La reconnaissance en justice d'une atteinte au droit à l'image repose désormais sur des vecteurs nouveaux assez éloignés de la référence historique d'immixtion intolérable dans la vie privée. Reste que dans son principe, la protection de l'image des mineurs est inchangée. Seule a priori l'image ayant fait l'objet d'une autorisation préalable peut être licitement publiée. Ce principe, qui vaut pour un majeur capable consentant, vaut également pour un enfant mineur sous réserve, d'une part, d'obtenir l'autorisation des personnes ayant autorité sur lui et, d'autre part, de préciser quelles sont les conditions de validité de cette même autorisation. Cependant, la notion de droit à l'image ne peut avoir de caractère absolu et partant doit céder devant différents intérêts liés à la liberté d'expression ou au droit à l'information. La règle est acquise depuis longtemps. Elle est générale et ne saurait se décliner différemment à raison d'une excuse de minorité. Dans tous les autres cas, le principe de la protection légale recouvre sa plénitude. Dès lors que la victime de l'atteinte est un enfant mineur, c'est un régime juridique particulier qui s'applique quant à la mise en oeuvre de l'action en réparation.
Depuis sa création d'origine jurisprudentielle, le concept de droit à l'image a progressivement acquis ses titres de noblesse (1) et se trouve aujourd'hui - il est vrai avec plus ou moins de bonheur - parfaitement installé dans les prétoires (2). Al'instar de la protection légale due au titre du respect de la vie privée aux termes de laquelle tout individu peut prétendre au respect de sa vie privée (3), le droit à l'image ne distingue pas non plus et, par conséquent, offre une ...
Xavier AGOSTINELLI
Maître de conférences à la Faculté de droit de Toulon
1er avril 2007 - Légicom N°37
5011 mots
Veuillez patienter, votre requête est en cours de traitement...
(2) Sur cette notion v. not. J. Ravanas, La protectiondes personnes contre la réalisation et lapublication de leur image, LGDJ, 1978 ;M. Serna, L'image des personnes physiques et desbiens, Economica, 1997 ; T. Roussineau, Le droità l'image, image des personnes et image desbiens, thèse Paris, 2004.
(3) Sur l'évolution liée aux récentes applicationsjurisprudentielles, v. not. A. Lepage,« L'indemnisation du préjudice résultant d'atteintesaux droits au respect de la vie privée et à l'imagedans la jurisprudence récente », CCE 2001, chron.n° 20 ; E. Dreyer, « Légitimité de l'informationpar l'image », LP 2004-209-II, p. 31 ; T. Hassler,« La liberté de l'image et la jurisprudence récentede la Cour de cassation », D. 2004, chron.p. 1611 ; T. Roussineau, « La notion de droit à l'imageexiste-t-elle encore ? », CCE, 2005, étud.n° 22, p. 14.
(4) Cf. Art. 9, al. 1 C. civ.
(5) Cf. not. Civ. 1re, 13 janvier 1998, D. 1999, jur.p. 120, note J. Ravanas et Civ. 1re, 16 juillet 1998,D. 1999, jur. p. 541, note J. C. Saint-Pau ; add.Civ. 2e, 12 décembre 2000, D. 2001, jur., p. 2434,note J. C. Saint-Pau ; TGI Paris, 12 juin 2001, LP2001-184-I, actual., n° 184-41 ; Aix-en-Provence,2 décembre 2003, CCE 2004, comm. n° 49, noteA. Lepage ; TGI Nanterre, 16 juin 2004, LP 2004-216-I, n° 216, actual., 216-11.
(6) Victor Hugo, « Lorsque l'enfant paraît », in Lesfeuilles d'automne, 1831.
(7) Cf. pour une première décision : Civ. 2e,12 juillet 1966, D. 1967, jur. p. 181, noteP. Mimin.
(8) Sur ce point v. not. Ch. Bigot, note sous Civ. 2e,19 février 2004 (2 arrêts), D. 2004, jur. p. 2596 ;Ch. Bigot, « Les atteintes aux droits de la personnalitépar voie de presse », D. 2005, panor., pp.2646 à 2649 ; T. Roussineau, « La notion de droità l'image existe-t-elle encore ? », préc.
