi que l'affiche litigieuseimplique une confrontation brutale entre une image jugée offensante et laconscience des croyants, 23 octobre 1984, Gaz. Pal.1984, Juris., p. 727.
(52) Voir, notamment, note de Eric Morain sous TGI de Paris, 20 février 1997,Gaz. Pal., 18 et 18 mai 1997, Jurisprudence, p. 18, Note Philippe Malaurie,sous TGI Paris, 21 février 2002, JCP G2002, II, 10064.
(53) Ordonnance du 23 octobre 1984, Gaz. Pal. 1984, Jurisprudence, p. 727,note Philippe Bertin.53.Cass. Civ. 1, 21 juillet 1987, Légifrancen° 85-15044.