Le secret de l'instruction ne s'impose pas à la presse qui ne concourt pas à l'instruction. Pourtant seuls les journalistes sont condamnés de ce chef sur le terrain du recel de choses, en l'occurrence les PV d'instruction. Les journalistes voient en outre rejetées des débats les pièces, produites au titre de l'offre de preuve des faits diffamatoires, issues d'un dossier en cours, au motif que cela porterait atteinte à la présomption d'innocence de la partie civile. Ces nouvelles restrictions à la liberté de la presse paraissent contraires à l'article 10 de la CEDH et à la jurisprudence de la Cour européenne qui fait du droit du journaliste à rechercher ses preuves et à les conserver un corollaire indispensable du droit à l'information du public.
"LE SECRET de l'instruction, lorsqu'il est violé, devrait faire l'objet de sanctions. C'est tout. C'est la loi ... Personne n'ose. Personne n'ose sévir. Aussitôt, on est des apprentis dictateurs, qui s'en prennent à la liberté de la presse. » (1) François Mitterrand On peut se demander si l'expression de cette indignation du Président Mitterrand au lendemain du suicide de Pierre Bérégovoy, révélée de manière posthume, ne se trouve pas finalement démentie par l'application que font ...
(2) Entretien posthume avec J.-P. Elkabach, juin 1994, Le Monde, 12 avril 2001.
(3) Article 11 du code de procédure pénale : « Sauf dans le cas où la loi en disposeautrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure aucours de l'enquête et de l'instruction est secrète. Toute personne qui concourtà cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sousles peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Toutefois, afin d'éviterla propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à untrouble à l'ordre public, le procureur de la République peut, d'office et à lademande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des élémentsobjectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur lebien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause».
(4) Cour de cassation (ch. crim.), 19 juin 2001, à paraître dans un prochainnuméro de Légipresse.
(5) Cour d'appel de Paris, 11e chambre B, 22 mars 2001, Garretta c/ July,Thoraval et SNPC Libération, voir Légipresse 183-27 .
(6) TGI Paris, 1re ch. - 3e section, 12 février 2001, Zinsou c/ agent judiciaire duTrésor, voir Légipresseà paraître. 6. Cass. crim. 19 mai 1827, Bull. Crim.n° 120.
(8) A. Besson, Le secret de la procédure pénale et ses incidences, D.1959ch. p.191 ; J. Larguier, Le secret de l'instruction et l'article 11 du code de procédurepénale, Rev. Sc. Crim.1959, p. 313.
(12) Cour d'appel de Rennes, 7 mai 1979, JCP 80-II-19333.
(13) Crim. 5 novembre 1903, DP1904 - I - 25.
(14) Crim. 13 mai 1991, Bull. Crim.n° 200.
(15) Art. R.155 et R. 156 du code de procédure pénale. 15. Commission de réflexion sur la justice présidée par Monsieur le PrésidentTruche. Rapport publié à la Documentation Française1997, chapitre L'informationde la presse, p. 74.
(17) Qui avait notamment été appelée de ses vux par une circulaire de 1985de la Chancellerie autorisant les Procureurs de la République et les Procureursgénéraux à faire de tels communiqués.
(18) Henri Leclerc, Présomption d'innocence et Droit des Victimes, Légipressen° 174-IV, p. 83.
(19) Henri Leclerc, Justice pénale, police et presse, Poitiers, 1988.
(20) Un irritant problème : Le secret de l'instruction, R. Dupuy, Gaz. Pal.,1978, II, p. 279.
(21) Chambre d'accusation, Bordeaux, 29 mars 1994, Bugeon, Maurice et autres,Légipressen° 115-III, p. 143.
(22) Voir par exemple CA Paris, 11e ch., 14 décembre 1988, Marchiani c/ Julyet Péan, Légipressen° 65, p. 81, note B.A. 22. TGI Paris, 17e chambre, 7 février 1991, Légipressen° 85-I, p.106 ; Courd'appel de Paris, 26 février 1992, Antenne 2 c/ Touvier, Légipressen° 97-I,p.142 ; TGI Paris 17e chambre 7 janvier 1991, Boussemah et Marchand et Hamon,Légipressen° 88-I, p.11.
