La loi Dadvsi du 1er août 2006 prescrit le régime applicable aux droits d'auteur des agents publics. L'apport du dispositif est considérable. D'une part, il confère à la création administrative un cadre légal inscrit dans le Code de la propriété intellectuelle remédiant aux zones d'ombre d'un régime établi par la doctrine et la jurisprudence. D'autre part, il rompt avec les solutions antérieures construites en marge du droit d'auteur et en contradiction avec celui-ci. Renversant la logique du célèbre Avis Ofrateme, le législateur aligne la situation des agents publics sur celle des salariés de droit privé. Cependant, cette réforme, adoptée à partir des travaux du Cspla, propose une solution d'équilibre entre les droits d'auteur des agents publics et les missions de service public qui leur incombent, reprenant la philosophie de l'avis Ofrateme. Il s'agit d'adapter le droit d'auteur aux spécificités de la création administrative. Dès lors, en encadrant strictement son exercice, le législateur a conféré une portée toute relative à cette disposition. Il a en effet entendu offrir à la personne publique les garanties lui permettant d'accomplir ses missions de service public, dans le respect du droit de la concurrence.
Alexandra TOUBOUL
Maître de conférences de droit privé IREDIC – LID2MS – Université Paul ...
1er février 2012 - Légicom N°47
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(2) Notamment : A. Kerever, « Le droit d'auteurfrançais et l'État », Rida, octobre 1981, n° 110,p. 3, spéc., p. 79 ; C. Blaizot-Hazard, Les droits depropriété intellectuelle de personnes publiques endroit français, Lgdj, 1991, p. 34.
(3) Code la propriété intellectuelle.
(4) Pour une étude en droit comparé : A. Lucas-Schloetter, « Le droit d'auteur des fonctionnairesen Europe continentale », Prop. intell., juillet2004, n° 12, p. 757.
(5) Loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative audroit d'auteur et aux droits voisins dans la sociétéde l'information, JO n° 178 du 3 août 2006page 11529, dite loi Dadvsi.
(6) R. Philippot, L. Teresi, « Réforme du droitd'auteur des agents publics : la nouvelle donnepour les collectivités publiques », Jcp A 2006,1195, n° 2.
(7) CE, avis, 21 novembre 1972, in Les grands avisdu Conseil d'État, Dalloz 2e éd. 2002, p. 105, noteG. Kuperfils.
(8) Conseil supérieur de la propriété littéraire etartistique, Rapport de la commission spécialiséeportant sur la création des agents publics, 2001 ;Avis n° 2001-1 relatif à la création des agentspublics.
(9) Caa Paris Versailles 15 mars 2007, Jcp A,2007, 2154, comm. Ch. Caron ; Ajda, 2007,p. 918, admettant la protection d'un cours écritsous la forme d'un polycopié ; Caa Versailles3 juillet 2007, Ajda, 2007, p. 2167, admettant laprotection de photographies.
(10) Lettre du 20 janvier 1951 du ministre de l'Éducationnationale.
(11) A. Kerever, préc., p. 47 ; p. 91 ; M.-G.Calamarte-Doguet, « Les fonctionnaires en quêtede droit d'auteur Pirandello au pays de la propriétéintellectuelle des fonctionnaires », Ajda,2003, p. 1969 ; J.-M Bruguière, « Droit d'auteuret service public. Plaidoyer en faveur d'uneunion harmonieuse », Prop. Intell., avril 2003,n° 7, p. 117, spéc., p. 120 ; « Les fonctionnaireset les agents publics : un statut particulier ? », inCréations et inventions de salariés. Rompre avecles schémas reçus , Actes de colloque, Irpi,2010, n° 35, p. 96.
(12) En ce sens, J.-M Bruguière, « Les fonctionnaireset les agents publics : un statut particulier »,préc.
(13) A. Kerever, préc., p. 79.
(14) TA Caen 12 mai 2009, Ajda, 2009, p. 1455,refusant d'accorder la protection à un dossier deconsultation d'entreprises.
(15) R. Philippot, L. Teresi, préc., n° 15.
(16) Avis du 14 mars 1958, comm. P. Renaudin,Situation des agents publics au regard de la propriétéintellectuelle, Études et documents duConseil d'État, 1958, fasc. n° 12, p. 29.
