En matière de presse, et plus spécialement, au cas d'atteintes portées aux droits de la personnalité, le recours à la pratique du référé est devenu la règle. Certes, la combinaison des différents textes, tant spécifiques que de droit commun, offre aux victimes la possibilité de solliciter un large éventail de mesures. Pour autant, ce juge unique, initialement instauré pour édicter, dans l'urgence, des mesures à caractère provisoire, rend des ordonnances qui, de plus en plus, confinent à de véritables jugements au fond. On ne peut dès lors que déplorer ce glissement du provisoire au définitif.
TOUT LE MONDE a encore en mémoire le feuilleton jurisprudentiel qui avait entouré, en 1996, après le décès du Président François Mitterrand, la parution de l'ouvrage du Docteur Gubler, intitulé Le Grand Secret. On se souvient notamment qu'à l'époque, parallèlement à la saisine du juge des référés, la famille du Président défunt avait également saisi le juge du fond aux fins que soit prononcée, entre autres, l'interdiction de poursuite de la diffusion de l'ouvrage litigieux ...
Xavier AGOSTINELLI
Maître de conférences à la Faculté de droit de Toulon
(2) Cf. TGI Paris, réf., 18 janvier 1996, JCP1996, II, n° 22589, obs. E. Derieux ;Paris, 13 mars 1996, JCP1996, II, n° 22632, obs. E. Derieux ; Civ. 1re, 16 juillet1997, Concl. Mme Le Foyer de Costil, JCP1997, II, n° 22964, obs. E. Derieux ;add. in Légipresse, novembre 1997, n° 145, III, p. 137.
(3) TGI Paris, 23 octobre 1996, JCP 1997, II, n° 22844, obs. E. Derieux ; Paris,27 mai 1997, D. 1997, Inf. rap., p. 164 ; Civ. 1re, 14 décembre 1999, D.2000,p. 372, note B. Beignier ; JCP2000, II, n° 10241, Concl. C. Petit.
(4) Cf. Aff. Plon (Société) c/ France, req. n° 00058148/00, consultable not. sur :http://hudoc.echr.coe.int/hudoc.
(5) Cf. not. § 47 : « Saisi par l'épouse et par les enfants du Président décédéquelques jours auparavant, dans ce contexte de deuil, le juge des référés devaitdécider de la mesure propre à faire cesser ce trouble. Compte tenu de la dateà laquelle elle a été décidée et de son caractère conservatoire, l'interruption dela diffusion de l'ouvrage litigieux jusqu'à la décision des juridictions compétentessur sa compatibilité avec le secret médical et avec l'atteinte aux droits d'autrui,se trouvait justifiée au regard du ou des buts légitimes poursuivis. La Cour considère,par ailleurs, que cette ingérence était proportionnée à ce ou ces buts,la cour d'appel ayant pris soin, en confirmant la mesure prise par le juge desréférés, de limiter raisonnablement sa validité dans le temps, précisant en particulierqu'elle cesserait de prendre effet à défaut de saisine du juge du fonddans un délai d'un mois.»
(6) Cf. not. § 51 à 54 : « La Cour parvient, en revanche, à la conclusion que lemaintien de l'interdiction de la diffusion duGrand Secret, même motivé de façonpertinente et suffisante, ne correspondait plus à un besoin social impérieux ets'avérait donc disproportionné aux buts poursuivis. [ ] Elle souligne que, le23 octobre 1996, lorsque le tribunal de grande instance de Paris a rendu sonjugement, le décès de François Mitterrand remontait à neuf mois et demi.Manifestement, l'on ne se trouvait plus dans le même contexte que celui qui prévalaitlorsque, le 18 janvier 1996, le juge des référés avait ordonné l'interruptionprovisoire de la diffusion duGrand Secret. [ ] Cette mesure apparaît d'autantplus disproportionnée par rapport au but légitime poursuivi, celui-ci se résumantà la protection des droits de François Mitterrand et de ses ayants cause,qu'elle s'ajoute à la condamnation de la société requérante au paiement de dommages-intérêts à ces derniers. En conclusion, le 23 octobre 1996, lorsque le tribunalde grande instance de Paris a statué au principal, nul besoin social impérieuxne justifiait plus le maintien de l'interdiction de la diffusion du Grand Secret .
(7) V. not. Ch. Debbasch, H. Isar, X. Agostinelli, Droit de la Communication, éd.Dalloz, 2002, spéc. n° 1286, in fine.