(24) Crim. 11 janvier 1945, JCP1945 IV 35 ; 10 juillet 1969, Bull. Crim.n° 224 ;2 décembre 1971, Bull. Crim.n° 337.
(25) Crim. 4 janvier 1963, Bull. Crim.n° 5.
(26) Crim. 7 mai 1942, Bull. Crim.n° 56.
(27) Voir à ce sujet la publication qui a été faite du réquisitoire tenu dans l'affairePontaut-Dupuis devant la 17e chambre correctionnelle le 25 juin 1998, dansle mensuel pénal des Éditions du Jurisclasseur d'août et septembre 1998, p. 5 :Comme si la révélation dépendait de la vigilance de la démocratie par VincentLesclous et Claire Marsat, magistrats.
(28) Voir Le secret de l'instruction, la presse et la preuve de la vérité, BasileAder, Légipressen° 123-III, p. 59.
(29) Loi de 1996 : art. 114 du CPP modifié par la loi du 30 décembre 1996,Légipressen° 139-IV, p. 32, commentaire Basile Ader.
(30) CA Paris 11e chambre A, 16 juin 1999, D. 2000 p. 167.
(31) Christophe Bigot, Journalisme et recel ,commentaire sous CA Paris, 11echambre A, 16 juin 1999, Dalloz2000, p. 167.
(32) TGI Paris, 10 septembre 1998, Légipressen° 156-III, p. 150.Toutefois, la question de la "transmission orale" des éléments du procès verbalest sujette à interrogations : pourrait-on imaginer que l'avocat d'une des partiesdicte purement et simplement à un journaliste par le truchement du téléphone,un passage entier, et donc parfaitement fidèle ? N'y aurait-il pas alorsseulement "transmission orale" sans détention du support matériel ? 32. TGI Paris, 17e chambre, 16 octobre 1998, Thievent c/ Gatégnau, inédit.
(34) Voir note Bigot précitée.
(35) Voir article L. 122-5 3° du code de la propriété intellectuelle.
(36) CEDH, 21 janvier 1999, Fressoz et Roire c/ France, Légipressen° 160-III,p. 41 et 160-II, p. 33, chronique d'E. Dreyer et G. Cohen-Jonathan ; RTDH1999n° 39, p. 672, note Christophe Bigot, Dalloz99, sommaire 279.
(37) Arrêt Sunday Times, Cour européenne des droits de l'homme, 26 avril 1979in Droit de la communication - droit européen et international, Victoires-Éditions.
(38) Voir note Bigot précitée.
(39) Éloge du recel, Actes du colloque Liberté de la presse et droits del'homme, Dalloz1997.
(40) Voir notamment TGI Paris, 17e chambre, 2 octobre 1998, Gaetner c/ Pacary,Légipressen° 56-III, p. 152, note B.A.
(41) Cour d'appel de Paris, 11e chambre B, 22 mars 2001, voir Légipresse183-27 .
(42) CEDH, 27 mars 1996, Goodwin, Légipressen° 132-III, p. 70, note E. Derieux.
(44) Roger Pinto, La liberté d'information et d'opinion en droit international,Economica 1984, p. 96. 44. Crim. 27 mars 1920, DP 1920.1.163 ; 25 juillet 1947, Bull. Crim.n° 188 ;voir également B. Ader, La preuve de la vérité en droit de la diffamation,Légipressen° 159-II, p. 17
(46) Christophe Bigot, précité.
(47) On ne citera jamais assez souvent, sur le sujet, les propos du doyenCarbonnier dans sa chronique, Le silence et la gloire, D.1951, ch. p. 119,qui se demandait si la loi sur la presse « n'avait pas entendu instituer, pourtoutes les manifestations de la pensée, un système juridique clos, se suffisantà lui-même, arbitrant une fois pour toutes tous les intérêts en présence».Voir aussi Christophe Bigot, Le champ d'application de l'article 1382 du codecivil en matière de presse, in Liberté de la presse et droits de l'homme, Dallozp. 63 et N. Mallet-Poujol, Abus de droit et liberté de la presse, Légipressen° 143-II, p. 81.