(9) Volenti non fit injuria
(10) Jurisprudence constante sur ce point : cf not.Civ. 2e, 12 juillet 1966, préc. ; Civ.1re, 18 mai1972, JCP 1972, II, n° 17209, concl. Lindon ;Versailles, 4 octobre 1998, D. 1989, somm. com.,p. 360, obs. D. Amson; Paris, 17 décembre 1991,D. 1993, jur., p. 366, note J. Ravanas ; Civ. 1re,27 mars 1990, Bull. civ., I, n° 72, p. 52; Paris,9 mai 1995, D. 1996, somm. com., p. 75, obs.T. Hassler ; Montpellier, 17 octobre 2000, JCP2001, IV, n° 2228 et sur pourvoi, Civ. 2e, 18 décembre2003, D. 2004, Inf. rap., p. 251 (arrêt derejet) ; Paris, 14 février 2002, D. 2002, jur.,p. 2004, note J. Ravanas.
(11) Voir en ce sens, L. Marino, Responsabilitécivile, activité d'information et médias, 1997,PUAM, spéc. p. 235, n° 388.
(12) Encore que ce principe souffre nombreusesexceptions, cf not. sur ce point, H. Fulchiron,Rep. Civ. Dalloz, mise à jour 2004, v° AutoritéParentale, spéc. n° 120 s.
(13) Cf. art. 372 al. 1 C. civ. « Les père et mèreexercent en commun l'autorité parentale ». Anoter ici que ce principe était déjà la règle avant laréforme opérée par les lois de 1993 et 2002 qui,en réalité, ont permis, sous certaines conditions, lamise en place automatique de l'exercice en communde l'autorité parentale.
(14) Cf. Paris, 17 décembre 1991, D. 1993, jur.p. 366, note J. Ravanas.
(15) Cf. Paris, 9 mai 1995, préc.
(16) Cf. Paris, 14 février 2002, D. 2002, jur.p. 2004, note J. Ravanas.
(17) Pour illustration V. not. Toulouse, 25 mai2004, CCE 2005, Comm, n° 17, note A. Lepage.
(18) Sur cette exigence, v. not. TGI Nanterre,15 juin 2001, LP 2001-185-I, actual. n° 185-21 ;Aix-en-Provence, 21 octobre 2004 (1re espèce),CCE 2005, Comm., n° 142, note A. Lepage ; add.Civ. 1re, 21 mars 2006, LP 2006-232-I, actual.,n° 232-27.
(19) Cf. Paris, 17 décembre 1991, D. 1993, jur.,p. 366, note J. Ravanas, à propos de la publicationde la photographie d'un enfant maquillé.
(20) Cf. Civ. 1re, 12 décembre 2000, Bull. civ., I,n° 322, p. 209; JCP 2001, II, n° 10572, noteS. Abravanel-Jolly ; D. 2001, jur., p. 2064, noteJ. Ravanas ; add. dans le même sens, TGINanterre, 27 juin 2000, LP 2000-176-I, actual.n° 176-13.
(21) Cf. TGI Paris, 15 septembre 2003, LP 2003-207-I, actual. n° 207-38 et n° 207-39 ; add. dans lemême sens, et indirectement, Colmar, 7 juillet2005, CCE 2006, comm., n° 52, note A. Lepage (àpropos de la diffusion de photographies d'enfantsmineurs autorisée par les grands-parents).
(22) Par principe, en effet, si un seul des parentsdétient l'exercice de l'autorité parentale, il importede demander l'autorisation du juge des tutelles.Cf. en ce sens T. Hassler, « La liberté de l'imageet la jurisprudence récente de la Cour de cassation», étude préc., spéc. p. 1614, n° 3 et la noteréférencée.
(23) Cf. not. Civ. 1re, 12 décembre 2000, préc. quiretient que « le photographe avait procédé à unepublication de cette image sans l'autorisation desparents ».
(24) Cf. art. 372-2 C. civ. qui n'opère utilementqu'à la seule condition que le tiers diffuseur ait étéde bonne foi.
(25) Cf. TGI Nanterre, 4 mars 2002, LP 2002-194-I, actual. n° 194-28 et Versailles, 11 septembre2003 (arrêt confirmatif), AJ famille 2003, p. 383,obs F. B. ; Rev. Jur. personnes et Famille 2003,n° 12, p. 20, analyse F. Eudier.
(26) Les parents, divorcés, exerçant conjointementl'exercice de l'autorité parentale, le père autoriseseul la société productrice, pour illustrer un documentaireconsacré aux droits des pères divorcés, àfilmer ses enfants à l'occasion de l'exercice d'undroit de visite et d'hébergement dont il bénéficiaitpour l'un d'entre eux.
