Accueil > La réception des mesures techniques de protection des oeuvres en droit français Commentaire du projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la sociét de l'information -
Chroniques et opinions
01/01/2004
La réception des mesures techniques de protection des oeuvres en droit français Commentaire du projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la sociét de l'information
Le 12 novembre 2003, le ministre de la Culture et de la Communication présentait au Conseil des ministres un projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information (DADVSI). Le texte prévoit d'introduire dans le code de la propriété intellectuelle plusieurs dispositions relatives aux mesures techniques de protection et d'information. Cette irruption de la technique dans le champ de la propriété littéraire et artistique pourrait bien modifier sensiblement la physionomie de la matière et alimenter un contentieux foisonnant.
APRÈS PLUSIEURS MOIS D'ATERMOIEMENTS, le projet de loi DADVSI (1) a finalement été présenté au Conseil des ministres, près d'un an après l'expiration du délai de transposition fixé par la directive éponyme du 22 mai 2001 (2).Au train où vont les choses, il est peu probable que le texte fasse l'objet d'une inscription à l'ordre du jour avant plusieurs semaines. À mi-parcours dans le processus législatif, il ne semble pas inutile de mettre à profit ce moment de répit pour se ...
Thierry Maillard
Doctorant MENRT au Centre d'études et de recherche en droit de l'immatériel ...
(2) Projet de loi n° 1206, déposé le 12 novembre 2003 sur le Bureau del'Assemblée nationale.
(3) La directive 2001/29/CE sur l'harmonisation de certains aspects du droitd'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, qui transposeelle-même les Traités OMPI de 1996, devait être transposée au plus tard le22 décembre 2002.
(4) Par souci de clarté, seule sera ici envisagée la réception des mesures techniquesde protection, les techniques d'information sur les droits présentantmoins de difficultés en raison de leur caractère passif.
(5) 13e considérant de la directive.
(6) V. A. Latreille, « La protection des dispositifs techniques : entre suspicion etsacralisation », Propriétés intellectuelles, n° 2, janvier 2002.
(7) À l'exception comme l'exige la directive des logiciels pour lesquels l'articleL. 122-6-2 continue de s'appliquer.
(8) Proposition d'Eucd.info, présentée au CSPLA le 27 janvier 2003.
(9) V. pour une analyse complète du dispositif de la directive A. Latreille, op. cit.
(10) V. sur la question S. Dusollier (coord.), Le droit d'auteur : un contrôle de l'accèsaux oeuvres ?, Cahiers du CRID, Bruylant, Bruxelles, 2000 ; G. Gomis,« Réflexions sur l'impact des mesures techniques de protection des oeuvres »,Bull. Lamy Droit de l'informatique et réseaux, n° 162, octobre 2003.
(11) La question est plus complexe s'agissant des activités préparatoires carles techniques employées pour protéger des oeuvres tombées dans le domainepublic seront généralement les mêmes que celles appliquées aux objets protégés.La fourniture de dispositifs de contournement sera dès lors illicite du faitde la cécité de ces dispositifs. Mais la prestation de service visant à contournerune mesure technique protégeant un contenu du domaine public ne devraitpas être sanctionnable au titre de l'article L. 335-3-1 du CPI (v. infra).
(12) La directive, à l'inverse des traités OMPI, n'est sur ce point pas équivoque.On peut dès lors s'étonner que la loi danoise précise qu'« on entend par mesurestechniques efficaces toutes mesures techniques efficaces[sic] qui, dans lecadre normal de leur fonctionnement, sont conçues pour protéger les oeuvres,interprétations, productions, etc. protégées par la présente loi »(art. 75c (4)).On conçoit sans mal les difficultés que ce type de disparités dans les transpositionsnationales peut entraîner.
(13) Ce dont il est permis de douter.
(14) Directement inspirée de l'article 95 de la loi du 30 septembre 1986 relativeà la liberté de communication.
(15) Le système ne devrait donc pas satisfaire le monde du logiciel libre puisqu'enmatière de mesures techniques logicielles les licences de développementimposeront sans doute sans qu'il s'agisse là d'une condition discriminatoire l'inaccessibilité du code source aux utilisateurs finaux.
(16) Ou l'un des autres titulaires de droits visé à l'article L. 331-5.
(17) D'autres textes, notamment la directive sur la protection des services àaccès conditionnel, permettent, il est vrai, de protéger les mesures techniquesmises en oeuvre par le distributeur, mais dans une moindre mesure que la directivede 2001. Dès lors, les contractants des titulaires de droits seront sansdoute tentés surtout dans le domaine des services interactifs à la demande,pour lesquels l'exercice des exceptions n'a pas à être garanti d'invoquer lesnouvelles dispositions du livre III du CPI.
