La loi pénale, de par ses fonctions, est un outil de régulation intéressant. Une approche schématique de la loi de 1978 peut amener au constat selon lequel les règles et les principes de protection des données personnelles sont envisagés par le droit pénal. La question qui se pose est de savoir s'il joue ou non son rôle de régulation pour assurer le respect de la législation protectrice des données personnelles, conformément à l'intention du législateur. Théoriquement, le dispositif doit permettre de sanctionner les plus importants manquements aux règles posées par la loi. Or, la rédaction des textes est parfois ambiguë, en raison de l'absence de soin apportée à l'articulation de la loi de 1978 avec le Code pénal, et les sanctions disproportionnées. La mise en oeuvre du dispositif reste quantitativement faible. Partant, le contentieux pénal n'offre pas suffisamment de visibilité en la matière. Le manque de cohérence de la jurisprudence pénale relative au contentieux de la loi de 1978 modifiée n'encourage pas son développement et son utilisation pour en faire un outil de régulation du droit de la protection des données personnelles.
Par ses fonctions dissuasive, éducative, moralisatrice, répressive, la loi pénale peut servir d'outil de régulation pour assurer le fonctionnement et le respect d'une législation, lui permettre ainsi d'atteindre l'objectif qui est sa raison d'être. On parle de politique pénale. On l'observera par exemple en matière de circulation et de sécurité routière.Telle était bien la conception du législateur qui, en votant la loi du 6 janvier 1978 relative à l'Informatique, aux fichiers et ...
Jean FRAYSSINET
Professeur à l'Université Paul Cézanne - Aix-Marseille III
1er mars 2009 - Légicom N°42
6612 mots
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(2) Les études conséquentes, approfondies et àjour récentes sont rares ; v. Agathe Lepage,Réflexions de droit pénal sur la loi du 6 août 2004relative à la protection des personnes à l'égard destraitements de données à caractère personnel,Com. Comm. Electr., février 2005, p. 33-39; JeanFrayssinet, Atteintes aux droits de la personnerésultant des fichiers ou des traitements informatiques,Art. 226-16 à 226-24, fasc. 20, JurisclasseurPénal Code, 2006, 50 p. Dans les ouvragesrécents de présentation de la loi du 6 janvier 1978modifiée la lacune est plus que flagrante
(3) V. pour le signalement de nombreuses différences,Jean Frayssinet, Atteintes aux droits de lapersonne résultant des fichiers et des traitementsinformatiques, Jurisclasseur Pénal Code, art.226-16 à 226-24, fasc. 20, 5, 2006). Les multiplesdéfauts de rédaction des textes infractionnelsjoints à l'autonomisation du droit pénal parrapport au texte de la loi, multiplient les risquesde différences, de divergences ou de confrontationsentre la CNIL et le juge pénal, et aussi entreles degrés de la juridiction pénale.
(4) La chose est constatée depuis longtemps par lespénalistes: J. Francillon, Rev. Sc. Crim., 1996,p. 677.
(5) J. Francillon, Rev. Sc. Crim., 1996, p. 678;A. Lepage, «Réflexions de droit pénal sur la loidu 6 août 2004 relative à la protection des personnesà l'égard des traitements de données àcaractère personnel», Com., Comm. Electr., fév.2005, p. 33-39; J. Frayssinet, Atteinte aux droitsde la personne résultant des fichiers ou des traitementsinformatiques, Jurisclasseur Pénal Code,Art. 226-16 à 226-24, fasc. 20, 5, 2006, 50 p.;G. Braibant, Données personnelles et société del'Information, Rapport au Premier ministre, LaDocumentation française, 1998, p. 119.
(6) Les rapporteurs des deux Assemblées parlementaires,lors de la discussion de la loi du 6 août 2004,ont plaidé l'alourdissement des peines. La CNILdans son avis de septembre 2000 sur le projet de loiconsidérait que: «L'abaissement des sanctions neparaît pas justifié. Une telle initiative pourrait desurcroît altérer l'esprit de la réforme: la protectiondes données personnelles et de la vie privée n'a pasune moindre valeur aujourd'hui qu'hier». Lesenjeux économiques étant considérables pour lesentreprises il fallait, ce qui peut se concevoir pourles amender, de fortes contraventions.
(7) A. Lepage, op. cit., n°s 28 à 30. 7. G. Braibant, op. cit., p. 120.
(9) CE, 27 octobre 1999, M. Solana, AJDA,20 décembre 1999, p. 1042. Dans cet arrêt leConseil d'État a reconnu à la CNIL une marged'appréciation sous le contrôle restreint du jugeadministratif en considérant qu'il appartenait à lacommission d'aviser le procureur de la Républiquedes faits dont elle avait connaissance si cesfaits lui paraissaient suffisamment établis et si elleestimait qu'ils portaient une atteinte suffisammentcaractérisée aux dispositions législatives dont elleavait pour mission d'assurer l'application.
(10) Cette évolution est constatée par les pénalisteseux-mêmes : J. Pradel, « Les infractionsrelatives à l'Informatique », RIDC, 2-1990,p. 815 et s. spécialement p. 820 ; cet auteur aestimé que la CNIL exerçait « une sorte de « justiceretenue », en ce qu'elle ôte à la justicepénale le monopole de l'intervention étatique ».
(11) CE, juge des référés, 19 février 2008, affaire Profil France, requête no 311974.