(17) Sur l'ensemble de cette question : A. Touboul,Les droits d'auteur des salariés en droit français :Entre consécration et remise en cause, Thèsedact., Aix-Marseille, 2005, n° 148 et s.
(18) A. Touboul, op. cit., n° 400.
(19) Ch. Caron, Droit d'auteur et droits voisins,Litec, 2e éd., 2009, n° 196, p. 153.
(20) A. Touboul, op. cit., n° 200 et s.
(21) Cspla, Rapport préc., p. 4 ; A. Kerever, préc.,p. 95 ; C. Blaizot-Hazard, op. cit., p. 33.
(22) Desbois, « La jouissance et l'exercice des droitsintellectuels appartenant à des employés et à desfonctionnaires », Études de droit contemporain,Contributions françaises aux IIIe et IVe congrèsinternationaux de droit comparé, 1959, Paris,Sirey, p. 113, spéc., p. 120.
(23) Ch. Caron, op. cit., n° 196, p. 154 ; Cass. civ. 1re,8 décembre 1987, Rida, avril 1988, p. 139.
(24) Cspla, Rapport préc., p. 9.
(25) A. Kerever, préc., p. 79 ; C. Blaizot-Hazard,op. cit., p. 35.
(26) Tgi Paris 31 mars 1999, RIDA n° 183, janvier2000, p. 333, note A. Kerever.
(27) C. Blaizot-Hazard, op. cit., p. 34.
(28) Voir notamment : Desbois, préc., p. 121 ;F. Pollaud-Dulian, Le droit d'auteur, Economica,2004, n° 276, p. 201 ; A. Lucas, Les droits d'auteursur les créations salariées, in Droits de la propriétéintellectuelle sur les inventions et créationsdes chercheurs salariés, Éditions Tec & Doc,2001 ; M.-G. Calamarte-Doguet, préc., p. 1971.
(29) Voies qui consistent à rendre inopposable ouà paralyser le droit de propriété incorporelle dontl'agent est investi à titre originaire : J.-E. Schoettl,« L'administration dispose-t-elle d'un droitd'auteur ? », DIT, 1988/4, p. 12 ; Ph. Gaudrat, « Latitularité des droits sur les oeuvres réalisées dansles liens d'un engagement de création », n° 122.
(33) Rapport fait au nom de la Commission deslois, par C. Vanneste, AN n° 2349, 1er juin 2005,p. 127.
(34) Cspla, Avis préc., p. 2.
(35) Rapport au nom de la Commission des affairesculturelles, par M. Thiollière, 12 avril 2006, Sénat,n° 308, p. 83. Ne présentant pas les traits caractéristiquesdes EPA, ces organismes n'auraient puse prévaloir du dispositif étudié si le législateur neles avait pas expressément mentionnés.
(36) B. Poidevin ; V. Gelles, « Réflexions sur lamise en oeuvre du nouveau régime des droitsd'auteur applicable aux agents publics à la suitede la loi Dadvsi », Cce. 2007, Alerte 141.
(37) Cass. com., 25 avr. 2006, n° 04-19.482, Cce.2006, comm. n° 91, Ch. Caron. Que ce soit en droitd'auteur (CA Paris 7 octobre 2005, CCE. 2005,comm. n° 180, Ch. Caron) ou en droit des brevets(Cass. com., 25 avr. 2006, préc ; CE, 22 févr. 2010,n° 320319, Cce. 2010, comm. n° 46, Ch. Caron),les stagiaires relèvent des règles de droit commun.
(38) C. Blaizot-Hazard, op. cit., p. 33.
(39) A. Touboul, op. cit., n° 286 ; n° 687 et s.
(40) Ch. Caron, « Menaces sur le droit d'auteurdes universitaires », Cce. 2005, Étude 25 ;M. Cornu, « Droit d'auteur des universitaires etdes chercheurs : l'expropriation sans cause d'utilitépublique », D. 2005, p. 3025 ; M. Guillemain,A. Lallement, « La réforme du droit d'auteur desagents publics : difficultés d'application aux enseignants-chercheurs », D. 2005, p. 1418.