(8) Cf. obs. E. Derieux, sous TGI Paris, réf., 18 janvier 1996, préc.
(9) Il importe de rappeler, ici, que différentes mesures d'interdiction peuvent égalementêtre édictées par le ministre de l'Intérieur en matière de publications destinéesà la jeunesse (cf. loi n° 49-956 du 16 juillet 1949) ainsi qu'en matière depublications étrangères (cf. art. 14 al. 1er, loi du 29 juillet 1881). Sur ce pointv. not. Ch. Debbasch, H. Isar, X. Agostinelli, préc., spéc. n° 603 s.
(10) V. not. Paris, 12 mai 2000, in Légipresse, novembre 2000, n° 176, I, p. 142.
(11) Passant outre, en effet, le caractère nécessairement provisoire d'une tellemesure, le juge des référés s'était contenté, sans aucune autre précision, defaire défense, sous astreinte, à la société éditrice ainsi qu'à l'auteur de poursuivrela diffusion de l'ouvrage.
(12) En première instance, en effet, le juge des référés n'avait assorti l'interdictionde poursuite de diffusion d'aucune limite dans le temps (cf. TGI Paris, réf.,18 janvier 1996, préc.) Ce n'est qu'en cause d'appel que le juge des référés aconféré à cette même mesure un caractère provisoire (cf. Paris, 13 mars 1996,préc.). N'est-ce pas le propre, par essence, de toute mesure ordonnée en référé?
(13) V. not. R. Lindon, « Le juge des référés et la presse », D. 1985, chr., p. 61;P. Kayser, « Les pouvoirs du juge des référés civil à l'égard de la liberté de communicationet d'expression », D.1989, chr., p. 11 ; J.-Cl. Lautru, « Réflexionssur le référé », in Les rapports entre la justice et la presse, coll. Légipresse,1991, p. 22; T. Massis, « Le juge des référés et la liberté d'expression », in Lesrapports entre la justice et la presse, coll. Légipresse, 1991, p. 43 ; E. Derieux,« Référé et liberté d'expression », JCP 1997, I, n° 4053 ; M.-N. Louvet, « Lapratique du référé en droit de la presse », in Légipresse, novembre 1994, n° 116,II, p. 85; add. du même auteur, « Le référé en droit de la presse », in Légipresse,décembre 1997, n° 147, II, p. 146; J. Ravanas, « Jouissance des droits civils »,J-Cl. Civil, fasc. 20, spéc. n° 9 à 59, éd. du Juris-Classeur, 2002 ; E. Dreyer,« Juge des référés et activités de la communication », J-Cl. Communication,fasc. 3710, éd. du Juris-Classeur, 2003.
(14) Cf. J. Normand, RTDCIV. 1978, p. 714.
(15) L'urgence est ainsi notamment requise par les dispositions de l'article 9C. civ., ainsi que par celles de l'article 808 NCPC. Cf. not. TGI Grasse, réf.,27 février 1971, JCP1971, II, n° 16734, obs. R. Lindon; TGI Grasse, réf., 22 mars1974, D. 1974, p. 571, note R. Lindon ; TGI Paris, réf., 11 juillet 1977, D.1977,p. 700, note R. Lindon ; Toulouse, réf., 15 janvier 1991, D.1991, p. 600, noteJ. Ravanas. Encore que, même dans les hypothèses où l'urgence est requisela Cour de cassation n'hésite plus à retenir, aujourd'hui, l'existence d'une présomptiond'urgence, cf. not. Civ. 1re, 16 octobre 1984, Bull. civ., n° 267; Civ.1re, 12 décembre 2000, D.2001, p. 2434, note J.-Ch. Saint-Pau ; Com. com.électr., septembre 2001, p. 27, note A. Lepage.
(16) La même notion d'urgence n'apparaît, en revanche, pas, à l'article 9-1C. civ., ainsi qu'à l'article 809 NCPC. Pour autant, il ne fait aucun doute que l'urgenceest, ici encore, naturellement requise et malgré la dispense textuelle decette notion, la Cour de cassation a plusieurs fois retenu que s'agissant de lamise en uvre de l'article 809 NCPC, il existait une sorte de présomption irréfragabled'urgence, en quelque sorte consubstantielle à l'existence d'un dommageimminent ou d'un trouble manifestement illicite. Cf. not. en ce sens : Civ.1re, 4 décembre 1976, Bull. civ.n° 330, p. 264 ; Civ. 3e, 19 janvier 1982, JCP1982, IV, p. 126; Civ. 3e, 26 octobre 1982, JCP1983, IV, p. 20; Civ. 2e, 11 juillet1985, D. 1986, Inf. rap., p. 51, obs. R. Lindon.
