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La loi du 29 juillet 1881 à l'épreuve de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (lcen) du 21 juin 2004
/ Chroniques et opinions
01/04/2006
Qu'en est-il de la responsabilité de plein droit des éditeurs en ligne (art. 15 de la LCEN)? La délicate assimilation au commerce électronique
L'ESSENTIEL Le grand défi auquel le droit de la presse est aujourd'hui confronté est son adaptation aux publications en ligne. La notion de publication sur internet, à cet égard, est au coeur du débat. Car si l'internet constitue un espace de publication, au sens de l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881, conditionnant la mise en oeuvre du mécanisme de courte prescription, il importe également d'y voir un espace de « nouvelle publication », au sens de l'article 65 de la loi. Avec la loi pour la confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004, le législateur a introduit des innovations majeures, concernant la prescription des délits de presse et le droit de réponse en ligne, d'une part, la responsabilité des intermédiaires techniques, d'autre part. Se pose alors la question de l'articulation entre ces nouvelles dispositions et les textes préexistants.
Selon l'article 15.I de la loi n° 2004- 575 du 21 juin 2004 « pour la confiance dans l'économie numérique » (1) (LCEN), toute personne physique ou morale exerçant une activité de commerce électronique « est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci ».Les seuls cas ...
Cyril ROJINSKY
Avocat au barreau de Paris
1er avril 2006 - Légicom N°35
3280 mots
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(2) Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 « pour laconfiance dans l'économie numérique », JO22 juin 2004, p. 11168.
(3) Directive 2000/31/CE du Parlement européenet du Conseil du 8 juin 2000 relative à certainsaspects juridiques des services de la société del'information, et notamment du commerceélectronique, dans le marché intérieur (ditedirective sur le commerce électronique), JOCE17 juillet 2000, L 178/1.
(4) Projet de loi pour la confiance dans l'économienumérique n° 528, déposé le 15 janvier 2003au nom du Premier ministre par le ministre del'Économie, des Finances, et de l'Industrie,disponible sur le site de l'Assemblée nationale,http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/projets/pl0528.pdf
(5) Articles 23 et 24 de la loi n° 92-645 du13 juillet 1992 « fixant les conditions d'exercicedes activités relatives à l'organisation et à lavente de voyages ou de séjours », codifiés auxarticles L. 211-17 et L. 211-18 du Code du tourismepar l'ordonnance n° 2004-1391 du 20 décembre2004.
(6) Rapport de M. Jean Dionis du Séjour,n° 1282, déposé le 10 décembre 2003, enseconde lecture du Projet de loi par l'Assembléenationale, disponible sur le site de l'Assembléenationale,http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r1282.pdf, p. 23.
(7) Dossier « Loi pour la confiance dans l'économienumérique (LCEN) » sur le site du Serviced'Information du Gouvernement, service duPremier ministre, disponible à l'adresse suivante :http://www.internet.gouv.fr/rubrique. php3?id_rubrique=336
(8) L'article 15.II modifie expressément l'articleL. 121-20-3 du Code de la consommation.
(9) Directive 98/34/CE du Parlement européen etdu Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédured'information dans le domaine des normeset réglementations techniques, JOCE L 204 du21 juillet 1998, p. 37 ; Directive 98/48/CE duParlement européen et du Conseil du 20 juillet1998 portant modification de la directive98/34/CE prévoyant une procédure d'informationdans le domaine des normes et réglementationstechniques, JOCE L 217 du 8 août 1998, p. 18.
(10) Pour de plus amples développements sur cetteprocédure et ses conséquences, v. B. Tabaka, Lanotification des textes encadrant la société de l'informationet le casse-tête du droit parlementairefrançais, Légipresse, octobre 2004, 215-II-114.
(11) CJCE, 30 avril 1996, aff. C-194/94 CiaSecurity International SA c/Signalson SA etSecuritel Sprl, Recueil p. I-2201, arrêt aux termesduquel il incombe au juge national « de refuserd'appliquer une règle technique qui n'a pas été notifiée conformément à la directive » de 1983,désormais abrogée, et à laquelle se substituent lesdeux directives précitées de 1998.
(12) A ce sujet, v. not. C. Rojinsky, Les techniques contractuelles du commerce électronique, Légicom n° 21/22, 2000/1 et 2, p. 105 et s.
(13) Et de l'interprétation qui a été faite de l'exarticle23 de cette loi (devenu article L. 211-17du Code du tourisme) par la jurisprudence,notamment dans un arrêt de la cour d'appel deVersailles en date du 10 novembre 2000 qui ajugé que « tout organisateur de voyages estresponsable de plein droit à l'égard de l'acheteurde la bonne exécution des obligations résultantdu contrat. Ainsi, toute clause limitative deresponsabilité incluse dans les conditions généralesde vente de l'agent de voyages, qui portesur une obligation résultant du contrat, estcontraire aux dispositions d'ordre public de la loiet doit être réputée non écrite » (CAVersailles,1re ch., sect. 2, 10 novembre 2000 ; D. 2000, IR,307).
(14) Les débats parlementaires révèlent que desdivergences de vue ont opposé le Gouvernementà l'Assemblée nationale, sur le point précis duchamp d'application de la notion de « responsabilitéde plein droit ». L'intervention du ministredélégué à l'Industrie, Monsieur PatrickDevedjian, lors de la discussion du projet de loien deuxième lecture devant le Sénat, le 8 avril2004, résume bien la situation : « La propositiondu Gouvernement de limiter la responsabilitéglobale du marchand aux transactions entre lesprofessionnels et les particuliers, en laissant unrégime de responsabilité contractuelle pour lestransactions entre les professionnels n'a pas étésuivie par l'Assemblée nationale, qui a élargi àl'égard de tous les acheteurs, particuliers ou professionnels,la responsabilité des exploitants desites marchands, même si les obligations ducontrat sont exécutées par d'autres prestatairesde services. »
(15) Paris, 8 juin 2000, D. 2000.840, note approbativeY. Dagorne-Labbé. La Cour d'appel deParis a refusé d'appliquer la responsabilité deplein droit pour des voyages laissant « unegrande part d'initiative aux participants », etpour les activités dans lesquelles les participantsont un rôle actif. Cet arrêt a été critiqué, voire àce propos, D. Tandonnet-Gency, Les tendancesrécentes de la jurisprudence relative à la responsabilitédes agences de voyages et la loi du13 juillet 1992, GP 7-8 mars 2003, p. 707.
(16) En ce sens, Cass. Civ. 1re, 17 mars 1998, JCPG 1998, n° 38, p. 1592, note S. Piedelièvre.
(17) Ph. Stoffel-Munck, La réforme des contratsdu commerce électronique, Comm. comm. électr.2004, étude 30.