(41) C. Bernault, « Les droits d'auteur des enseignants.L'enseignant est-il un auteur « comme lesautres ? », Cce, 2010, Étude n° 6, spéc., n° 2.
(42) Art. L. 113-9 Cpi.
(43) Les agents publics conservent alors la plénitudedes prérogatives d'auteur. Mais rien nes'oppose à ce que le régime juridique de l'oeuvrecollective s'applique si les conditions fixées à l'articleL.113-2 sont réunies.
(44) Art. L.611-7 Cpi.
(45) L'article L.113-9 ayant été pris pour modèle,il est possible de se référer au régime des logicielsde salariés.
(46) Lors de l'examen du projet de loi, il a étéprécisé que la condition posée à l'article L. 131-3-1 reprend la distinction dégagée par l'AvisOfrateme entre les oeuvres rattachables ou détachables,Rapport au nom de la Commission desaffaires culturelles, préc., p. 81.
(47) En ce sens, notamment : C. Blaizot-Hazard,préc., p. 34.
(48) Selon C. Vanneste, le dispositif permet unecertaine « souplesse », Rapport fait au nom de laCommission des lois, préc., p. 125.
(49) Art. L. 121-7 Cpi.
(50) A. & H.-J Lucas, Traité de propriété littéraireet artistique, Litec, 3e éd., 2006, n° 167, p. 151.Selon le Cspla, une réglementation s'avérait inutile: « ( ) le risque de voir le droit moral compromettrela mission de service public est très faible,et la commission est d'avis de faire confiance aujuge administratif pour conjurer le risque d'abus,quelle que soit la prérogative en cause », Rapportpréc., p. 14.
(51) M. Cornu, « Droits d'auteur des fonctionnaires: le périmètre contenu de l'exception de servicepublic », D. 2006, p. 2185.
(53) R. Philippot ; L. Teresi, préc., n° 37, soulignantque le manque de précision sera sans doutesource de contentieux.
(54) Cspla, Rapport préc., p. 5 ; Rapport au nomde la Commission des affaires culturelles, préc.,p. 82. Soumises au droit commun, les entreprisesdu secteur privé doivent conclure un contrat decession des droits patrimoniaux avec leurs salariéset verser une rémunération en sus du salaire.Or, tout dispositif qui, en cas d'exploitation descréations sur un marché concurrentiel, conféreraità la personne publique la plénitude des prérogativespatrimoniales et l'affranchirait de l'obligationde verser une rémunération supplémentaire à sesagents, serait susceptible de tomber sous le coupde l'article L.410-1 du Code de commerce.
(55) Voir sur ce point : J.-M Bruguière ; M. Vivant,Droit d'auteur, Précis Dalloz, 2009, 1re éd.,n° 290, p. 218.
(56) Rapport au nom de la Commission des affairesculturelles, préc., p. 83.
(57) Notamment : J.-M Bruguière ; M. Vivant, op.cit., n° 288, p. 217 ; A. & H.-J Lucas, op. cit.,n° 167, p. 151 ; M. Cornu, préc. ; « Des créationsde fonctionnaires aux oeuvres orphelines, la tentationd'une dépossession », Rldi, mai 2009, suppl.au n° 49, p. 1630, spéc., 1634 ; R. Philippot ;L. Teresi, préc., n° 41 ; B. Poidevin ; V. Gelles,préc. ; J. Mel, « Les créations de fonctionnaires »,Cce. 2006, Étude 31, n° 17 ; A. Lebois, « Servicepublic et créations intellectuelles », Rldi, mars2008, p. 1128.
(58) J.-D. Dreyfus, « Brèves remarques sur le droitd'auteur des agents publics après la loi du 1er août2006 », Ajda 2006, p. 2179.
(59) Cspla, Rapport préc., p. 5.
(60) Rapport au nom de la Commission des affairesculturelles, préc., p. 82.
(61) Rapport fait au nom de la Commission deslois, préc., p. 129.
(62) Terme qui élève des difficultés d'interprétationdénoncées par la doctrine. Voir notamment : A. &H.-J Lucas, op. cit., n° 167, p. 151 ; J. Mel, préc.,n° 21 ; R. Philippot ; L. Teresi, préc., n° 38.