(17) À propos du caractère consubstantiel de la notion d'urgence à la procédurede référés, v. not. E. Dreyer, « Juge des référés et activités de la communication», étude préc., spéc. n° 59 à 94.
(18) V. not. P. Kayser, « Les pouvoirs du juge des référés civil à l'égard de la libertéde communication et d'expression », étude préc.; add. E. Dreyer, « Juge des référéset activités de la communication », étude préc. spéc. n° 3 à 58; Ch. Debbasch,H. Isar, X. Agostinelli, Droit de la communication, préc., spéc. n° 1274 à 1301.
(19) Aux termes de ce texte, en effet, « dans tous les cas d'urgence, le présidentdu tribunal de grande instance, peut ordonner, en référé, toutes les mesuresqui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existenced'un différend». Malgré sa généralité, ce texte demeure d'application relativementlimitée en matière de presse, sauf à être combiné, à raison de sa référenceexpresse à l'urgence, avec l'article 809 NCPC. V. not. TGI Paris, réf., 4 mars1988 et Paris, réf., 7 mars 1988, in Légipresse1988, n° 49, III, p. 31; Toulouse,réf., 15 janvier 1991, D. 1991, p. 600, note J. Ravanas. Encore que, nous yreviendrons, cette référence à l'urgence semble désormais devenue inutile (cf.Civ. 1re, 12 décembre 2000, D.2001, p. 2434, note J.-Ch. Saint-Pau ; Com.com. électr. 2001, n° 94, p. 27, note A. Lepage).
(20) Qui dispose: « Le président peut toujours, même en présence d'une contestationsérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remiseen état qui s'imposent, soit pour prévenir imminent, soit pour faire cesser untrouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'estpas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ouordonner l'exécution de l'obligation, même s'il s'agit d'une obligation de faire.»
(21) Ce qui, à l'évidence, aurait pu correspondre tant aux dispositions de l'article11 de la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 ou à celles de l'article10-2 de la Convention européenne des droits de l'Homme qui limitent, lesunes comme les autres, les seules atteintes possibles à la liberté d'expressionaux cas déterminés par la loi, qu'à la confirmation jurisprudentielle qu'a pu endonner le Conseil constitutionnel (cf. Déc. 84-181 DC, 10-11 octobre 1984,« Entreprises de presse », comm. L. Favoreu et L. Philip, in GDCC, n° 38; P. Avrilet J. Gicquel, in rev. Pouvoirs, n° 33, p. 163 ; J.-J. Bienvenu, in AJDA 1984,p. 580 ; L. Favoreu, in RDP1986, n° 2, p. 935).
(22) En effet, la victime d'une atteinte portée à un droit de personnalité, autreque ceux expressément visés par les textes, pourrait toujours se prévaloir, horsl'hypothèse d'une infraction spécialement posée par loi du 29 juillet 1881, dela responsabilité civile de droit commun.
(23) Pour autant, il n'est pas interdit de penser que, d'une certaine manière, larègle specialia generalibustrouve, tout de même, vocation à produire quelqueeffet, en cela que le recours éventuel aux dispositions du droit commun (art.808 et 809 NCPC) ne peut en aucun cas conduire le juge à s'affranchir des prescriptionsspécifiques et donc plus restrictives qui sont notamment poséesaux articles 9 ou 9-1 C. civ.
(24) Pour s'en tenir à une jurisprudence récente v. not. : TGI Nanterre, réf., 11 juin2001, (1re esp.) Com. com. électr.juillet/août 2001, p. 32, note A. Lepage ; TGIParis, réf., 26 février 2002, Com. com. électr. octobre 2002, p. 38, noteA. Lepage ; TGI Paris, réf., 26 mars 2003, in Légipresse2003, n° 203, I, p. 98;TGI Nanterre, réf., 2 mai 2003, in Légipressejanvier/février 2004, n° 208, I,p. 14; TGI Nanterre, réf., 4 juillet 2003, in Légipressemars 2004, n° 209, I, p. 31.