(27) Voire, en l'absence de consentement de l'undes deux parents, être autorisée par le juge destutelles, cf en ce sens, Paris, 25 avril 2000,RTDCiv. 200, p. 802, obs. J. Hauser ; add. (pourun rappel du principe) TGI Nanterre, 23 janvier2002, LP 2002-190-I, actual., n° 190-34.
(28) V. en ce sens, T. Hassler, « La liberté de l'imageet la jurisprudence récente de la Cour de cassation», étude préc. ; add. dans le même sens Paris,14 février 2002, préc., note J. Ravanas, spéc.p. 2007, n° 10.
(29) Dans ce cas, toute la difficulté portera nonseulement sur l'appréciation de la portée del'autorisation donnée mais aussi, en amont, sur lapreuve de l'existence même d'un contrat. V. not.TGI Paris, 24 janvier 2001, LP 2001-180-I,actual., n° 180-35.
(30) Ainsi, a-t-il été jugé plusieurs fois que le faitpour un photographe professionnel de réaliser leportrait d'un enfant n'emportait pas l'autorisationd'exposer ce même portait dans la vitrine de sonmagasin. cf Poitiers, 21 octobre 1935, D. 1936,jur, p. 45 ; Paris, 19 avril 1985, D. 1985, Inf. rap.,p. 324, obs. R. Lindon, cités par E. Dreyer, Imagedes personnes, J-Cl. Communication, 2002, n° 60in fine ; add. TGI Nanterre, 11 janvier 2000, LP2000-176-I, actual., n° 176-11.
(31) V. en ce sens Paris, 16 février 2001, LP 2001-185-I, actual., n° 185-20, qui rappelle le principede la nécessité d'obtenir un consentement expliciterelativement à tous les modes d'exploitation del'image consentie d'une personne ; add. TGIParis, 17 octobre 2005, LP 2006, n° 228, I,actual., n° 228-08 qui retient que l'art. 9 C. civ.,seul applicable, en matière de cession du droit àl'image, ne met pas de limite à la liberté contractuelle,dès lors que les parties ont précisé les limitesde l'autorisation.
(32) Cf. not. Paris, 16 février 2001, préc.
(33) D'autant qu'en présence d'un contrat, c'estnécessairement le régime général des obligationsqui a vocation à s'appliquer : cf. en ce sensVersailles, 22 septembre 2005, LP 2006-232-III,pp. 109 s., note J.-M. Bruguière.
(34) Tardivement, en effet, les parents de l'enfants'étaient rendus compte qu'ils avaient ainsi perduune chance de pouvoir négocier une plus justerémunération au pro rata de la durée totale d'exploitationdes clichés.
(37) En effet, en l'espèce, le contrat était simplementverbal et, au moment des faits, la réglementationapplicable à la participation de mineurs à laprise de clichés dans un but publicitaire, n'imposaitpas la rédaction d'un acte écrit. En définitive,cette absence d'écrit s'est retournée contre lesauteurs de la campagne publicitaire qui, de fait,n'ont pu établir avoir utilement rempli leur obligationd'information. (Désormais, l'exercice del'activité de mannequin par un enfant mineur estrégie par la loi n° 90-603 du 12 juillet 1990, cfJ.O. du 13 juillet 1990).
(38) V. sur ce point L. Marino, Responsabilité civile,activité d'information et médias, préc., spéc.p. 236 s., n° 389 s. ; add. J Ravanas qui écrit : « Lalicéité de la publication ne peut résulter que duconsentement certain, spécial, des parents titulairesde l'autorité parentale », note sous Paris,14 février 2002, préc., spéc. p. 2007, n° 10.
(39) V. en ce sens, TGI Nanterre, 27 juin 2000, LP2000-176-I, actual., n° 176-13.
(40) TGI Nanterre (ord. réf.), 31 mai 2001, LP2001-184-I, actual., n° 184-37 et sur appel,Versailles, 27 juin 2001, LP 2001-184-I, actual.,n° 184-38
(41) Cf. Montpellier, 17 octobre 2000, préc. et, surpourvoi, Civ. 2e, 18 décembre 2003, préc.
(46) Cf. Civ. 2e, 25 novembre 2004, LP 2005-218-III, p. 17.
(47) Cf. par ex. TGI Nanterre, 25 avril 2000, LP2000-176-I, actual., n° 176-12 ; add. dans lemême sens TGI Paris, 22 septembre 2000, LP2000-176-I, actual., n° 176-14. A fortiori, la règledoit-elle s'appliquer, lorsque le texte et l'imagerévélés relèvent de l'histoire judiciaire nationale :v. en ce sens, Civ. 1re, 13 novembre 2003, JCP2004, IV, somm. jur., n° 1008 ; add. dans le mêmesens : TGI Aix-en-Provence, 25 avril 2006, LP2006-232-I, actual., n° 232-26.