(18) Et, pour les droits voisins et le droit sui generis, aux articles L. 335-4-1 etL. 342-3-1, formellement identiques à l'article L. 335-3-1.
(19) La disposition est importante car les paragraphes suivants de l'articleL. 335-3-1 sont définis par référence à elle.
(20) Le but est de mettre à l'abri des sanctions l'utilisateur maladroit ou néophytequi, de bonne foi, par mégarde, contournerait une mesure technique deprotection.
(21) Alignée sur la terminologie des articles L. 323-1 et s. du code pénal.
(22) On ne peut en effet exclure qu'un acte de contournement i. e. un actequi passe autour, qui élude le système de protection technique ne touche pasdirectement, matériellement la mesure technique.
(23) En ce sens que tout acte privant d'effet la mesure technique y porteraitatteinte.
(24) Mais qui semble néanmoins présent en filigrane.
(25) Comme l'exige la CJCE.
(26) Il en serait ainsi d'un lecteur de DVD dont une fonction parmi d'autres viseraità contourner le dispositif de protection. Sous l'empire de l'article 7.1 de ladirective 91/250/CEE, qui ne prohibe que la mise en circulation ou la détentionà des fins commerciales de moyens ayant pour seul but de neutraliser un dispositiftechnique, la commercialisation du lecteur serait licite.
(27) Précision donnée par le considérant 51.
(28) Nouvel article L. 122-5 7°.
(29) Et à la rémunération pour copie privée
(30) Il aurait pu en être autrement, la directive n'imposant pas que les mesuresprises au titre de l'article 6.4 § 2, soient strictement identiques à celles adoptéesau titre de l'article 6.4 § 1.
(31) G. Vercken, « Mesures techniques et copie privée : round 1? », Légipresse,2003, n° 198, I.
(32) Art. L. 331-8.
(33) Dans « le respect des secrets protégés par la loi »cependant. Reste àsavoir ce que recouvre exactement cette (heureuse) précision. Un code sourcenon divulgué par son auteur est-il par exemple un secret protégé par l'articleL. 121-2 du CPI ?
(34) V. les récentes affaires relatives aux CDs protégés: TGI Nanterre, 24 juin 2003,CLCV c/ EMI France; TGI Nanterre, 2 septembre 2003, Françoise M. c/ EMI France,Auchan France; TGI Paris, 2 octobre 2003, Clcv c/ BMG, Sony Music France.
(35) Ainsi qu'aux articles L. 221-3, L. 342-3 et L. 331-6.
(36) V. pour une analyse d'ensemble S. Ricketson, Étude de l'OMPI sur les limitationset les exceptions au droit d'auteur et des droits connexes dans l'environnementnumérique, avril 2003, disponible à l'adresse :http://www.wipo.int/documents/fr/meetings/2003/sccr/pdf/sccr_9_7.pdf.
(37) En l'occurrence les exceptions listées à l'article L. 122-5.
(38) Les rédacteurs du projet de loi ne semblent d'ailleurs pas le savoir davantagepuisque le projet de loi prévoit qu'un décret en Conseil d'État fixera « entant que de besoin» les modalités d'application de l'article L. 122-5.
(39) Cf. l'article 6.4 § 4.
(40) Puisqu'il y a identité du copiste et de l'usager
(41) V. G. Vercken, « La protection des dispositifs techniques Rechercheclarté désespérément : à propos de l'article 6.4 de la directive du 22 mai 2001 »,Propriétés intellectuelles, jan. 2002, n° 2.
(42) Par exemple en interprétant plus sévèrement la notion de délai raisonnable.
(43) Il existe bien d'autres carences du projet, notamment quant à l'articulationde la protection des mesures techniques avec la rémunération pour copie privéeou avec le régime spécifique des logiciels. On ne saurait les traiter dans lecadre restreint de cet article.
(44) Que n'exclut pas la directive.
(45) L'exception ne préexistant pas dans la législation nationale et ne concernantpas les seules utilisations analogiques, il ne peut s'agir d'une utilisationconstitutive d'un « cas de moindre importance».
(46) Susceptibles de constituer une mise à disposition de moyens de contournement.V. en ce sens l'affaire du challenge SDMI présentée à l'adressehttp://www.cs.princeton.edu/sip/sdmi/faq.html.
(47) P. Sirinelli, L'étendue de l'interdiction de contournement des dispositifstechniques de protection des droits et les exceptions aux droits d'auteur etdroits voisins, rapport général au Congrès de l'ALAI 2001.
(48) P. Sirinelli, op. cit.
(49) Internationale avec les Traités OMPI, communautaire avec la directive, nationaleaujourd'hui avec le projet de loi.