(25) Cf. not. TGI Paris, réf., 6 mars 2001, in Légipresse2001, n° 182, I, p. 15;TGI Paris, réf., 15 juin 2001, Gaz. Pal., 12 mai 2002, p. 61, note P. Guerder ; TGIMorlaix, réf., 9 octobre 2001, in Légipresse2001, n° 187, I, p. 155; TGI Nanterre,réf., 21 janvier 2002, in Légipresse2002, n° 190, I, p. 40.
(26) Le lecteur l'aura compris: nous faisons principalement référence, ici, à la pressepeople qui, certes a pu fidéliser un certain lectorat, mais qui, à l'évidence, privilégiela rentabilité financière au détriment du respect des principes juridiques établis.
(27) V. not. TGI Paris, réf., 23 janvier 1971, JCP1971, II, n° 16758; add. dans lemême sens Paris, 15 janvier 1972, Gaz. Pal. 1972, p. 302 ; TGI Paris, réf.,18 octobre 1996, in Légipresse1997, n° 139, I, p. 26.
(28) Cf. not. Paris, 31 octobre 2001, in Légipresse 2001, n° 187, I, p. 148
(29) Cf. not. Civ. 1re, 12 décembre 2000, préc. qui retient que « l'atteinte au respectdû à la vie privée et l'atteinte au droit que chacun a sur son image constituentdes sources de préjudices distincts, ouvrant droit à des réparations distinctes». En amont, et par transposition, cet attendu énoncé en termes de principe,vient ainsi confirmer que sauf à être constitutive d'une atteinte à l'intimité de lavie privée, la diffusion de l'image d'autrui, échappe, en référé, aux dispositions del'article 9 al. 2 C. civ. ; add. Paris, 24 octobre 1995, in Légipresse1995, n° 127,I, p. 115 (atteinte à l'intimité de la vie privée et à l'honneur) ; Paris, 31 octobre2001, in Légipresse2001, n° 187, I, p. 148 (atteinte à l'intimité de la vie privée età l'image); comp. TGI Paris, réf., 22 juin 1998, in Légipresse1999, n° 159, I, p. 29,qui retient not. que les mesures de l'article 809 NCPC poursuivent un but différentde celles de l'article 9 al. 2 C. civ. et tendent à la réparation de l'atteinte (sic). Cequi, à notre sens, revient à conférer à l'article 809 NCPC, une portée qu'il n'a pas :réparer une atteinte est de la compétence exclusive du juge du fond
(30) Cf. E. Dreyer, « Juge des référés et activités de la communication », étudepréc., spéc. n° 5 in fine.
(31) Cf. not. TGI Paris, réf., 22 novembre 1973 et 22 mai 1974, D. 1975, p. 168,note R. Lindon ; Paris, 14 mai 1975, D.1976, p. 291, note R. Lindon ; TGI Paris,réf. 16 octobre 1976, D. 1976, p. 692, note R. Lindon ; Paris, 18 octobre 1977,D. 1977, p. 461, note R. Lindon ; TGI Paris, réf., 14 mai 1985, Gaz. Pal. 1985, 2,p. 608, note Y. Chartier ; TGI Paris, réf., 12 janvier 1987 et Paris, 15 janvier 1987,D.1987, p. 231, note R. Lindon ; TGI Paris, réf. 17 juin 1987 et Paris, 19 juin1987, JCP 1988, II, n° 20957, note P. Auvret ; TGI Paris, réf., 22 juin 1998, inLégipresse1999, n° 159, I, p. 25 (qui retient expressément que les dispositionsde l'article 9 C. civ. ne sont pas exclusives de la mise en uvre des mesures deétadroitcommun); TGI Paris, réf., 26 février 2002, Com. com. électr., octobre 2002,p. 38, note A. Lepage (refus de saisie mais octroi d'une provision) ; TGI Marseille,réf., 11 octobre 2002, in Légipresse2003, n° 198, I, p. 6 (atteinte au droit àl'image et octroi d'une provision) ; TGI Paris, réf., 24 janvier 2003, in Légipresse2003, n° 201, I, p. 66 (refus de saisie à raison d'un dommage déjà consommé,mais octroi d'une provision) ; TGI Paris, 4 avril 2003, in Légipresse 2003, n° 202,I, p. 87 (refus de saisie pour présence de contestation sérieuse).