(48) Cf. Toulouse, 24 mai 2005, LP 2005-223-I,actual., n° 223-11.
(49) Cf. not. à propos de l'exigence de lien direct :Civ. 1re, 6 février 1996, D. 1997, somm. com.,p. 85, obs. T. Hassler ; Civ. 1re, 20 février 2001,D. 2001, jur., p. 1199, note J.-P. Gridel et Somm.p. 1990, obs. A. Lepage ; JCP 2001, II, n° 10533,note J. Ravanas ; Civ. 2e, 11 décembre 2003, Bull.civ., II, n° 385 ; Civ. 2e, 19 février 2004, D. 2004,somm. com., p. 1633, obs. Ch. Caron ; cf à proposdu respect de la dignité humaine : Civ. 1re, 20 décembre2000, JCP 2001, II, n° 10488, concl.J. Sainte-Rose, note J. Ravanas ; Civ. 1re,20 février 2001, JCP 2001, II, n° 10533, noteJ. Ravanas ; D. 2001, jur., p. 1199, note J.-P. Gridel ; Civ. 1re, 12 juillet 2001, D. 2002, jur.,p. 1380, note Ch. Bigot et Somm., p. 2298, obs.L. Marino ; JCP 2002, II, n° 10152, noteJ. Ravanas ; Civ. 2e, 4 novembre 2004, CCE 2005,comm., p. 54, n° 33, note A. Lepage ; D. 2005,jur., p. 696, note I. Corpart ; JCP 2004, II,n° 10186, obs. D. Bakouche.
(50) Pour une confirmation récente cf encore Civ.1re, 7 mars 2006, CCE. 2006, Comm., p. 47,n° 133, note A. Lepage.
(51) Cf. Civ. 1re, 12 décembre 2000, préc.
(52) Cf. Nîmes, 10 mai 2005, LP 2005-223-I,actual., n° 223-10.
(55) Cf. Civ. 1re, 20 février 2001, préc. ; Civ. 2e,25 novembre 2004, Bull. civ. I, n° 506.
(56) Il est vrai, qu'en l'espèce, il avait été retenuque le reportage était constitutif d'une doubleatteinte au droit au respect de la vie privée et audroit à l'image : Cf. Civ. 1re, 21 février 2006, LP2006-231-III, pp. 95 s., note T. Hassler ; v. aussi,dans le même sens, TGI Paris, 16 janvier 2006,LP 2006-233-I, actual., n° 233-10.
(57) Cf. not. Civ. 1re, 162006, LP 2006-23-III, pp.171 s., comm. E. Dreyer : cassation partielle d'unarrêt qui, à propos d'un événement d'actualité(accident vasculaire d'un comédien célèbre) ajugé que les photos constituaient une atteinte à lavie privée, alors que celles-ci étaient en relationdirecte avec l'article qu'elles illustraient et necaractérisaient aucune atteinte à la dignité de lavictime ; add. Civ. 1re, 30 mai 2006, LP 2006-234-I, actual., n° 234-29 (à propos de la divulgationd'une information protégée par l'art. 9 C. civ. sansrelation directe avec un événement d'actualité).
(58) Sur ce point cf not. C. Watine-Drouin, J-Cl.Civ., art. 388-1 et 388-2, fasc. 720, spéc. n° 70.
(59) V. aussi F. Watrin, « Les atteintes à l'image,l'identité et la vie privée des mineurs commisespar voie de presse », LP 2002-190-II, chron., pp.35 s, spéc. p. 39.
(60) Cf. art. 464 al. 3 C. civ.
(61) V. déjà, en ce sens, Paris, 25 avril 2000,D. 2000, Inf. rap., p. 187; RTDCiv. 2000, p. 802,obs. J. Hauser.
(62) Cf. art. 373-2 al. 1 C. civ.
(63) Au cas par ex. de filiation naturelle de l'enfantalors qu'un seul des parents reste investi de l'autoritéparentale (cf art. 372 al. 2 C. civ.) ou bienencore, au cas d'administration légale de l'enfantsous contrôle judiciaire (cf art. 389-2 C. civ.).
(64) Sans doute, la situation personnelle et familialede l'intéressée expliquait-elle que son mari nese soit pas joint à l'instance.
(65) Cf. TGI Nanterre, 23 janvier 2002, LP 2002-190-I, actual., n° 190-33 et n° 190-34.