(32) V. not. P. Kayser, « Les pouvoirs du juge des référés civil à l'égard de laliberté de communication et d'expression », étude préc., qui, pour dépasser laconfrontation entre origine législative et origine réglementaire des textes, proposede se placer sur le terrain de l'abus de liberté et partant sur le fondementtextuel de l'article 1382 C. civ. ; add. E. Derieux, « Référé et liberté d'expression», étude préc., qui rappelle que selon la jurisprudence de la Cour européennedes droits de l'homme, la loi s'entend d'« un texte de caractère général,connu et accessible et non pas nécessairement[d'] une disposition élaboréeet adoptée selon la procédure législative».
(33) Cf. Civ. 1re, 12 décembre 2000, (1re et 2e esp.), préc. : « le juge [qui] tient tantde l'article 809 alinéa 2 du NCPC, que de l'article 9 al. 2 C. civ., le pouvoir de prendreen référé toutes mesures propres à empêcher ou à faire cesser l'atteinte[ ] ».
(34) Pour la forme, il conviendra de préciser, qu'en l'espèce, les requérantsavaient aussi dénoncé une violation du secret médical.
(35) V. not. P. Auvret, obs. sous Paris, 19 juin 1987, JCP1988, II, n° 20957.
(36) V. déjà en ce sens, Civ. 1re, 16 octobre 1984, Bull. civ., n° 267 ; JCP1984,IV, p. 356 ; D. 1985, Inf. rap., p. 166 ; add. Civ. 2e, 11 juillet 1985, D. 1986, Inf.rap., p. 51, obs. R. Lindon. Par ailleurs, il convient de préciser, ici, que si la Courde cassation fait référence à « l'atteinte au respect de la vie privée», c'est enréalité l'intimité de la vie privée qui est visée : en effet, l'urgence n'est pas unecondition de réparation, au fond, d'une atteinte portée à la vie privée, partant,il eût été inutile de la tenir pour présumée (v. en ce sens, A. Lepage, note sousCiv. 1re, 12 décembre 2000, préc.)
(37) Cf. Civ. 1re, 5 novembre 1996, JCP1997, II, n° 22805, obs. J. Ravanas; add.Civ. 1re, 25 février 1997, JCP1997, II, n° 22873, obs. J. Ravanas; Pour les conséquencesliées à l'énoncé d'un tel principe v. G. Viney, « Les relations entre responsabilitécivile et protection des droits subjectifs », chr. in JCP1997, I, n° 4025.
(38) Encore que s'agissant de ce dernier texte, la Cour de cassation a, depuislongtemps, admis qu'il existait, s'agissant de sa mise en uvre, une sorte deprésomption irréfragable d'urgence. Cf. not. Civ. 1re, 6 décembre 1976, Bull. civ.,n° 330, p. 284; Civ. 3e, 19 janvier 1982, JCP1982, IV, p. 126; Civ. 3e, 26 octobre1982, JCP, IV, p. 20; Civ. 2e, 11 juillet 1985, D.1986, Inf. rap., p. 51, obs. R. Lindon.
(39) Cf. supran° 8.
(40) Sur ce point, cf. infra, n° 13 s.
(41) Les deux textes, en effet, pour ce qui concerne les mesures susceptiblesd'être ordonnées, permettent d'aboutir à un résultat identique. En revanche, sil'atteinte à l'intimité de la vie privée n'est pas caractérisée par le juge, le recoursau référé de droit commun ne peut permettre de compenser l'impossibilité deprendre des mesures sur le fondement de l'article 9 al. 2 C. civ. V. not. E Dreyer,« Juge des référés et activités de la communication », étude préc. spéc. n° 30 s.,qui tient le même raisonnement pour ce qui concerne l'absence d'atteinte à laprésomption d'innocence.
(42) L'article 9-1 al. 2 C. civ. en effet, disposait que « le juge peut, même enréféré, ordonner l'insertion[ ] d'un communiqué [ ] sans préjudice [ ] desautres mesures qui peuvent être prescrites en application du nouveau code deprocédure civile». Cf. not. TGI Nanterre, réf., 17 novembre 1995, Jurisdata,n° 000496; TGI Nanterre, réf., 22 juin 1996, in Légipresse1996, n° 136, I, p. 137;comp. TGI Paris, réf., 7 novembre 1997, in Légipresse1998, n° 151, I, p. 55.
(43) Cf. loi n° 2000-515, portant réforme de la procédure pénale, JO du 16 juin2000, p. 9038.
(44) Désormais, « le juge peut, même en référé,[ ] prescrire toutes mesures,telles que l'insertion d'une rectification ou la diffusion d'un communiqué, auxfins de faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence».
(45) Ce qui notamment pourrait se justifier par le fait que les deux référés nepermettent pas nécessairement (même si l'article 9-1 al. 2 C. civ. fait référenceà « toutes mesures, telles que[ ] ») d'aboutir à l'édiction des mêmes mesures.
(46) Ne serait-ce qu'à travers l'important contentieux qui s'est développé relativementà l'intervention du juge des référés civil en matière de diffamation. Surce point, v. not. P. Kayser, « Diffamation et atteinte au droit au respect de la vieprivée », in Études offertes à A. Jauffret, PUAM, 1974, p. 408 s. ; Ph. Bertin,« Le juge des référés, juge des flagrants délits d'opinion ? », Gaz. Pal.1987, 2,chr., p. 685 ; P. Estoup, « Le référé, verdict de culpabilité », Gaz. Pal.1988, 2,p. 203; R. Tendler, « Le juge des référés, une procédure ordinaire ? », D. 1991,chr. XXVII, p. 139; Ch. Bigot, « Diffamation et procédure civile : un état des lieuxtoujours provisoire », in Légipresse1998, n° 153, II, p. 78 ; v. également notreouvrage, Le droit à l'information face à la protection civile de la vie privée, 1994,éd. Librairie de l'Université, Aix-en-Provence, spéc. n° 632 s.
(47) Cf. art. 165 : « Toute atteinte illicite à la personnalité donne à celui qui lasubit le droit de demander qu'il y soit mis fin, sans préjudice de la responsabilitéqui peut en résulter pour son auteur », cité par A. Touffait « De quelquessuggestions d'études tendant à remédier aux atteintes modernes aux droits dela personnalité », in Rev. des travaux de l'Académie des Sciences morales etPolitiques, 1973, Sirey, p. 53, spéc. p. 73.
(48) Cf. E. Dreyer, « Juge des référés et activités de la communication », étudepréc., spéc. n° 97 à 104.
(49) En omettant, par exemple, de donner une définition légale de la notion d'intimitéde la vie privée, le législateur n'a pu que contraindre le juge des référés,ne serait-ce que pour justifier son intervention, à en dessiner lui-même les contours.
(50) Cf. art. 484 NCPC: « L'ordonnance de référé est une décision provisoire ».
(51) V. not. en ce sens, H. Solus et R. Perrot, Droit judiciaire privé, tome III,Procédure de première instance, Sirey, 1991, p. 1087, n° 1288, in fine.
(53) Cf. sur le règlement de tels contentieux G. Fau et A. Debeaurain, « Lesjuges des référés promus juges du fond », in Rev. des Loyers, 1986, p. 128 s.
(54) Mettant fin à une divergence de jurisprudence entretenue par la 1re ch. civilequi, contrairement aux autres chambres de la Cour de cassation, a abandonnéson contrôle sur cette condition (v. Civ. 1re, 4 octobre 2000, D.2001, p. 1580,note A. Boujeka), l'Assemblée plénière a uniformisé la règle en rappelant que lecaractère non sérieusement contestable d'une obligation, au sens de l'article 809al. 2 NCPC est une question de droit, soumise au contrôle de la Cour de cassation(v. A. P., 16 novembre 2001, D.2002, p. 598, note Puigelier ; JCP 2001, II,n° 10646, concl. De Gouttes, obs. A. P., PA, mars 2002, n° 46, p. 19, noteA. Boujeka). Sur les incidences liées à l'appréciation de cette condition par lejuge des référés qui, dès lors, se trouve conduit à examiner inévitablement lefond v. not. H. Solus et R. Perrot, Droit judiciaire privé, préc., spéc. n° 1299.
(55) Cf. not. TGI Paris, réf., 11 janvier 1995, in Légipresse1995, n° 119, I, p. 25;TGI Paris, réf., 4 mars 1996, in Légipresse1996, n° 130, I, p. 43; TGI Paris, réf.,14 décembre 1999, in Légipresse2000, n° 171, I, p. 60; TGI Paris, réf., 26 février2002, Com. com. électr.2002, n° 136, p. 38, note A. Lepage ; TGI Paris, réf.,24 janvier 2003, in Légipresse2003, n° 201, I, p. 66 ; TGI Paris, réf., 26 mars2003, in Légipresse2003, n° 203, I, p. 98 ; TGI Nanterre, réf., 2 mai 2003, inLégipresse2004, n° 208, I, p. 14; TGI Nanterre, réf., 4 juillet 2003, in Légipresse2004, n° 209, p. 31. Encore qu'il n'est pas rare que l'octroi d'une provisionvienne se rajouter à une autre mesure édictée en référé. Cf. not. TGI Nanterre,réf., 24 février 1998, in Légipresse1998, n° 157, I, p. 148 (cumul avec un retraitde vente) ; Civ. 1re, 12 décembre 2000, préc. (cumul avec une insertion judiciaire); TGI Nanterre, réf., 31 mai 2001, Com. com. électr.2001, n° 83, p. 31,note A. Lepage (cumul avec une insertion judiciaire).
(56) V. not. TGI Paris, réf., 18 octobre 1996, in Légipresse1997, n° 138, I, p. 11;TGI Nanterre, réf., 29 septembre 1997, in Légipresse1998, n° 149, I, p. 74; TGINanterre, réf., 4 novembre 1997, in Légipresse1998, n° 150, I, p. 39 ; comp.cpdt TGI Nanterre, réf., 10 décembre 1997, in Légipresse1998, n° 152, I, p. 74;TGI Paris, réf., 14 décembre 1999, in Légipresse2000, n° 171, I, p. 60.
(57) V. en ce sens, J. Héron V et Th. Le Bars, Droit judiciaire privé, coll. DomatDroit privé, 2002, 2e éd. Montchrestien, spéc. p. 284, n° 372.
(58) Cf. Com., 20 janvier 1981, Bull. civ., IV, n° 40, p. 30 ; Gaz. Pal.1981, 1,p. 322, note Ph. Bertin ; Rev. trim. dr. civ. 1981, p. 679, obs. J. Normand; add.dans le même sens, Com., 22 juillet 1986, Bull. civ., IV, n° 185, p. 158 ; Civ. 3e,16 décembre 1987, Bull. civ.III, n° 209.
(59) V. not. TGI Paris, réf., 4 janvier 2002, Com. com. électr.2002, n° 93, p. 41,note A. Lepage.
(60) V. not. TGI Paris, réf., 26 février 2002, Com. com. électr.2002, n° 135, p. 38,note A. Lepage; TGI Paris, réf., 26 mars 2003, in Légipresse2003, n° 203, I, p. 98.
(61) V. not. TGI Nanterre, réf., 31 mai 2001, Com. com. électr.2001, n° 83,p. 31, note A. Lepage (en l'espèce 800 000 F) ; TGI Nanterre, réf., 2 mai 2003,in Légipresse2004, n° 208, I, p. 14 (en l'espèce, 15 000 euros).
(62) Cf. H. Solus et R. Perrot, Droit judiciaire privé, préc., spéc. p. 1102, n° 1302.
(63) La formule n'est pas trop forte qui est empruntée à G. Couchez, « Le référéprovision: mesure ou démesure », in Mélanges offerts à P. Raynaud, Dalloz-Sirey 1985, spéc. n° 9, p. 166, in fine.
(64) Cf. J. Normand, « Les facteurs d'accélération de la procédure civile », inMélanges Drai, Dalloz, 2000, p. 340.
(65) Certes, cette condition n'apparaît pas à l'article 809 NCPC, mais il importede la tenir objectivement présumée par la nature même de la demande.
(66) C'est le cas en matière d'ordre. Cf. Civ. 2e, 24 mai 1985, D.1986, p. 67 ;Com. 9 février 1988, Bull. civ.IV, n° 66.
(67) V. not. Civ. 1re, 14 mars 1984, D.1984, p. 629, concl. Fabre, note Robert ;JCP1984, II, n° 20205, concl. Gulphe, note Synvet.
(68) V. not. Civ. 1re, 6 mars 1990, Bull. civ.I, n° 64 ; Civ. 2e, 9 juillet 1979, JCP1980, II, n° 19389, obs. G. Couchez. ; Civ. 2e, 2 avril 1997, Bull. civ.II, n° 108 ;Com., 29 juin 1999, Bull. civ.IV, n° 147.
(69) V. Civ. 3e, 18 mars 1981, Gaz. Pal.1981, 2, pan. jp., p. 280.